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CHAPITRE 04

Sa phrase resta en suspens, lorsque Manuella, prise au dépourvu, se mit à toucher son ventre bedonnant, tout en criant des douleurs abdominales, les contractions utérines annonçaient la venue de l'enfant, à leur grand bonheur.

Il faisait tellement noir, une obscurité effarouchante, quand la vieille dame, regardant Manuella en trian de se tordre de douleurs au sol, tapant sa paume de main par terre tout en remuant ses jambes et beuglant de peines, ses maux devenaient de plus en plus intenses.

Étonnée et ne sachant plus comment se prendre, la vieille femme écarquillait ses yeux, à la recherche d'une solution, il n'y avait ni voisin, ni engin de transport pour les conduire à l'hôpital.

- Mon Dieu, que vais-je faire ? J'aurai aimé que cette situation arrive mais pas à des pareilles circonstances quand-même, qu'est-ce que je ferai face à cette situation, la pauvre vielle femme que je suis? Maugréa-t-elle, espérant y laisser ses remords.

Atrabilaire face à cette situation, la pauvre femme était face à un vrai problème cornélien, elle courut tout prêt de la rue, en y espérant trouver de l'aide, mais aucune personne ne venait vers elles, et chaque secondes qui passaient rapprochaient Manuella à une mortalité maternelle quant aux minutes qui suivaient, s'annonçaient fatales à sa précieuse vie, les cris qu'elle faisait, mettaient encore la vieille dame dans un état d'alerte.

Ne pouvant plus supporter de voir, sa petite protégée souffrir longtemps, elle se décida de prendre la situation à main, elle alla couper deux grandes feuilles de la banane plantain, les mit au sol et elle l'y fit allonger tout en lui faisant des remontrances.

- Tu dois tenir le coup et rester très forte ! Je vois la tête du bébé, tu respires tranquillement et tu reviens à la charge avec pétulance, et surtout, dis toi que tu vas y arriver.

Une première, une deuxième et une troisième fois, c'était ainsi autant de fois que nécessaire, Manuella était au bout de l'effort, elle se sentait totalement épuisée et abattue, lorsque la vieille femme vint la tenir entre ses paumes de mains, tout en lui disant ce qui suit :

- Tu n'as plus de sac amniotique et l'enfant ne pourra pas résister longtemps dans ton utérus, alors fais-toi violence pour que cet enfant naisse, sinon, notre lutte ne deviendrait plus que vile, anodine et sans raison.

- Je n'en peux plus, je me sens au bout de l'effort et j'ai très mal, j'ai essayé de faire de mon mieux, le nécessaire, disait-elle avec un ton essoufflé.

- Tu as fait le nécessaire mais pas tout ce qu'il faut, l'excellence est dans le franchissement des limites, il faut que tu te fasses violence, tu pousses très fort l'enfant et je vais essayer de l'ajuster pour qu'il sorte de tes entrailles, lui répondit la vielle dame.

Jouant le tout pour le tout, au bout de l'effort absolu, elle poussa au delà de ses forces, dans un dernier élan d'espoir et victorieux, les premiers pleures de son enfant, étaient l'antalgique parfaite aux douleurs qu'elle avait ressenties pendant toute la durée de l'accouchement.

- C'est une jolie petite fille, oui Manuella, tu es mère d'une vraie petite princesse ! Et comment penses-tu l'appeler ? Voulut savoir celle qui lui était devenue, une sage-femme occasionnellement.

- J'ai beaucoup de nom en tête là mais je me sens plus émue de l'appeler, Aliya, son destin sera différent de celui des autres.

La vieille femme fit baigner l'enfant, et fit bouillir à la mère de l'eau chaude, la lui fit prendre bain, pour clôturer, elle alla enterrer les feuilles de banane plantain ainsi que le cordon ombilical qu'elle avait mutilé au nouveau né.

Toute patraque, elle finit par s'en dormir lorsqu'il commença abondamment à pleuvoir de toute la nuit, souvent elle se réveillait la nuit, telles que toutes les femmes font, elle allaita son enfant autant de fois que celà était nécessaire et elle finissait par se rendormir.

Pendant les six premiers mois suivant son accouchement, elle passait la totalité de ses journées aliter, madame Nadège était le nom de cette bonne femme, qui s'était mise sur sa route, elle s'occupait d'elle comme l'enfant qu'elle n'a jamais eue.

Elle allait vendre au marché leurs habits de seconde catégorie, ensuite achetait la nourriture pour leur faire, les mets vespéraux, elle se tuait souvent à la tâche et elle le faisait à cœur joie, le comble, elle passait ses nuits souvent, à choyer la petite Aliya, se transformant pour celle-ci, la grand-mère qu'elle n'aurait peut-être jamais.

