Chapitre 4

Les Diamants de la famille Nguessi

Chapitre 4 : ALLER SANS RETOUR

**Palome Nguessi**

Devant la fenêtre de son appartement Londonien, Palome est pensive ; elle sait qu’elle a pris la bonne décision. Qu’est-ce qu’elle ne ferait pas pour être toujours parmi les premières personnes à briller dans la famille ? Encore qu’elle vient d’hériter de son grand-père.

Elle pousse un léger soupir, avant de se retourner et de terminer de ranger toutes ses affaires. La veille, ses amis ont réservé un cocktail d’au revoir. C’était émouvant…

-Tu vas trop me manquer ma belle ! Lui dit sa meilleure amie et complice de toujours, Cathy.

-Toi aussi ! Heureusement qu’il y a le téléphone et tout ça !

-Je ne te le fais pas dire ! Mais je viendrai passer les prochaines vacances chez toi là-bas.

-Super ! J’ai hâte Cathy ! On va organiser ça !

Elle a déjà tout réglé ; la fin de son bail, la démission de son poste de gestionnaire des particuliers qu’elle occupait dans une structure bancaire à Londres… son téléphone qui sonne la tire rapidement de ses pensées… c’est Walter son frère…

-Allo ? Sœurette ! Tu es prête pour le grand retour au bled ?

-Oui ! Plus que prête !

-Tu n’as pas de regrets ?

-Non, à part mes amis. Tu étais là au cocktail d’au revoir non ? J’ai pleuré jusqu’à ! Mais je dois penser à mon avenir. Tu sais que je commençais déjà à me poser des tas de questions sur mon devenir ! La vie ici commençait déjà à me fatiguer dis donc ! Je ne suis pas comme toi qui ne veut pas lâcher. Tu vas faire comment?

-Non ! Nuance ! Je veux lâcher, mais ça ne veut pas me lâcher !

-Ahahaha ! Parle pour toi Walter ! On se connait ! Heureusement que Papi a

assuré notre place au bercail, et moi ça m’arrange beaucoup.

-Je ne te le fais pas dire ! Mais j’ai aussi décidé de tout plaquer ici. On quitte

quand ?

-Vendredi soir. J’ai réservé mon billet depuis des semaines.

-Ah oui ! Tu m’as dit ça. Je vais donc voir si je peux avoir un billet, même si c’est

juste.

-Essaie voir ! Comme ça on voyage ensemble.

-Oui ! Je te confirme ça demain. Sinon ce sont les choses de la semaine prochaine.

-Ok ! Fais vite ! On fait comme ça !

En raccrochant une vague d’espoir l’envahit soudain ; elle est heureuse de passer à autre chose ; elle veut changer et donner un nouveau sens à sa vie…

*****

Elle se souvient encore de son arrivée ici à Londres il y a quelques années ; elle s’était jurée de réussir en tout et d’avoir une vie meilleure. Elle peut dire qu’elle a atteint ses objectifs en quelque sorte, à un détail près... Elle venait juste d’avoir 20 ans quand c’est arrivé, et personne n’a jamais su, à part sa mère et son frère qui ont gardé le secret jusqu’alors… elle avait conçu…

-Qui est le père ? Tonnait sa mère, Bertine, qui avait fait le déplacement dans le seul et unique but de trouver une solution à ce problème de grande envergure.

En larmes, Palome s’est mise à essayer de trouver les bons mots…

-C’est… c’est Roméo ! Je… je… c’est arrivé comme ça ! Je ne sais pas…

-Tu imagines ? Si ton père l’apprenait ? Ooooh ! Nathan va me tuer ! Tu es à

combien de mois ?

-5 mois !

-5 mois ! Est-ce que tu sais que tout ça compromet ton avenir ? Et pire l’héritage de ton grand-père ? Tu n’auras rien !

-Je t’en prie maman ! Je ne veux pas que ça se sache ! Je ferai tout ce que tu veux, tout ! Mais… aide-moi ! J’ai fait appel à toi pour ça !

-Personne ! Je dis bien, personne ne doit savoir ça ! Tu pensais à quoi ? Tu ne sais pas quelles répercussions ça aura sur toi, et même sur l’ensemble de la famille ?

-Je sais !

-Tu sais ? Et pourtant tu es allée écarter les pieds pour qu’il te refile une grossesse ! Qu’est-ce que je vais dire à ton père ? Seigneur !

-Ne lui dis rien stp !

Palome avait croisé les mains en prières et imploré la clémence de sa mère.

Heureusement que Bertine est une femme compréhensive…

-Tu as la chance que tu es mon enfant ! Mais 5 mois de grossesse… c’est…

-Je ne sais pas quoi faire ! Snif ! Snif !

-Ne pleure pas ! On va trouver une solution !

Bertine avait l’air bien déçu de sa fille, mais elle ne pouvait pas l’abandonner

toute seule à son sort…

-Ce loubard est-il au courant ?

-Mais pourquoi tu le dénigres maman ! Il a un nom !

-Je… je n’ose pas prononcer son nom ! C’est une honte ! Tu nous as fait ça dur ! Je te le répète, tu connais l’histoire avec cette famille. Ils ont failli tuer ton grand-père !

-C’était leurs problèmes entre eux ! Mais Roméo n’est pas comme ça ! C’est… c’est quelqu’un de simple !

-Oui… mais il a leur sang ! Les Badjemé ! Quel sacrilège ! Il sait que tu attends

un enfant de lui ?

