Chapitre 5 : Le premier coup
Le lendemain matin, Alexandre se leva tôt. Le soleil perçait à peine à travers les rideaux épais de sa suite d’hôtel, mais il était déjà bien éveillé, prêt à mettre en marche le plan qu’il avait soigneusement élaboré durant les dernières semaines. Le monde pouvait dormir, mais lui, il ne se permettait aucune pause. La vengeance, pour lui, était une question de timing. Chaque mouvement devait être précis, calculé. Une erreur pouvait tout gâcher.
Marc Lemoine lui avait donné ce qu’il voulait : des informations sensibles sur les finances de Jacques. Un réseau complexe de transactions douteuses, des investissements à la limite de la légalité, et surtout, des failles à exploiter. Jacques pensait que son empire était solide, mais Alexandre savait mieux que cela. La clé de son ascension résidait dans la destruction méticuleuse de ce réseau, dans la révélation de ses secrets les plus sombres.
Aujourd’hui, il allait frapper un premier coup. Il avait obtenu les informations nécessaires pour attaquer une de ces failles : un investisseur clé dans l’empire de Jacques, un homme qui semblait être au courant de certaines manœuvres illégales, mais qui n’avait pas encore pris parti. Alexandre avait besoin de ce contact, d’un allié qui pourrait retourner les autres contre Jacques. Il savait que chaque lien tissé dans l’ombre serait un pas de plus vers son objectif.
Dans une demi-heure, il avait rendez-vous avec cet investisseur. Un rendez-vous discret, au fond d’un restaurant chic mais peu fréquenté, où les affaires se faisaient dans le plus grand secret. Alexandre savait que ce n’était qu’une formalité. Il avait préparé son approche depuis longtemps. L’homme était avide de pouvoir et de richesse, et Alexandre était prêt à lui offrir les deux, mais à un prix élevé.
Il se rendit dans la salle de bain, se regarda un instant dans le miroir. Il avait changé. Ses traits étaient plus durs, son regard plus froid. Le jeune homme passionné et impulsif qu’il avait été n’était plus. Il n’avait plus le temps pour les émotions, pas maintenant. Ce qu’il avait à accomplir nécessitait une précision clinique. Sa vengeance allait être un chef-d’œuvre de manipulation, et chaque action devait servir à enfoncer le clou plus profondément dans le cœur de Jacques.
En quittant l’hôtel, il se rendit directement à l’adresse indiquée. Le restaurant était situé dans un coin tranquille de la ville, loin de l’agitation habituelle. Le cadre était élégant, mais l’atmosphère dégageait une certaine froideur, comme si l’endroit avait été choisi spécifiquement pour ses conversations secrètes. L’investisseur l’attendait déjà à une table isolée dans un coin sombre.
Alexandre s’assit en face de lui, sans sourire, sans chercher à établir une quelconque camaraderie. Il n’était pas là pour plaisanter. L’homme en face de lui, un certain Didier Renard, lui rendit son regard avec un air impassible. Il n’était ni jeune, ni particulièrement charismatique, mais il avait une influence considérable dans le monde des affaires. Et c’était cette influence qu’Alexandre voulait exploiter.
“Renard”, commença Alexandre d’un ton neutre, “tu sais pourquoi je suis ici.”
Didier hocha lentement la tête, son regard dur, presque accusateur. “Je suppose que tu veux me parler de Jacques.”
“Exactement”, répondit Alexandre, les yeux fixés sur lui. “Je sais que tu es impliqué dans certaines de ses transactions, des transactions qui ne sont pas aussi nettes que tu voudrais le faire croire.”
Renard le regarda fixement, ses mains posées sur la table. “Tu ne sais pas de quoi tu parles, Durand. Si tu cherches à me faire peur, tu t’y prends mal.”
Alexandre sourit intérieurement. L’homme était plus rusé qu’il en avait l’air, mais il n’était pas assez intelligent pour voir la fin du jeu. “Oh, je sais bien plus que tu ne le crois, Renard. Je sais que tu as tes mains dans des affaires… délicates. Des affaires qui peuvent coûter très cher à Jacques.”
Renard plissa les yeux. “Et qu’est-ce que tu veux de moi, exactement ?”
Alexandre se pencha légèrement en avant. “Je veux que tu travailles pour moi. Tu m’aides à mettre fin à l’empire de Jacques, et en échange, tu conserves ta place au sommet. Je t’offre la possibilité de prendre sa place. Son empire… son pouvoir. Tout cela peut être à toi. Mais seulement si tu me suis.”
Il y eut un long silence. Renard semblait hésiter, pesant les mots d’Alexandre. Ce dernier savait que l’homme avait un goût prononcé pour le pouvoir, et il savait aussi que Jacques était son principal obstacle. Alexandre avait appuyé là où ça faisait mal, en dévoilant des secrets que Renard avait tout intérêt à garder cachés.
“Et si je refuse ?” demanda Renard, sa voix grave.
Alexandre haussa les épaules, son expression impassible. “Tu sais ce qui se passera. Tu seras un pion dans le jeu de Jacques. Une victime collatérale. Mais si tu acceptes… alors, tu deviens un acteur principal dans l’histoire.”
Renard observa longtemps Alexandre, comme s’il essayait de percer sa véritable intention. Finalement, il se redressa dans sa chaise et sourit, un sourire glacial. “D’accord, Durand. Tu as un allié. Mais tu sais que tout ceci comporte des risques.”
Alexandre lui tendit la main. “C’est un risque que nous devons prendre.”
