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CHAPITRE 13

Que dois-je faire ou que faut-il faire ? Qui appellerais-je au secours vu que cette dame n’a pu reconquérir mes parents ? Dieu ? Pourra-t-il vraiment m’envoyer les anges pour me sauver de cette situation qui était sur le point de me coûter la vie ?

– J’ai une proposition, me murmura tristement la jeune femme.

Proposition ? Il n’en manque jamais. À un seul problème, il en fallait mille solutions.

– Laquelle ? lui demandai-je automatiquement comme si je m’attendais à une telle affirmation de la jeune femme.

– Allons porter une plainte à la brigade.

Au lieu d’accepter cette belle idée pour prévenir le pire, je fus sotte et refusai.

– Oh, je suis désolée, je ne peux pas faire ça. Sinon, c’est la moindre des choses qui pourrait tout empirer davantage ? S’il vous plaît madame, vous en avez déjà assez fait pour moi. Rentrez maintenant chez vous, je vous en prie, je saurai comment les supplier, merci.

La dame, tétanisée, m’observa péniblement pendant plusieurs minutes avec une marque de tristesse apparente sur son petit visage.

– Franchement, tu me fais beaucoup pitié mais ça va aller.

– Merci d’avoir compati à ma passion, je vous en suis reconnaissante, lui disais-je en m’essuyant les gouttes de larmes qui s’asséchaient déjà sur mes joues.

La dame, toute triste, me considéra pendant quelques moments.

– Je dois te fausser compagnie parce que je dois aller au service.

– D’accord, merci infiniment, madame et que Dieu vous bénisse.

– Amen ! Qu’il écoute tes pleurs et vienne intercéder pour toi aussi !

– Amen ! Je vous présente toutes mes civilités.

Difficilement, ma bienfaitrice m’abandonna pour rejoindre sa jeep qu’elle avait garée à quelques centimètres du portail. Elle la démarra et au lieu de partir, elle me regardait encore.

Malgré mon cœur emballé, je levai la main et lui fis au revoir. Elle me klaxonna en guise de réponse.

Cette dame était de bon cœur. Elle ne ressemblait ni à mon père, ni à ma mère et encore moins, à la mère de Bruno.

C’était après le départ de la dame que je me rappelai de ma sœur qui s’était pointée sur la pelouse du portail. Je jetai un clin d’œil vers le portail mais la folle n’y était plus. Elle s’était déjà retournée à l’intérieur de la maison.

Sur le portail, je n’étais que seule. Je restai là, en face du portail pendant cinq bonnes heures de temps.

Le soleil matinal qui était doux changea de rythme quelques heures plus tôt et devint ardent. Ses rayons me lapaient tellement le corps que j’avais l’envie de m’en échapper mais pour aller où ? De la tête aux pieds, ce n’était pas du tout la joie ; je me sentais mal.

En réalité, je ne craignais pas l’effet de ce soleil. J’étais plutôt plongée dans mes imaginations. Je me rappelais de beaucoup de choses. Enfin, une voix me chuchota dans l’esprit que mes parents allaient finir par avoir pitié de moi et me demanderont à entrer dans la maison. Une autre me disait que je suivrais une correction affreuse.

Les voix passaient l’une après l’autre. Enfin, je voyais les élèves du cours primaire revenir de l’école. Je m’imaginai l’heure qu’il faisait.

Tout à coup, j’entendis le portail grincer. Je tournai mon regard à son adresse et constatai que quelqu’un l’ouvrait. Je vis Brigitte apparaître.

Que voulait-elle me dire ? me demandai-je.

– Papa et maman t’appellent, me dit-elle d’un regard chavirant de douleur.

Encore eux ? Mon cœur commença par battre fort et très fort. Que voulaient-ils me dire ? Ou pour quoi m’en veulent-ils à nouveau ?

Sans perdre le temps, je suivis ma sœur jusqu’à l’entrée de la chambre. Je saluai mon père et ma mère. Seule maman m’avait répondu l’air un peu envieux. Papa, quant à lui, ne me prêta aucune attention.

