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Chapitre 4

Un jeu dangereux

Épisode 4

Maryline

Il avait fallu attendre six mois avant que le procès eût lieu. Après l’arrestation, j’avais été relâchée dès le lendemain matin, mais mon père, Fabrice et hyacinte avaient été inculpés de différents délits.

En attendant le procès, j’habitais chez Andréa et sa mère parce que, même en prison, hyacinte régnait encore sur Assinie , si bien que mon père avait dû lui céder sa maison pour payer un avocat.

J’ai pu le voir, pour de courtes visites surveillées.

C’était terrible à admettre, mais j’aurais préféré voir Fabrice : chaque fois, j’avais espéré l’apercevoir. Par ailleurs, je n’arrivais plus à regarder mon père en face.

— Au tribunal, tu entendras raconter beaucoup de choses, m’avait-il prévenue. Certaines seront vraies, mais la plupart ne seront qu’un ramassis de mensonges...

A présent, je ne savais plus que croire. Diverses babioles et des bijoux avaient été retrouvés chez nous . Des « souvenirs », avait déclaré la police, ayant appartenu aux victimes.

Ces objets avaient été apportés là exprès. Faisant le ménage, j’ étais bien placée pour le savoir. Mais je savais aussi que mon père, s’il n’était pas un assassin, n’était pas non plus un enfant de chœur. Et cette certitude me pesait sur le cœur.

— hyacinte m’envoyait leur donner des avertissements... Ça ne veut pas dire que je leur faisais du mal...

— Peut-être, mais rien qu’avec ces avertissements, tu faisais régner la terreur. Pourquoi lui obéissais-tu ainsi ?

— Maryline ...

— Non, je ne me tairai pas ! Tu choisissais de lui obéir et ne me dis pas que tu l’as fait pour moi, s’il te plaît. C’est un salaud, il nous a délibérément maintenus dans la pauvreté.

— Tu as Fabrice

— Ah... Tu lui obéissais à cause de ça, peut-être ! Je l’aurais eu de toute façon, avec ou sans ton aide !

J’en était presque sûre.

Ces six mois d’attente avaient été si longs... je brûlais de partir avec Lui à Paris ... De commencer enfin à vivre mes rêves...

— Après le procès, tu pourras quitter

Ce village et recommencer à zéro

— Je n’abandonnerai pas ta mère.

— Elle est morte depuis dix-sept ans ! Je vais m’en aller, papa. Je vais partir avec Fabrice . Je ne veux plus voir Assinie , ni les gens qui m’ont jugée.Toi aussi, tu entendras des choses sur moi, au tribunal. Des choses qui ne vont pas te plaire. Lorsque la police a débarqué chez Fabrice , nous...

—Maryline , vous êtes quasiment fiancés. Vous n’avez pas à avoir honte de ce que vous faisiez ensemble. Viens témoigner au tribunal la tête haute !

Hélas, ce serait difficile...

Ce jour-là, sur le trajet de retour, je me suis arrêtée devant la vitrine du bijoutier, et l’avait aperçu derrière son comptoir.

— On ne vous a toujours pas rapporté ma boucle d’oreille ?

Il s’était contenté de secouer brièvement la tête avant de se détourner. Personne ne voulait être vu en train de me parler.

Machinalement, j’ai contemplé les nouveaux bijoux exposés dans la vitrine et remarqué une énorme émeraude sertie sur un fin anneau d’or rose. J’aurais tant aimé que Fabrice m’offre cette bague...

Tout en marchant dans la rue, j’avais pensé à lui. Il n’avait personne, sa mère étant morte depuis longtemps.

Si, il avait quelqu’un : moi. Et il était hors de question que je le laisse tomber maintenant. Alors, comme l’avait dit mon père, j’irais témoigner la tête haute, sans avoir honte de ce que nous avions fait ensemble cet après- midi-là.

******

Jusque-là, Je n’avais pas été autorisée à entrer dans la salle d’audience, mais aujourd’hui, je suis appelée en tant que témoin. Et, même si je redoutais d’entendre exposés en public des détails embarrassants, et que j’avais peur pour mon père, j’étais soutenue par la perspective de voir enfin Fabrice

Dès que je m’avançais vers la barre, je l’aperçois , et nos regards se soudèrent. il m’adresse un petit sourire encourageant. Il avait minci. Sa blessure à l’œil avait dû être peu ou mal soignée, si bien que la cicatrice ressortait, violacée. Et puis, on lui avait coupé les cheveux bien trop court...

.

Après un rappel plutôt embarrassant des circonstances dans lesquelles les policiers nous avaient trouvés, on me posa une question directe.

— Quand vous êtes allée à la boulangerie , vous saviez que Gorgina n’était pas bien, n’est-ce pas ?

— Comment aurais-je pu le savoir ?

— Et vous avez interrogé votre père en rentrant chez vous ?

— J’y ai juste fait une allusion.Je pensais que l’attitude de Gorgina était en relation avec mes futures fiançailles. Et au fait que hyacinte allait devenir mon beau- père...

— Contentez-vous de répondre aux questions.

Hyacinte et Fabrice étaient défendus par le même avocat.

— Ces souvenirs que la police a trouvés chez nous...

J’aurais voulu expliquer que les objets ayant appartenu à des personnes décédées ou provenant de maisons démolies ne s’étaient jamais trouvés chez nous , auparavant.

— Nous nous occuperons de cela plus tard, m’interromps l’avocat de mon père.

Mais il n’en reparla jamais.

Quand je quitte la barre, Je suis autorisée à rester dans la salle d’audience pour assister à l’interrogatoire des inculpés.

