chapitre 5

Chapitre 5

Les rires sonnent faux, comme des échos de conversations qu’elle ne comprend pas. Madelyn se tient en retrait, un verre à moitié plein dans une main, son autre main crispée sur le bord de sa robe. On l’a traînée ici, forcée de sourire et de feindre qu’elle appartient à ce monde.

Zachary la surveille. Elle le sent, même sans croiser son regard. Chaque mouvement qu’elle fait est catalogué, chaque mot qu’elle prononce est écouté. Il ne lui laisse pas le choix  : être présente, être parfaite, être silencieuse.

Un murmure parcourt la pièce, un changement imperceptible dans l’atmosphère. Les regards se tournent vers l’entrée. Deux hommes. Deux présences qui imposent. Leurs noms suffisent à faire trembler les murs du pouvoir  : Adrian et Damian Valemont.

Adrian, le premier, est tout sourire et assurance. Sa démarche est fluide, comme s’il dominait la pièce sans effort. Les conversations s’arrêtent à son passage. Ses yeux balayent l’assemblée et s’arrêtent sur elle. Pas un regard curieux ou passager, mais un ancrage.

Il s’avance, laissant derrière lui une traînée de chuchotements. Madelyn serre son verre un peu plus fort.

— Vous êtes Madelyn, n’est-ce pas  ?

Sa voix est douce, mais il y a quelque chose de plus profond, une gravité qui tranche avec son apparente légèreté.

— Oui, répond-elle, hésitante.

Il sourit, mais il n’y a rien de gentil dans ce sourire.

— Vous n’avez pas l’air de vous amuser.

Elle ne sait pas quoi répondre. Adrian Valemont, un homme qu’elle ne connaît que par les journaux, est là, face à elle, parlant comme s’ils étaient seuls au milieu de cette foule.

— Je ne suis pas sûre d’être faite pour ce genre d’événement, dit-elle finalement, osant une pointe de franchise.

— Alors pourquoi êtes-vous là  ?

Un regard en coin vers Zachary. Adrian le suit, ses yeux se plissant légèrement.

— Je vois.

Il n’a pas besoin d’en dire plus. Le ton de sa voix suffit à faire comprendre qu’il a saisi ce qui se joue.

Zachary apparaît à cet instant, son sourire glacial planté sur le visage.

— Adrian. Toujours en train de jouer les chevaliers blancs, à ce que je vois.

— Zachary. Toujours en train de marquer votre territoire.

La tension entre eux est palpable. Adrian ne bouge pas, mais il y a quelque chose dans sa posture qui défie Zachary.

— Je crois que cette conversation est terminée, murmure Zachary en posant une main possessive sur le bras de Madelyn.

— Je ne suis pas sûr qu’elle soit d’accord, réplique Adrian, ses yeux fixés sur elle.

— Ce n’est pas votre problème.

Adrian soutient le regard de Zachary, mais recule d’un pas.

— Peut-être pas. Pas encore.

Il lui adresse un dernier regard, presque une promesse, avant de disparaître dans la foule.

Zachary serre son poignet plus fort que nécessaire, la forçant à se retourner vers lui.

— Ne le laisse pas t’approcher. Compris  ?

Elle hoche la tête, incapable de répondre.

***

Elle se faufile dans un coin isolé, cherchant un moment de répit. La pièce semble rétrécir, les murmures et les regards devenant oppressants.

— Vous fuyez déjà  ?

La voix est plus grave, plus tranchante. Damian Valemont.

Elle sursaute, le trouve debout près d’elle, son visage à moitié dissimulé par l’ombre. Contrairement à son frère, Damian ne sourit pas.

— Je… Je cherchais un peu de calme.

— Vous n’en trouverez pas ici.

Il s’approche, ses yeux scrutant chaque détail de son visage.

— Vous êtes différente.

Elle ne sait pas s’il s’agit d’un compliment ou d’une accusation.

— Je ne vois pas en quoi, dit-elle doucement.

Il penche légèrement la tête, comme s’il étudiait une énigme.

— Vous le verrez bientôt.

Avant qu’elle puisse répondre, il tend une carte, un simple rectangle de papier.

— Quand vous serez prête à comprendre ce qui se passe vraiment, appelez-moi.

Elle regarde la carte, hésite à la prendre.

— Pourquoi  ?

— Parce que vous êtes au centre d’un jeu dont vous ne connaissez même pas les règles. Et croyez-moi, Zachary Blackwell ne joue pas pour vous protéger.

Il s’éloigne avant qu’elle puisse poser une autre question.

Elle regarde la carte, le nom gravé en lettres dorées. Damian Valemont. Un numéro de téléphone. Rien d’autre.

***

Elle rejoint Zachary, qui l’attend près de la sortie, son impatience visible dans chaque ligne de son corps.

— Où étais-tu  ?

— Je… cherchais de l’air.

Il plisse les yeux, mais ne pousse pas plus loin.

— On s’en va.

Dans la voiture, elle fixe la carte, la dissimulant dans sa paume. Les mots de Damian tournent en boucle dans sa tête.

Elle ne sait pas si elle peut lui faire confiance. Mais une chose est sûre  : elle est prête à tout pour comprendre. Pour se libérer.