Chapitre 4 — Nue, face à l’inconnu
Elle ne posa aucune question.
Elle ne tenta pas de comprendre, ni de résister.
À vingt-trois heures précises, Élisa sortit de sa chambre, le corps nu sous un simple kimono blanc en soie, les cheveux lâchés. Pieds nus, elle longea le sentier éclairé par les flambeaux. L’air était lourd, presque électrique. Chaque pas sur les dalles de pierre résonnait dans son ventre.
Elle savait que cette nuit serait différente.
Elle savait aussi qu’elle ne la contrôlerait pas.
Devant la grande porte de bois sombre de la villa principale, elle hésita. Une seconde. Une seule.
Puis elle entra.
La pièce était faiblement éclairée par des bougies posées çà et là. Des effluves d'encens, bois de santal et cannelle, saturaient l’atmosphère. Le bruit de la mer, étouffé derrière les baies vitrées, semblait battre comme un cœur. Et au centre, debout, immobile, Kaylan l’attendait.
Il était vêtu de noir. Pantalon ample. Torse nu. Une chaîne argentée autour du cou. Il ne sourit pas. Il ne dit rien.
— Ferme la porte.
Sa voix était calme, mais il n’y avait rien de tendre. C’était un ordre.
Élisa obéit.
— Enlève le kimono.
Ses mains tremblaient, mais elle obéit encore. Elle le laissa tomber. Il glissa sur ses épaules, puis sur le sol. Elle resta là, nue, offerte, son souffle court.
Il s’approcha. Très près. Elle sentit sa chaleur avant même qu’il ne la touche.
Il tourna autour d’elle, lentement, comme un fauve évaluant sa proie. Ses doigts frôlèrent son bras, son dos, ses reins. Jamais son regard ne la quittait.
— Tu sais ce que tu fais ?
— Non, murmura-t-elle.
— Et tu restes quand même ?
— Oui.
Il s’immobilisa.
— Alors tu vas m’appartenir ce soir. Sans poser de questions. Tu es prête à ça ?
Elle ferma les yeux. Son cœur battait si fort qu’elle le sentait dans sa gorge.
— Oui.
Il attrapa ses poignets, les attacha doucement avec un foulard de soie, et les leva au-dessus de sa tête, les nouant à un anneau suspendu à une poutre.
Elle n’eut pas peur.
Seulement du désir. Pur. Brutal.
Il fit le tour. S’accroupit. Et posa sa bouche là, entre ses cuisses.
Longtemps.
Elle gémit, se cambra, s’abandonna à sa langue précise, lente, profonde. Il la faisait monter, puis la retenait. Encore. Et encore. Jusqu’à ce que son corps entier tremble de frustration.
Puis il se leva. Et la pénétra d’un seul coup.
Elle cria.
Mais pas de douleur. De soulagement.
Comme si elle attendait ce moment depuis une éternité.
Il la prit, violemment, passionnément. Il murmurait des mots qu’elle ne comprenait pas. Dans une autre langue. Une langue ancienne. Une langue de possession.
Chaque coup de rein la ramenait à la vie. Chaque claquement de peau contre peau effaçait ses doutes, ses blessures, ses peurs.
Quand elle jouit, elle pleura. Et il resta en elle. Fort. Présent.
— Regarde-moi, dit-il.
Elle leva les yeux, encore haletante.
— Tu n’es plus une étrangère. Tu es à moi maintenant.
Puis il la détacha, la porta dans ses bras, la déposa sur le lit à baldaquin au centre de la pièce, et resta là, la tête posée contre son ventre, les yeux clos.
Elle lui caressa les cheveux, sans parler.
C’était une nuit sans mots. Une nuit de cicatrices muettes, de vérités physiques. Une nuit qui liait deux êtres sans promesse, mais avec une intensité rare.
Et quand l’aube se leva sur Suryavana, ils ne dormaient toujours pas.
Ils se regardaient.
Comme deux âmes nues, enfin confrontées à la vérité.
