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16

Qu'est-ce que tout cela signifie ? Pourquoi toutes ces photos de moi, de nous ? J'ai peur. Si peur de ce qui m'attend.

-...

La voix de me fait sursauter. Je lève le visage, le regard hagard, la peur au ventre.

-Ces photos... c'est...

-C'est flippant. Carrément flippant même. on doit aller voir la police tout de suite.

Mes pensées bourdonnent dans ma tête, je triture les photos dans tous les sens mais aucun doute n'est permis. Ces clichés nous montrent vivant une vie dont je ne me souviens que brièvement mais que quelqu'un surveillait de loin. Des dizaines et des dizaines d'images glissent entre mes doigts. On nous voit au fil des années, tantôt faisant les courses, tantôt en compagnie d'autres jeunes de notre âge.

-Tu m'entends Em' ? On doit aller voir la police.

Ces gens nous ont suivis, ont guetté le moindre de nos mouvements. Une ombre a toujours plané sur nous.

-Em', réponds-moi !

-Hein ? Quoi ?

-On doit aller voir la police. Ces photos prouvent que ces tarés vous surveillaient, ton frère et toi.

-Oui, oui tu as raison mais...

-Il n'y a pas de mais. On arrête de jouer aux justiciers maintenant ! C'est trop grave. Cette histoire est trop grave.

-Je veux juste rentrer et regarder tout ce que contient ce dossier. Ensuite, on ira voir les flics.

acquiesce de mauvaise grâce en me reprenant le dossier des mains. Je m'engage à nouveau sur le périphérique, le cerveau complètement amorphe. A peine arrivés chez lui, nous étalons à la hâte le contenu de la chemise cartonnée. A côté du tas impressionnant de photos s'exhibent des papiers que je n'ai jamais vus. Un document imprimé où est inscrit le nom de ma mère ainsi qu'une liste de dates et de sommes. On dirait un relevé de dons ou un truc du genre. Et douze autres documents de la sorte, tous imprimés recto-verso. Le total astronomique noté sur la dernière page me donne le tournis.

Le reste n'est qu'un charabia de pseudo-naturopathes, un amoncellement de noms de remèdes soi-disant miracles pour soigner ma mère. La liste qu'ils ont dressée est longue comme le bras. Je m'affaisse sur mon siège en soupirant.

-Je ne comprends pas . Que font ces photos d'Enzo et moi dans ce dossier ?

-J'en sais rien mais ça n'augure rien de bon.

-Les relevés, les rapports de séance, les préconisations de pilules... à la rigueur, ce n'est pas surprenant, cela s'apparente à un suivi médical. Mais les photos...

reste silencieux. Les plis de son front et la frayeur qui ternit son regard renforcent mon inquiétude. Il enroule son bras autour de mes hanches.

-Ils surveillaient ta mère, ça on le savait déjà. Mais ils vous surveillaient vous aussi. Et ça, ce n'est pas normal.

-Rien n'est normal dans cette histoire.

-Raison de plus pour aller voir la police.

-Din, c'est promis.

J'épluche à nouveau longuement notre butin sans rien trouver de plus. me laisse à mes tergiversations puisque les garçons l'attendent pour répéter. Seule dans la grande demeure, je ne parviens pas à penser à autre chose qu'à ces gens qui épiaient nos moindres faits et gestes. Une idée me vient soudain en tête. Putain ! Enzo est seul en Italie. Une personne mal intentionnée rode peut-être autour de lui sans qu'il le sache. Je me jette sur les clichés pour les détailler à nouveau. Les dernières photos datent du printemps. Je me détends légèrement, Enzo ne semble plus être sous surveillance.

Mais cela signifie également que la mort de mes parents à endigué le processus lugubre qui nous entourait.

Un frisson ne me quitte plus. J'ai peur pour moi et pour mon frère. J'ai peur de découvrir ce qui se cache derrière ces photos. J'ai surtout peur de connaitre la vérité. Leur mort a été si violente, si brutale. Qu'est-ce qui a bien pu les mener à cette fin tragique ?

Ces questions sont comme un étau qui se resserre entre mes côtes. Je ne peux pas rester seule ce soir ou je finirai à coup sûr par devenir dingue. J'ai besoin de mes copines. Quand j'attrape mon téléphone, un message reçu une vingtaine de minutes plus tôt s'affiche.

Jamie : Rejoins-moi chez Sam, je regarde les mecs répéter en buvant des bières.

Je chope mon manteau et appelle Sophia en sortant de la maison.

-Allo ?

-Coucou Sophia, j'espère que tu es libre ce soir parce que je passe te kidnapper dans dix minutes.

Son doux rire résonne dans mes oreilles.

-Je crois que je n'ai pas vraiment le choix alors ?

-Exactement ! Prépare-toi, on va jouer aux groupies.

Quand j'arrive devant chez elle, Sophia brave le froid en piétinant.

-Ca me fait plaisir de te voir avec le sourire, lâche-t-elle aussitôt installée sur le siège passager.

Je rougis légèrement, toujours aussi gênée d'avouer que le garçon aux yeux bleus détient la clé de mon bonheur. Sophia frissonne, frotte ses mains gelées l'une contre l'autre. Je monte le chauffage et marmonne un bref remerciement qui la fait rire de nouveau. Lorsque je reprends la route, mon amie me reproche mon silence des derniers jours. Je lui raconte brièvement nos retrouvailles et notre parenthèse enneigée. Je m'excuse à nouveau de l'avoir laissée elle aussi sans nouvelle mais elle ne m'en tient pas rigueur.

-Finalement, je suis bien contente que tu n'aies pas trouvé le temps de nous appeler !

Je profite de cet aparté pour essayer d'infiltrer sa petite carapace.

-Jamie m'a raconté votre dernier rapprochement.

Surprise, elle rougit comme une écrevisse.

-Je ne suis pas là pour te juger Sophia. Simplement, fais attention à ma copine. Elle t'aime vraiment beaucoup et elle souffre de cette situation.

-Je sais, murmure-t-elle le visage baissée. Je... je ne sais pas quoi faire.

-Tu as envie de quoi au fond de toi ? Tu es heureuse avec Alexandre ? Tu es amoureuse de lui ?

-Je ne sais pas... je ne crois pas. C'est juste que...

Silence.

-Je suis perdue. Je n'ai jamais ressenti ça pour... une fille.

-Alors c'est ça qui te dérange ? Que Jamie soit une fille ?

-J'ai presque honte de te dire oui.

-Et si elle était un homme ? Que ferais-tu ?

Nouveau silence. Plus long cette fois.

-Je crois que j'aurais déjà quitté Alexandre.

Je ne réponds rien, je n'ai pas besoin de le faire. Sophia soupire en se prenant la tête entre les mains.

-Je sais que ce n'est pas juste envers lui, qu'il faut que je lui parle mais pour lui dire quoi ? Que je suis amoureuse d'une fille ?

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