– Te voilà enfin ? m’interrogea mon père ; enlève-moi toutes tes tenues et mets-toi à genoux là, m’ordonna-t-il.

Eh oui ! Quel était le prix d’un pécheur ? La punition ! J’obtempérai mais en larmes.

Mon père m’approcha lorsque je finis de me déshabiller et de m’agenouiller. Avec une corde à la main, il commença à me ligoter au point où je ne pouvais plus bouger. Lorsqu’il eut fini, il m’abandonna.

Dans un des coins du séjour, ma mère se tenait debout et regardait silencieusement mon père en train de m’attacher tel un mouton qu’on tenait à égorger.

À sa réaction, je doutai pour la première fois la maternité de ma mère. Sinon, aussi méchante que serait une mère, devra être capable de parfois sauver son enfant peu importe combien serait rigoureux le père. Mais elle me regardait comme si je n’étais pas son enfant. On dirait qu’avec ses bras croisés, elle s’en fichait même de ma vie.

« Sûrement, tu n’es pas la fille originelle de cette dame de Célestine que tu appelles tout le temps maman. Si tu veux, va te renseigner », me disait une voix défensive. Certainement que la voix aurait raison parce que c’est ce qu’il me paraissait aussi.

En effet, après m’avoir péniblement ligotée, papa m’abandonna là, dans la corde et alla s’asseoir.

Le monde est vraiment méchant. C’est dingue de faire souffrir son prochain alors qu’on sait très bien que la douleur est fade.

Au bout de quelques minutes, je commençai par me tordre de douleurs. Tous les poignets des mains commencèrent à me brûler. Tantôt, ce furent le tour de ceux des pieds.

À la suite de ces douleurs, je finis par découvrir les vraies couleurs de ce monde méchant ; ce monde où ni un père ni une mère ne pouvait conseiller leur enfant avant que ce dernier ne soit contraint aux méandres de la vie.

Tout à coup, la porte claqua. J’eus cru que c’était ma sœur or en réalité, ce n’était pas elle mais plutôt deux de mes oncles. Ils s’étaient tous deux vêtus d’un long boubou. Chacun d’eux avait quelque chose dans la main. Malgré l’affreuse douleur qui m’anéantissait les nerfs, je poussai ma curiosité à voir ce qu’ils avaient dans leurs mains. Grande fut ma surprise de les découvrir chacun avec une longue lanière. Ils ne les avaient pas cachées. Ils les avaient laissées à l’air libre de sorte que je devine ce qui m’attendait.

Dans cette corde, difficilement j’arrivais à respirer. Ma respiration ratait et j’avais envie de demander pardon pour qu’on vienne lâcher un tout petit peu, les cordes. Mais à force de demander cette doléance, je risque de recevoir du crachat sur mon pauvre visage.

Pendant que je rêvassais, un de mes oncles se dirigea vers la table et se saisit d’une bouteille de vin de palme qu’il en absorba une gorgée. Il vint ensuite à ma hauteur et me retourna le liquide bu sur le visage.

« Ah, Seigneur » m’écriai-je !

Ce liquide, en même temps, commença à me brûler les yeux. J’avais envie de me les frotter mais je n’y pouvais pas. J’en étais incapable tout simplement parce que j’étais retenue par des cordes qui me faisaient souffrir. Cet oncle, j’imaginai combien il serait encore plus diabolique que mes parents. Il était aussi sans cœur tout comme eux.

Croyant qu’il avait fini, il pencha la bouteille sur ma tête et y vida presque la moitié du liquide. Cette boisson était celle que nous connaissons tous de son vrai nom "sodabi". Elle était celle de la meilleure qualité, l’authentique.

Je me tordais d’affreuses douleurs d’une part et le vertige m’enracinait d’autre part parce que depuis le matin, je n’avais encore rien mangé.