Après une longue nuit, les tous premiers rayons solaires dardaient les coins les plus reculés de la maison, couvrant la maison d'une odeur revitalisante, celle de la vie qui reprenait son cour comme chaque matin. Manuelle commençait à retrouver ses premières forces et d'elle même, elle se sentait déjà capable de faire quelques tâches.

Ce matin, tout comme toute la journée, elles furent des corvées ensemble, telles des jeunes petites filles issues d'une même famille, qui s'occupaient des ménages à l'absence de leur mère.

Leur accointance était unique et leur amitié plus belle, dans un sentiment de paix et des fous rires, Aliya apprenait déjà à se servir par elle-même mais aussi, elle se battait à prononcer ses premiers mots à peine inaudibles.

Assises en califourchon l'une à l'égard de l'autre, elles étaient en train de consommer leur sauce aux ignames épicées, accompagnée de la viande fraîche de poisson. Elles purent manger à leur faim, lorsque Manuella commença à faire téter à son enfant, la petite fille ne put rester longtemps éveiller, elle finit par s'en dormir entre les bras érubescents de sa mère, qui ne s'attarda pas à aller la laisser dormir sur le lit et revint jacasser avec madame Nadège.

- Tu sais maman, je n'ai jamais compris pourquoi, tu n'as jamais été visitée. Je veux dire, personne n'est jamais venue te voir depuis des mois et je suis convaincue que c'est ainsi pendant des années, ceci se voit clairement dans tes yeux, autant dire que, tu souffres en silence d'une lourde perte que tu as connue. Tu sais au fond de toi les circonstances dans lesquelles, je suis passée pour que j'arrive ainsi, peux-tu partager avec moi, ton histoire ? Avec un peu de chance, je me retrouverais dans la tienne.

La question paraissait très dure à répondre pour madame Nadège, qui regardait Manuella, un sourire sournois se dégageait de ses lèvres, elle ahana et dira:

- Tu vois, quand je t'ai vu arriver dans cette maison, je ne savais pas ce que tu as enduré mais juste en voyant ton ventre grossir avec le temps, j'ai déduit que tu as vécu la même histoire que moi, je ne pouvais donc te laisser seule affronter ce désert, clamait-elle dans son préambule: Je suis convaincue que seuls ceux qui ont vraiment souffert dans la vie, qui peuvent comprendre les peines des autres, renchérit-elle.

- Comment ça, la même chose que moi ? Tu as aussi connu un déni de grossesse comme moi? Voulut savoir Manuella, toute ébahie!

- C'est à peu près ça ! Plus jeune, je suis tombée enceinte d'un homme que j'avais énormément aimé, j'étais prêt pour cet homme, qui embellissait mes nuits et me donnait la joie dans le cœur. C'était juste de l'illusion, parce qu'il était déjà un homme marié et quand il apprit mon état de gestation, elle ne voulut plus de moi mais, il prenait tout en charge concernant ma grossesse. J'avais tout en fait de lui mais pas ce dont je voulais plus avoir de lui, son amour. Je passais mes nuits seule, et souvent quand il me manquait, je ne savais à quels cieux me vouer pour assouvir mon envie de lui. J'aurais souhaité qu'il me prenne entre ses bras, que je sente ne serait-ce que sa chaleur pendant une fraction de seconde mais celle qui avait besoin de tout ça, était sa femme légitime, pas moi et celle-ci était aussi enceinte. Quand vint l'accouchement de nous deux, je mis au monde des faux jumeaux, Angelot et Sylvie, le premier m'a été ravi par son père et je ne l'ai plus jamais revu jusqu'à ce jour, j'aurai aimé savoir, l'homme qu'il est devenu aujourd'hui, après plus de vingt-cinq ans sans tâter, les paumes innocentes de ses petits bouts de doigts.

Mes petites se sont encore accrues quand la seconde, grandissant, était tombée enceinte d'un lâche, mais le pire est arrivé pendant l'accouchement, j'ai perdu d'abord ma fille, ensuite ma petite fille au bout de cinq ans, tous les habits de bébé et des petites filles que je t'ai donnés pour que, tu fasses porter Aliya, étaient en fait les siens. Ces vécus de ma vie, sont à la base de ma résignation et expliquant plus, pourquoi, je suis devenue aussi ermitane.

Manuella n'en revenait pas, elle qui était convaincue d'endurer toutes les peines du monde, venait d'entendre là, une histoire plus exécrable que la sienne.

Elle regarda la vieille femme au bout de ses efforts à retenir les larmes, finit par s'éclater en sanglots, compatissant à ses peines, elle dira lorsqu'elle l'a prise entre se bras, tout en lui faisant une tape sur ses épaules :

- Je vois maintenant pourquoi, tu sais faire preuve d'abnégation face aux peines des autres, parce que tu as toi-même vécu le pire.

Passant des rires aux larmes, les deux dames restèrent embrassées pendant quelques minutes, leurs cœurs en synchronie, connaissaient ce qu'était vraiment la souffrance née d'un amour grand éprouvé autrefois.

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