chapitre 7
Abosso ne réagissait pas. Il comptait sur moi. Le décompte était arrivé à 4. J'attendais encore le bon moment. Son casque était facilement démontable. Il fallait juste être sur la bonne position et être très rapide. Lorsqu'il arriva à 2, le temps pour lui de pointer l'arme sur ma tête, je me retournai face à lui, soulevai mes deux mains et enlevai le casque.
Il commença à hurler de toute ses forces en se cachant le visage. Je laissai tomber le casque. Abosso m'attrapa par le bras et on courut vers la sortie. On sauta sur la moto d'Adehus et une fois de plus, on était en cavale. Il roulait sans parler. Dans le rétroviseur, je pouvais voir qu'il était triste. J'essayais tant bien que mal de comprendre le sens de sa conversion avec Adehus. Je n'y parvenais pas. Si je savais !
Il savait très bien où aller. Après trois heures de route, nous étions arrivés dans une autre ville. Il avait garé au milieu d’une grande cour. Il y'a avait des maisons tel une cité d'étudiants.
Abosso : attends-moi ici, je vais chercher mes clés.
Il revient au bout de 5 minutes. On se dirigea vers l'une des portes. On entra. C'était un petit appartement très luxueux et poussiéreux. C'était sa maison.
Abosso : mets-toi à l'aise. Je vais garder la moto. J'en ai pour au moins une heure de temps. Il faut que je m'en débarrasse le plus loin possible.
Il s'en alla, sans sourire. Je me sentais mal de le voir ainsi. Dès son départ, je commençai le nettoyage. Je rendis la maison propre. Le frigo était rempli de vivre. C'était le paradis pour moi. Je commençai par les pots de yaourt avant de boire la carafe de lait. Il y avait suffisamment d'ingrédients pour faire à manger. Je ne me gênai pas.
Il mit plus de temps que prévu. À son retour, j'avais dressé la table. J'avais pris une douche et porté un de ses t-shirt. C'était comme une robe sur moi. Il mangea sans vraiment discuter. Il apprécia mon plat et rejoignit la chambre. Je ne reconnaissais pas cette version d'Abosso. Après avoir débarrassé, je le rejoignis dans la chambre. Je me couchai tout près de lui.
Ava : je suis perdue, tu sais. En deux que tu entré dans ma vie, tout a basculé. Je veux bien te comprendre mais tu dois m'aider. Il faut que tu m'expliques.
Abosso : Ava... Viens plus près, pose ta tête sur ma poitrine.
Il m'ouvrit ses bras. La tête posée sur sa poitrine, je pouvais entendre son cœur battre fortement.
Abosso : si tu connais le langage du cœur, alors tu dois savoir qu'il ne bat que pour toi.
Ava : tu me connais à peine, comment peux-tu m'aimer à ce point ?
Abosso : je l'ignore. Tout ce que je sais, c'est que je suis éperdument amoureux de toi. J'ai enfreint certaines règles. Ma mission ne me permet pas d'aimer. C'est pour cette raison qu'on me cherche ainsi. Je dois rester caché ici.
Ava : et moi dans tout ça, je vais aussi rester enfermé ? Je veux bien te comprendre mais en même temps je dois continuer ma vie. On va passer le temps à fuir ?
Abosso : je ne te retiens pas. Tu peux partir si tu veux. Je peux te conduire quelque part où tu pourras continuer ta vie et ton quotidien. Mais sache-le, ma toute belle, ça n'a jamais été une vie d'être désiré par tout le monde mais de n'être aimé par personne. Tu le sais sûrement mieux que moi. Tu sais que ta vie, n'est pas une vie.
Couchée sur sa poitrine, de grosses gouttes de larmes se mirent à couler. Il me caressa les joues avec ses larges paumes de mains. Il posa une bise sur mes cheveux.