Les questions posées à hyacinte furent totalement inoffensives, taillées sur mesure pour lui, si bien qu’il regagna le banc des accusés avec une auréole de saint et un sourire arrogant.

Mon père se présente à son tour à la barre, et répond bientôt avec difficulté, de plus en plus faible et confus. Indignée, Je me leve pour protester : de toute évidence, son avocat lui brouillait délibérément les idées.

Rien n’était juste, dans ce procès de pacotille !

— Taisez-vous, sinon vous serez évacuée de la salle !

— C’est injuste

Assise à côté de moi , Andrea pose doucement sa main sur le bras.

Mon père reconnut qu’une deuxième visite signifiait que si les gens ne payaient pas leurs dettes, ils auraient des ennuis.

La troisième était l’ultimatum.

— Je n’avais pas le choix, dit-il pour se justifier. Je devais obéir à hyacinte .

Je tressaillis devant sa pauvre défense. Puis ce fut le tour de Fabrice en costume noir et cravate, le teint pale. Quand il arrive à la barre, il repousse le policier qui lui tenait le bras et redressa les épaules.

A cet instant, Il se tourne vers son ami Thierry et lui fait un petit signe de tête, puis il me regarda. Il tentait manifestement de me faire comprendre avec les yeux que tout irait bien, qu’il contrôlait la situation.

— Vos inquiétudes concernant les agissements de max Dje ont-ils joué un rôle dans votre décision de rompre avec sa fille ?

Tout le monde retint son souffle.

— Maryline et moi avons décidé de disposer de nous-mêmes et de notre avenir

— Nous reviendrons sur ce point, mais d’abord, pouvez-vous répondre à ma question ? Etiez-vous inquiet à propos des agissements de Max ?

— Je n’ai jamais songé vraiment à lui.

— Maryline vous avait-elle dit qu’elle s’inquiétait à propos des activités de son père ?

— Non.

Il venait de mentir pour moi. Sous serment.

— Alors, de quoi avez-vous parlé, ce jour-là ?

— Je ne m’en souviens pas vraiment.

— Vous étiez sans doute trop occupés à autre chose ?

—Je ne comprends pas...

—Cet après-midi-là, vous aviez bien dit à votre père que vous aviez l’intention de rompre avec Maryline , n’est-ce pas ?

— Oui. Mais...

— Vos paroles ont dérouté hyacinte , Vous vous êtes même battus quand vous avez parlé de façon ignoble de la fiancée qu’il vous avait destinée depuis presque toujours. Vous avez dit que vous ne vouliez pas épouser la paysanne qu’il avait choisie pour vous. Vrai ou faux ?

Je fermais les yeux et serra les paupières, puis me força à les rouvrir lorsque Fabrice reconnut qu’il avait bien prononcé ces mots.

— J’essayais de m’affranchir de mon père...

L’avocat ne le laissa pas terminer sa phrase.

— Vous avez dit à votre père que vous préfériez les femmes « superbes et sophistiquées ». Alors, comprenez que je sois un peu perdu... Lorsque Maryline est venue chez vous...

— Mon père l’avait fait venir pour pouvoir déposer ses souvenirs chez Max en son absence.

— Maryline a appris que vous alliez renoncer à l’épouser, elle est venue vous voir ce dimanche après-midi pour vous faire changer d’avis, et vous vous êtes retrouvés au lit. Ou, plus exactement, vous avez couché ensemble dans la cuisine.

— Non.

— Ainsi, vous affirmez que rien ne s’est passé dans la cuisine ?

— Comme je viens de le dire, je m’étais disputé avec mon père, elle s’occupait de ma blessure...

— Oh ! je vois... Vous saigniez si abondamment qu’elle s’est vue obligée d’ôter sa robe pour arrêter l’hémorragie et l’a ensuite laissée tomber sur le sol ?

Mortifiée, humiliée dans ma chair, j’entend toute la salle éclater de rire.

— Mon père avait proposé que Maryline vienne me voir avant que je lui fasse part de ma décision de ne pas l’épouser. Il voulait la faire sortir de chez elle pour pouvoir...

— Maryline désirait-elle, de son côté, quitter la maison de son père ? l’interrompit une fois de plus l’avocat. Etait-elle inquiète de l’implication de celui-ci dans des activités criminelles ? Vous a-t-elle dit qu’elle voulait s’éloigner de lui ?

— Non.

— Vous êtes sous serment, lui rappela l’avocat.

— Non, . Elle n’a rien dit de tel.

— Vous avez néanmoins affirmé à votre père que vous n’aviez pas l’intention de vous fiancer avec elle ?

— Oui.

— Et vous avez dit la même chose à Maryline

— Oui.

— Fabrice , pouvez-vous vraiment espérer que la cour va vous croire, quand vous dites qu’il n’y a eu aucune conversation...

— Nous étions occupés à autre chose, comme vous l’avez suggéré vous-même.

— Et une fois que vous en avez eu terminé avec cet autre chose, vous n’avez pas bavardé et évoqué son père ?

— Non. Nous avons à peine échangé quelques mots.

— C’est impossible. Vous...

Sans laisser à l’avocat le temps de poursuivre, Fabrice se tourne vers le juge.

— Sophie a sans doute voulu essayer de me faire revenir sur ma décision en tentant de me séduire, Alors, j’en ai profité : j’ai pris ce qu’elle m’offrait.

Il regarda les membres du jury, puis revint au juge.

— Ce sont mes actes ou ma libido qu’on juge ici ?

Le rire qui parcourut la salle mit fin à son interrogatoire. Mais, quand Fabrice quitta la barre, je ne le regardais pas....

À suivre ...

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