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Essoufflée, j'appose le dernier mot de cette chanson. Je me relis une dernière fois, mon sang baignant dans une mare de rage sourde, puis je note Don't worry en haut de la feuille. Les doigts de se calment et bientôt, le silence se fait. Je fixe toujours mes paroles, me débattant avec la tempête qui gronde en moi. Le garçon pose sa guitare dans l'herbe avant de m'enlacer tendrement pour mieux plaquer mon dos contre son torse musclé. Ensevelie entre ses bras, prisonnière de sa peau salée et de son parfum enivrant, j'abandonne petit à petit le feu qui commençait à me consumer. Je cale mes inspirations sur les siennes et rapidement, je retrouve un peu de sérénité.

-Ne t'en fais pas Em', peu importe ce qui leur est arrivé, on découvrira la vérité.

J'entrelace mes doigts aux siens pour les porter doucement à ma bouche. Au moment où je m'apprête à lui répondre, son téléphone sonne. Nos mains se séparent pour que l'une d'elles plonge dans la poche de son pantalon. Le prénom de Laura s'affiche sur l'écran. Les émotions négatives qui s'étaient éloignées refont vite surface et je me relève d'un bond, réfrénant difficilement mon envie de lui arracher le téléphone des mains pour insulter cette idiote qui s'est jouée de mon frère.

-Je n'en ai pas pour longtemps, promis.

Je fulmine en m'échappant vers la maison. Cette journée est bien pourrie, si vous voulez mon avis. Je donnerais tout pour revenir à ce matin, pour vivre dans la bulle que nous avons créée et ne jamais la quitter. Dans la cuisine, je me verse un verre d'eau. Devant la baie vitrée, je scrute le moindre geste de . Son visage est fermé, son corps tendu. Je ne sais même pas pourquoi je me suis servi un verre d'eau, je n'ai pas soif. Les secondes passent sans que je ne puisse empêcher mon cerveau de me trahir, encore et encore.

Et s'il me laissait tomber ? Et s'il revenait vers elle ? Et si je n'étais qu'une lubie, qu'un fantasme d'adolescent ? Et si tout ce qu'ils ont vécu ensemble avait bien plus de poids que notre histoire ?

range son téléphone, lève la tête vers le ciel et se frotte les yeux. Puis il traverse le jardin et je crois que j'ai un peu froid toute seule, dans un coin de cette grande pièce. Quand il s'approche de moi, une lueur d'inquiétude traverse ses iris éteints.

-Hé mais qu'est ce qui se passe Em' ?

Il me prend dans ses bras, caresse mon dos. Je réalise que je tremble un peu mais je ne parviens plus vraiment à cacher cette angoisse qui me colle à la peau.

-Qu'est-ce qu'elle te voulait ? dndé-je, hésitante.

-Elle...

Il soupire longuement avant de reprendre.

-Elle veut me voir. Me parler. Elle... elle pleurait encore. Je... écoute Em', il faut que j'aille la voir, que je lui explique une dernière fois. Je te promets que c'est la dernière fois.

-Tu ne peux pas continuer comme ça. Cette fille est peut-être désespérée mais s'il y a bien quelqu'un qui ne peut pas l'aider, c'est toi. Il faut qu'elle passe à autre chose et ce n'est pas en courant se réfugier dans tes bras toutes les cinq minutes qu'elle y arrivera. Ce n'est pas non plus en couchant avec mon frère et en le jetant le lendin mais ne t'en fais pas, je me ferai un plaisir de lui le dire bientôt.

rit doucement en posant ses lèvres sur les miennes. En douceur, avec tendresse, avec juste ce qu'il me faut pour me rassurer.

-Tu as raison, il faut que je lui parle.

Un dernier baiser et il file chercher ses clés de voiture. Je pose mon verre d'eau – le verre d'eau le plus inutile de l'histoire des verres d'eau !- et je grimpe les escaliers pour trouver de quoi m'occuper l'esprit. Après avoir rangé du linge, fait un brin de ménage, trié des papiers et préparé à manger, je m'écroule sur mon canapé. n'est toujours pas revenu et je rumine. Je consulte mon téléphone mais mon frère ne m'a pas répondu. Je sens qu'il va se faire discret pendant quelques jours... Sur un coup de tête, je compose le numéro de Jamie. J'aurais bien besoin de ma copine pour me changer les idées.

-A-allo ? bredouille-t-elle en s'esclaffant dans un joyeux brouhaha.

-Jamie ? Mais où es-tu ?

J'entends des voix étouffées et des rires, de l'agitation derrière elle.

-A la terrasse d'un bar, avec Sophia. On... on boit un coup.

Je ne reconnais pas sa voix. Elle est trop joviale, presque un peu niaise. Autour d'elle, il y a des chuchotements que je ne parviens pas à déchiffrer et elle rit bêtement.

-Jamie... t'es bizarre. Que se passe-t-il ?

-Rien, rien...

De nouveaux gloussements.

-Tu veux nous rejoindre ?

-Non c'est bon. Profitez bien toutes les deux et soyez sages.

-Pff t'es bête !

Je contemple un moment mon téléphone après avoir raccroché. Bon sang, à quoi viens-je d'assister ? Sûrement à une parade nuptiale entre deux filles énamourées. Ce fiasco téléphonique ne résout pas ma solitude, bien au contraire. Je finis par allumer la télévision et comater devant une émission idiote dans laquelle des mecs que personne ne connait doivent cuisiner des aliments que personne ne connait pour un jury que personne ne connait. Et évidemment, je me surprends à critiquer à mon tour ces plats que je ne gouterai jamais !

Lorsque le programme touche à sa fin, un autre tout aussi passionnant démarre. J'hésite à téléphoner à Nathalie pour lui rendre une petite visite. Peut-être qu'après ce que j'ai appris ce matin, je serai plus à l'affût du moindre détail suspect ?

J'enfile mes baskets et attrape mon sac à main. En ouvrant la porte d'entrée, je me retrouve nez à nez avec le facteur. Un cri de surprise passe mes lèvres tandis que le vieil homme réprime un petit rire. Il me dnde de réceptionner un recommandé adressé aux parents de . Je signe le document et salue le facteur qui me confie également des lettres qui me sont destinées.