Abosso : ton bonheur est entre tes mains. Il te suffit de me laisser te rendre heureuse. Laisse-moi te faire voir les choses sous un autre angle. Laisse-moi t'apprendre à faire autre chose pour survivre. Laisse-moi t'aimer.
Ava : tu sais ce que je suis... Mais je ne sais pas ce que tu es.
Abosso : tu peux devenir une nouvelle personne. Pour mon cas, ne te dérange pas. Retient juste que jamais je ne te ferai de mal.
On frappa à la porte.
Abosso : c'est le livreur, j'ai commandé à manger. Je ne savais pas que tu as fait la cuisine.
J'allai regarder. Lorsque j'ouvris la porte, c'était effectivement le livre. Il me tendit le paquet en me dévisageant de la tête aux pieds.
- mama tu es belle, tu es un miel. Tu es la petite sœur du boss ? Je peux avoir ton numéro vite fait ? Comme ça on va causer de temps à autre.
Abosso : bébé recule toi un peu de la porte.
Je me reculai. Une vague d'eau fut propulsée vers le livreur. Il se mit à hurler.
-mais c'est quoi ça ? On verse l'eau sur moi ? J'ai fait quoi ?
Abosso : quoikoukou... Tu livres, ou tu dragues ? Les gens sont comme ça hein. Je viens avec mon bon dossier, tu veux déjà prendre. Mince mince comme tu es, on dirait le curé dent. Tu crois qu'elle aime sucer les os ? Bébé tu aimes la chaire n'est-ce pas ?
-et vous versez l'eau sur...
Abosso : BÉBÉ QU’IL PARTE... QU'IL PARRRRRTE... N'EST-CE PAS ?
Le livreur était parti, en colère. J'étais morte de rire. Abosso se tordait aussi de rire. C'était le début d'une nouvelle vie pour moi. D'une vie meilleure. Nous étions retournés dans la chambre. Pendant qu'on était couché, je ne faisais que penser au repas du livreur. En même temps, j'avais honte de montrer mon côté glouton à Abosso.
Au bout d'une trentaine de minutes, il s'était endormi. Il était très fatigué. J'en profitai pour aller me servir. Sans vraiment m'en rendre compte, j'avais fini toute la nourriture. Au même moment j'entendis Abosso tousser. Il semblait être en train de se réveiller.
Ava : mince... Je vais expliquer que la nourriture est passée où ?
Lorsque j'entends ses pas sur le sol, je courus m'allonger sur le canapé au salon. Je faisais mine de dormir profondément. Il me rejoignit et s'assit sur le canapé d'en face avant de décrocher son téléphone qui sonnait entre ses mains. Je n'entendais pas ce que disait l'interlocuteur mais j'entendais très bien ce que lui, disait.
Abosso : il faut vite faire, je suis très fatigué. J'en ai vraiment besoin. Je ne veux pas qu'elle constate ma fatigue. En aucun cas elle ne doit être au courant de mon état.
Sur le coup, je commençai à avoir peur. Je me levai pour le confronter. Je le pensais malade. Si seulement je savais !
Ava : qu'est-ce que tu as ? Es-tu malade ? Tu as quoi ? Et pourquoi est-ce que tu ne veux pas partager cela avec moi ? Pourtant tu dis vouloir qu'on soit un couple.
Il raccrocha brusquement et se leva de la chaise. Il me donna le dos, regardant au loin à travers la fenêtre. Je marquai de lents pas jusqu'à lui avant de nouer mes mains autour de ses hanches. J'avoue, c'était impossible de faire le tour. Il était vraiment corpulent.
Ava : la seule condition pour que ça fonctionne, c'est qu'on soit honnête l'un envers l'autre. Je suis prête à te raconter mon histoire et j'aimerais que tu me fasses également confiance. Je suis avec toi sans même savoir ce que tu es. Je sais très bien que tu es loin d'être un être humain normal. Je ne sais pas si tu es un spécimen des laboratoires ou quoi... J'ai besoin de réponses. À contrario, je ne pourrai pas rester avec toi. Je ne veux pas faire ma vie auprès d'une personne que je ne connais pas.
