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chapitre 4

Chapitre 4

Il l’avait vue avant même qu’elle ne le remarque. Une silhouette parmi les autres, comme une présence familière qui s’échappe sans qu’on sache pourquoi. Il n’avait pas voulu la voir, pas là, pas ici. Mais elle était là, et c’était comme si tout autour d’elle s’était effacé, tout bruit s’était réduit à un murmure. Il avait le cœur qui battait trop vite, une douleur qui revenait à la surface. Elle était là, dans ce café, un endroit banal pour un moment qui ne l’était pas.

Elle ne l’avait pas vu. Elle était assise à une table, un café à la main, concentrée sur quelque chose qu’elle avait devant elle. C’était comme si le temps n’avait pas eu d’emprise sur elle, comme si elle n’avait pas changé. Mais il savait que si elle l’avait vu, elle aurait détourné le regard, ou même disparu dans la foule, comme la fois où il l’avait vue à l’événement. Et là, il se tenait là, à quelques pas, à la regarder sans oser bouger.

Elle leva les yeux, leurs regards se croisèrent. Elle resta figée un instant, avant de froncer légèrement les sourcils. Ce n’était pas un sourire. Pas même une trace d’émotion. Juste un regard vide, comme une forme de reconnaissance qui se perdait, effacée. Elle n’avait rien dit, mais lui, il savait. Il savait que ce n’était plus la même.

Il s’approcha, hésitant, et s’arrêta avant de prononcer les premiers mots. « Tu ne m’as pas reconnue. »

Elle cligna des yeux. Puis, après un long silence, elle murmura d’une voix glacée : « Je pense que non. » Et c’était tout. Pas de chaleur, pas de réminiscence d’un autre temps, pas même un bout de souvenir. Elle l’avait regardé, et c’était tout. Pas un sourire, juste cette phrase. Pas de surprise dans ses yeux, pas de colère non plus. Juste un vide, un silence lourd entre eux. Et dans ce silence, une chose étrange se produisit : il se rendit compte qu’elle était devenue une autre. Pas la femme qu’il avait connue. Pas celle qu’il avait aimée. Non. Une inconnue. C’était une étrangère, une silhouette froide et distante.

Il s’assit en face d’elle, sans y réfléchir. « Pourquoi ? » lâcha-t-il, sans même savoir à quoi il répondait. Peut-être à la distance, à l’indifférence, à tout ce qu’il ne comprenait pas. Mais les mots sortaient. Ils tombaient, lourds, comme des pierres qu’il avait enfouies pendant trop longtemps.

Elle haussait les épaules, comme si tout cela n’avait plus d’importance. « Pourquoi quoi ? » dit-elle, sans émotion. « Pourquoi je t’ai quitté ? Ou pourquoi tu es là, à me parler comme si tout était normal ? »

Il se tordit les mains sous la table. Il n’était plus le même. Il n’était plus celui qui l’aimait, celui qui lui faisait des promesses. Non, il était devenu un étranger dans son propre corps. Mais quelque chose, là, au fond, restait. Quelque chose qu’il n’arrivait pas à chasser. Et cette question brûlait. Pourquoi ? Pourquoi tout cela s’était-il effondré entre eux ? Pourquoi avait-elle changé ? Pourquoi lui avait-elle dit, un jour, qu’il ne la voyait pas, qu’il ne comprenait pas ce qu’elle était vraiment ? C’était ça, qu’il n’avait pas compris. Elle avait disparu sans explication.

Elle n’attendait pas de réponse. « Je n’ai pas de compte à te rendre, Khalil. »

Il baissa les yeux. Son prénom dans sa bouche avait une dureté, un tranchant qu’il n’avait pas connu avant. Elle ne le regardait même plus. Elle avait repris sa tasse de café, comme si cette conversation n’avait aucune importance. Comme si tout ce qu’ils avaient été n’avait jamais existé.

La douleur, il la sentait comme un poison. Ça le brûlait à l’intérieur, et il ne pouvait rien y faire. Il avait voulu la retrouver, cette femme qui l’avait aimé. Il avait cru qu’elle serait la même. Mais ce qu’il voyait maintenant, c’était une version d’elle-même qu’il n’avait pas imaginée. Ce regard, cet air éteint, cette indifférence. Tout en elle l’avait changé. Il se sentait faible face à ça.

Elle posa sa tasse, les doigts frôlant la céramique, comme si elle cherchait à se donner une contenance. « Tu me manques, Khalil », dit-elle enfin, mais d’une manière qui n’avait plus rien de sincère. C’était une phrase sans cœur, une phrase qu’elle jetait comme un débris au milieu de la conversation. Il la regarda, confus, désemparé. Comment pouvait-elle dire ça avec une telle indifférence ? Comment osait-elle prononcer ces mots, comme s’ils n’avaient plus aucun sens ?

Elle se leva lentement, jetant un dernier coup d’œil à Khalil avant de prendre son sac. Il ne savait pas si elle partait pour de bon ou si c’était juste un mouvement, un geste qu’elle avait l’habitude de faire. Mais il savait qu’elle ne reviendrait pas. Pas ce jour-là, ni aucun autre jour. Elle était devenue une autre personne. Une femme différente, un masque sur son visage. Un visage marqué, fatigué, comme si le temps avait fait son œuvre sur elle.

Il ne la suivit pas. Il ne se leva pas pour la retenir. Il était resté là, seul avec ses pensées, avec ses regrets qui le submergeaient. Elle était partie, sans un regard, sans une parole supplémentaire. Et dans cette absence, il s’était retrouvé face à la réalité : elle ne reviendrait pas. Elle ne le reconnaîtrait jamais pour ce qu’il était. Elle l’avait déjà oublié, ou peut-être qu’elle avait cessé de le voir, comme elle l’avait dit jadis. Mais aujourd’hui, il comprenait enfin ce qu’elle voulait dire. Elle avait cessé de le voir, bien avant qu’il ne la perde.

La douleur, cette douleur lancinante qui le tenaillait, n’avait rien de romantique. Ce n’était pas de la passion, pas de l’amour. C’était juste une perte. Un vide qu’il ne pourrait jamais combler. Il l’avait regardée partir, et il savait, au fond de lui, qu’il n’y avait plus de retour possible. Elle était une autre femme. Une autre, et il n’avait rien à y faire. Rien du tout.

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