-Bien sûr qu’il sait !

-Donc ce n’est que sur lui que tu as jeté ton dévolu ! Il n’y a pas d’hommes ici à

Londres ?

-C’est arrivé c’est tout !

-Mais il ne vit pas ici ! Comment vous avez…

-Il vit au pays, à Yaoundé ! On s’est vus là-bas… quand… quand j’étais en congés. Bertine n’a eu que ses yeux pour pleurer. Elle était si abattue qu’elle a fini par se mettre la tête entre les mains…

-Ohhh ! C’est pas possible ! Il… il faut que je réfléchisse !

-Tu… tu veux que je me fasse avorter ?

Bertine l’a regardée et l’a toisée en bonne et due forme…

-A 5 mois ? Tu veux que j’ai ça que la conscience tout le restant de ma vie ? Non ! Tu ne te feras pas avorter.

-D’accord ! Je vais le garder… mais comment est-ce qu’on fera pour que papa et

tout le reste n’en sache rien ?

Bertine lève les yeux dans le vide et lui répond sur un ton neutre et impassible…

-Tu ne le fera pas, mais tu ne le garderas pas !

Palome a froncé les sourcils…

-Je ne comprends pas !

-On le fera adopter à sa naissance.

Mais comme un malheur n’arrivant jamais seul, on peut dire que le sort a opéré; un mois avant le terme, elle accouchait d’un mort-né…

***

Le visage vautré contre le hublot de l’avion, Palome semble avoir le regard perdu; mais en fait elle se sent rassurée de rentrer au bercail ; elle sait ce qui l’attends et les challenges dont elle devra faire face… mais au fond d’elle, elle sait qu’elle n’a jamais oublié… cet enfant… et son amour pour Roméo Badjemé.

-Quelle perte ! Mais bon, c’est la vie !

-Excusez-moi ! Est-ce que tout va bien ?

Elle sursaute ; elle n’avait pas prêté attention à cet inconnu qui a pris place à ses côtés et avec qui elle va devoir faire tout le voyage…

-Euh… pardon ? Demande-t-elle. Vous dites ?

-Non ! En fait j’ai cru que vous vous adressiez à moi, mais j’ai fini par me rendre

compte que vous parliez toute seule. Alors je demandais si tout va bien !

-Oh ! Oui ! Oui ! Tout… tout va bien !

-D’accord ! Au fait, moi je m’appelle Achille !

-Moi c’est Palome !

-Palome ? Original comme prénom, j’aime !

-Merci !

-En vacances ?

-Comment ?

-Je demande si tu vas en vacances ? On se tutoie ?

-Non ! Je rentre définitivement au pays.

-Ah c’est cool ! Il faut du cran pour le faire.

-Ouais ! J’ai tout plaqué à Londres, pour le bled !

-Surtout si c’est mûrement réfléchi !

-La question ne se pose même pas ! J’ai jamais voulu m’éterniser ailleurs. Je rentre chez moi, un point c’est tout !

-Bien dit ! Je t’en félicite, et je t’admire beaucoup !

-Et toi ?

-Moi ? On va dire que je vais en vacances pour voir ma famille. Je vis depuis

toujours à Londres. J’aimerai bien faire comme toi mais…

-Mais… quoi ?

-On verra !

Ils n’ont fait que ça durant tout le voyage, papoter, discuter sur tous les sujets,

et ce, jusqu’à l’arrivée…

-Ca y est ! Nous y sommes ! S’exclame-t-il. Alors ça te dit qu’on se revoit ?

-Pourquoi ?

-Beh ! Parce que j’ai aimé bavardé avec toi ! Tu m’as l’air d’être une fille qui a la tête sur ses épaules, et qui sait ce qu’elle veut. La preuve… Aucun de nous deux n’a fermé l’œil durant tout le voyage. Et je ne te parle pas de la traversée de la Méditerranée et tout le désert nord-africain… très souvent je pionce comme un malade pendant cette étape, mais là, tu m’as épaté !

Palome n’a fait que glousser ; au fond ce type a l’air bien sympa au final… peut- être qu’elle pourrait bien lui laisser une ouverture…

-Ok ça me va ! Voici mon email ! Je n’ai pas encore de puce du pays, peut-être plus tard, on verra bien !

-Ça marche, voici le mien.

Ce n’est qu’arrivés au hall des bagages qu’ils ont fini par se séparer ; Nathan et Bertine, les parents de Palome sont venus l’accueillir en bonne et due forme…

-Papaaaa ! Mamaaan ! Vous êtes là ?

-Mais oui ma chérie ! S’exclame Bertine. Mais… ton frère est où ? Vous étiez

censés venir ensemble !

-Ah ! Walter ! Il m’a appelé la veille du voyage pour me dire qu’il n’a pas pu obtenir un billet. Donc, il remet ça à très bientôt.

-Vraiment ! Lui hein ! Et il ne nous dit rien ! S’offusque Bertine.

-Tu le connais ! Il sait glisser comme le gombo !

Ils ont tous éclaté de rire avant de s’en aller… une fois devant le véhicule dans lequel les attendait le chauffeur, Palome est sur le point de monter à bord quand elle aperçoit Achille dans un gros 4x4 SUV, mais ce n’est pas ça qui l’intrigue ; c’est la femme assise avec lui à l’arrière à qui il plaque une bonne centrale* (baiser sur la bouche) …