Abosso : si je te disais qui je suis, ce que je fais et d'où je viens, m'aimerais-tu ?
Ava : qui suis-je pour te juger ? Je ne suis qu'un être humain, fait de chair et d'os. Je ne puis te juger vu que moi-même je ne suis pas un exemple. Je t'écoute et ensuite je te raconte mon histoire.
Abosso : on mange d'abord la nourrice que le livreur a amenée. Ça avait l'air très délicieux.
Il parlait en se dirigeant vers la cuisine. Je le poussai sur le canapé.
Ava : non, on raconte d'abord les histoires et on mange ensuite. Commence par m'expliquer ton coup de fil.
Abosso : c'était... Eurre... C'était mon docteur. Voilà, c'était mon docteur. En fait, je souffre d'une maladie incurable. Je suis sous traitement depuis le bas âge. Je dois prendre régulièrement certains médicaments pour garder la forme. C'est pour cela que je l'ai contacté.
Il m'avait raconté un tas d'histoire. À cette époque, j'avais cru en lui. J'avais pleuré avec lui.
Ava : Oh mon Dieu ! Ça doit être horrible. Je suis vraiment désolée pour toi. Je ne savais pas...
Abosso : pour le spécimen de laboratoire, tu as raison. En cherchant un traitement pour moi, les scientifiques ont fini par me transformer un peu. C'est pour cela que j'ai des compétences un peu hors du commun. En fait ce n'est que ça mon histoire. Aujourd'hui ils me recherchent pour me ramener au laboratoire et continuer les expériences. Sauf que moi, je veux vivre une vie normale. Avoir une femme et des enfants. C'est ce que je veux.
Ava : et ta famille alors ?
Abosso : je n'ai pas de famille. J'ai grandi dans un camp où il y avait d'autres enfants comme moi. Nous étions juste des sujets d'expérience. Personne d'entre nous ne connaissait sa famille.
Ava : c'est où ce camp ?
Abosso : c'est au-delà de la terre
Ava : quoi ?
Abosso : je veux dire... C'est loin de ce pays. J'ai fait un long voyage pour arriver ici. Bon, mon histoire est terminée. J'attends la tienne.
Ava : j'avoue ton histoire est un peu bizarre mais bon... Pour ma part, j'ai grandi auprès d'une mère un peu frivole et d'un père soulard.
Je lui avais compté mon enfance telle que je l'ai introduite dans cette histoire. Je lui avais parlé franchement et à cœur ouvert. J'avais débattu sur mon métier, sur ce quotidien dégoûtant que je vivais. Dans sa part d'histoire il y avait une part de vérité non dite ou camouflée. À cet instant, je ne pouvais pas comprendre.
Nous avions discuté jusqu'à la tombée de la nuit. Je faisais tout pour l'empêcher de penser à la nourriture. Nous regardions un film de science-fiction. Une scène ressembla fortement à ce que j'avais vu dans mon enfance.
Ava : quand j'étais petite, j'avais vu un extraterrestre. Enfin... Je pense que s'en était un. Il était sur la cour de notre maison. Il était descendu du ciel.
Abosso se leva brusquement.
Abosso : il était comment ?
Ava : heyyy... Tu me crois ? Peut-être que j'avais rêvé hein. Mon père m'avait fouettée ce jour et m'avait demandé d'aller pleurer dehors. Pendant que je pleurais j'ai vu une lumière blanche descendre du ciel. Quand la lumière s'est éteinte, j'ai vu la chose. C'était tout, sauf un être humain. Quand j'ai bien essuyé les larmes dans mes yeux pour mieux regarder, la chose n'était plus là.
Abosso : est-ce que tu as déjà accouché ?
Ava : non, jamais. J'ai eu à faire des avortements... Je n'ai jamais mis au monde.
