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Mercredi 25 janvier
J'ai beau hurler tout en sanglotant pitoyablement, Ethan ne fait que resserrer ses bras autour de mes épaules. Il abaisse immédiatement sa tête, loge sa bouche au creux de mon oreille et sa voix tremblante résonne jusque dans mon âme lorsqu'il me supplie à voix basse.
-Pardon, pardon, pardon, pardon, pardon, pardon...
Ses excuses me dégoûtent et me révoltent. Il ne peut pas continuer à souffler le chaud et le froid quand bon lui semble, je ne le supporterai pas. Tout en pleurant, je pose mes paumes contre son torse pour le repousser de toutes mes forces. En réponse, Ethan resserre encore plus fort son étreinte et pose son front contre le mien. Les yeux fermés, il me murmure :
-Candice, pardonne-moi... je vais te parler, je te le promets mais pardonne-moi, s'il te plait. J'ai... j'ai paniqué et j'ai agi comme un con.
Ses mots me figent sur place. Ai-je réellement envie d'entendre ce qu'il a à me dire ? Je n'en suis plus sûre. Après m'avoir traitée de la pire des façons pour la deuxième fois, je ne sais plus si je serai capable d'accepter ses paroles. Sentant mon appréhension, Ethan commence à caresser doucement mon bras tout en me tenant toujours fermement d'une seule main. Son autre main se pose sur ma joue et son pouce se met à effleurer mes lèvres pour m'amadouer.
-Je sais que je me suis comporté comme le pire des connards depuis le début avec toi mais... putain Candice, tu ne peux pas partir ! Tu ne peux pas me laisser ! Donne-moi une dernière chance de tout t'expliquer, s'il te plait... Candice...
Mon cœur dépose les armes à l'instant où ses gestes tendres se mêlent à ses mots sucrés. J'ai besoin de savoir ce qu'il a à me dire. Je ne pourrais jamais tourner la page si je n'entends pas sa version. C'est ainsi que tremblante d'appréhension, je ferme les yeux et j'ignore les sursauts incontrôlés de mon estomac noué lorsque je lui réponds :
-Vas-y.
Ethan soupire longuement, très longuement. Comprenant que je ne vais plus m'enfuir, il relâche sa prise mais me garde toujours prisonnière de ses bras. Avec douceur, sa main droite passe derrière le haut de ma tête pour la plaquer contre son torse. Mes bras ballotent dans le vide et je ne sais pas si j'ai envie de l'enlacer à mon tour. Je reste donc dans cette position ridicule et hume son parfum si viril. Mon nez logé dans son cou commence déjà à affaiblir mes résolutions mais je ne flanche pas. J'attends ses explications. Au moment où il reprend la parole, je crois que j'oublie comment respirer.
-J'ai eu une enfance de merde, je t'en ai déjà un peu parlé. Mon père et moi, on vivait dans la misère, dans la crasse et dans la honte. Dès que je le pouvais, je m'échappais quelques heures pour oublier tout ce merdier. Mon père bossait avec Murphy et son petit salaire aurait pu nous offrir une vie à peu près décente si... s'il ne dilapidait pas tout. En grandissant, j'ai compris que c'est une maladie, qu'il ne peut pas s'en empêcher et qu'il ne maitrise pas cette addiction mais putain, malgré ça, tu n'imagines pas à quel point je lui veux. Parce que tous les jours, je crevais de faim et de honte devant mes copains.
Ces quelques mots me consument déjà. C'est plus fort que moi, je passe mes bras dans son dos.
-L'école... c'était le seul endroit où j'avais un peu de répit. Je travaillais bien et j'avais de bons résultats. Je voulais me sortir de cette galère, je voulais trouver un bon boulot et nous offrir une belle vie mais pour cela, je devais aller à l'université. Et le jour des inscriptions, mon putain de père m'a annoncé qu'il avait perdu tout l'argent qu'il nous restait au casino. On n'avait plus rien. Adieu l'université, adieu l'espoir, retour à la réalité.
Mes mains s'accrochent à son pull quand j'entends sa voix trembler sous le coup de l'émotion.
-On avait beaucoup de dettes, la maison était sous hypothèque et les lettres des huissiers s'accumulaient dangereusement. J'ai été obligé d'arrêter l'école et de gagner un peu d'argent pour nous faire vivre tous les deux. J'ai bossé quelques mois à l'usine et un soir... dans un bar... j'ai rencontré une fille. Elle... elle... putain Candice, tout ce que je suis en train de te dire, je ne l'ai jamais raconté à personne, tu comprends ? Je... je le fais pour toi...
