Chapitre 5 – Adieu, Morel

Le choc était encore suspendu dans l’air comme une onde de tempête. Les applaudissements pour Joyce venaient à peine de s’estomper, que la tension dans la salle devint palpable. Les invités, les journalistes, les investisseurs… tous gardaient le silence. Même les serveurs ne bougeaient plus.

Au fond de la salle, Claudine Morel serrait les dents si fort que sa mâchoire tremblait. Son regard foudroya Joyce qui descendait de la scène avec grâce.

Elle avança alors, sans vergogne, dans l’allée centrale, suivie par Ambre aux yeux remplis de jalousie et Adrien, encore figé dans l’incrédulité.

— C’est donc ça, lâcha Claudine d’une voix cinglante. Une traînée, voilà ce qu’elle a toujours été. Une boniche à tout faire, déguisée en femme d’affaire.

Les murmures se turent aussitôt. Plus personne n’osait parler. On entendait presque les battements de cœur des invités, suspendus à la suite de cette scène.

Joyce, calme, se tourna vers Claudine. Elle n’avait plus la fragilité d’hier. Elle était une reine.

— Je vous ai servi pendant trois ans, dit-elle, la voix froide. Préparé vos repas, lavé vos vêtements, courbé l’échine sous vos ordres… tout ça pour votre fils. Mais aujourd’hui, je ne suis plus rien de tout ça.

Elle s’approcha alors de son mari, tendant un dossier épais.

— Adrien Morel, voici les papiers du divorce. Je te les présente ce soir, devant témoins.

Adrien la fixa, hagard. Il ne les prit pas.

— Non… Je… je refuse de signer ça. Joyce, on peut parler de ça en privé, pas ici, pas comme ça…

Mais elle se détourna.

Elliot Foster, jusqu’ici resté en retrait, s’avança calmement. Il leva un doigt, et deux gardes du corps en costume sombre apparurent derrière Adrien.

— Monsieur Morel, dit Elliot d’un ton parfaitement poli, mais sans appel. Je vous conseille de signer. Vous êtes actuellement en présence de membres du conseil d’administration d’Éclipse, de figures influentes de la presse et du monde financier. Rejeter ce document maintenant serait… nuisible à votre image déjà entachée.

Adrien blêmit.

— Vous n’avez pas le droit… vous…

Mais le stylo tendu entre les doigts d’Elliot attendait. Et sous la pression, Adrien signa. D’un geste tremblant, humilié, écrasé.

Joyce récupéra le dossier, puis se tourna vers la foule. Son regard devint à nouveau tranchant, conquérant.

— Je ne suis plus Joyce Morel, dit-elle à haute voix.

— Ce nom ne m’a apporté que souffrance, trahison et mépris. Ce soir, je rends tout cela. Je m’en libère.

Je suis Joyce Lister, fondatrice et PDG d’Éclipse, et je reprends enfin la place qui m’a toujours appartenu.

Un instant de silence, puis…

L’explosion.

Les applaudissements, les cris d’admiration, les flashs des appareils photo. Toute la salle se leva. La presse hurlait son nom, les investisseurs souriaient, des figures célèbres se pressaient pour venir la féliciter.

Au milieu du vacarme, Claudine, Adrien et Ambre étaient debout, figés comme des statues au milieu de la tempête. Ridiculisés. Rejetés.

Un agent de sécurité s’approcha d’eux.

— Mesdames, Monsieur. Vous n’êtes plus les bienvenus. La direction vous demande de quitter les lieux.

— C’est une plaisanterie ?! hurla Ambre. Elle ne peut pas faire ça ! C’est une…

Mais déjà les gardes les accompagnaient vers la sortie.

Sous les yeux de toute l’élite de la ville, les Morel furent jetés dehors.

Joyce, elle, tournait déjà la page.

Elle leva son verre, entourée de ses collaborateurs, tandis qu’Elliot se tenait à ses côtés, fidèle comme toujours.

Une ère venait de s’effondrer.

Une autre venait de naître.

Joyce Lister régnait désormais.