Malgré ce vertige qui m’obsédait, je reçus un coup de fouet dans le dos. Je soupirai et poussai un grand cri. Je me perdis dans le vague. Des coups commencèrent par retentir sur ma peau telle une vache têtue qui refusait d’avancer vers le pâturage et dont le berger était en train de forcer de son gros bâton.

Je recevais des coups de deux différentes adresses. Mes deux parents étaient assis pendant que mes deux oncles me traitaient telle une fille démunie.

La vie est sans importance lorsqu’on n’a personne pour nous donner le sourire. Elle est nulle d’être vécue quand on n’a personne pour nous aimer autant qu’on le désirerait.

Je fus sérieusement frappée et tabassée à mort. Mes oncles me roulaient de tous les sens telle une femme qui aurait commis de l’adultère dans certaines ethnies.

Où pourrais-je trouver la mort à cet instant-là où la vie me dégoûtait ? Si je pouvais non seulement demander à mon créateur Dieu de faire cesser le battement de mon cœur, je le ferais sans doute car la souffrance que j’endurais était trop énorme.

Étais-je le premier être humain à commettre ce type d’erreur depuis que ma famille soit fondée ? Si non, était-ce de cette même manière que cette première personne aurait pu être traitée ? Et si oui, alors pourquoi me maltraite-t-on de la sorte ?

Eux qui me torturaient de la sorte, sont-ils purs sans péché ? Sont-ils parfaits ? Était-ce uniquement parce que j’étais tombée enceinte qu’ils me frappaient avec tant de violence ? Ou me guettaient-ils depuis longtemps ?

Ce fameux mercredi, jamais il ne s’effacera de ma mémoire. Je le garderai à vie. Je le noterai dans mon agenda d’ailleurs.

Je fus rigoureusement battue pendant trente-cinq minutes environ. Mes oncles m’avaient bien labouré le corps. Mon corps était bien cicatrisé de cravache. Les chicotes qu’avaient apportées mes oncles étaient faites de peau de bœuf.

Après m’avoir bien corrigée, un de mes oncles eut encore le cœur méchant de me verser par la suite un autre liquide brûlant sur le corps. Non seulement sur le corps mais aussi dans les yeux.

Quelle merde ! Ce liquide était encore plus brûlant que le premier qu’on m’en avait versé sur le corps.

Était-ce du piment écrasé mélangé à l’eau ? Je ne saurais le dire. Était-ce de l’acide ? Je ne le savais non plus.

Ce liquide qui coulait dans mes blessures me brûlait au point où je commençais par pousser des cris de détresse. Je criais telle une chienne enragée. Personne ne calculait mes cris.

Au bout de quelques instants, tous mes bourreaux m’abandonnèrent pour aller s’attabler. Toujours avec les cordes nouées aux pieds et aux poignets des mains, je regardais mes parents qui discutaient entre eux. Ils se parlaient et riaient aux éclats. Je ne savais pas ce qui les rendait si jouasse.

Les mères ont souvent pitié de leurs enfants dit-on. C’était ce jour que je compris que parmi les mauvaises mamans du monde, la mienne était la plus méchante, la plus dure, la plus venimeuse et la plus mauvaise de toutes les mauvaises.

Si elle était ma marâtre, je me dirais que c’était parce que je n’étais pas la sienne qu’elle me faisait subir tant de souffrances. Je me dirais aussi que c’était parce qu’elle ne voulait pas me voir réussir qu’elle me voulait la mort. Je me dirais également que c’est parce qu’elle ne voulait pas me voir parmi ses enfants qu’elle me préférait la mort. Mais à ma grande désolation, je finis par comprendre qu’une propre mère était aussi capable d’agir telle une bête féroce envers son propre fils ou sa propre fille.

Ma mère était le genre des mères qui meurt et les enfants, au lieu de pleurer, se réjouissent et se disent entre eux : Dieu merci elle est partie pour toujours.

Il sonnait quatorze heures. Mes yeux n’étaient pas bien captifs pour voir la véritable heure à la pendule murale.

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