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chapitre 5

Chapitre 5

Élias ne se souvenait pas du moment exact où la fièvre avait pris le dessus. C’était venu sans crier gare, comme un coup de vent, lourd et sourd. Il n’avait pas eu le temps de réagir, juste un vertige qui l’avait fait tomber contre le canapé. Un malaise soudain, implacable. À peine une heure plus tôt, il se sentait encore maître de son corps, de ses pensées. Et maintenant, il se retrouvait là, dans un état de fragilité qui le dérangeait plus qu’il ne l’aurait admis.

Il n’avait pas l’habitude de se retrouver dans cette situation, à la merci d’un simple virus, comme un gamin. Il avait toujours été celui qui contrôlait, celui qui imposait sa volonté. Et voilà qu’un mal de tête aussi banal le réduisait à l’impuissance.

Quand il ouvrit les yeux, il la vit. Cassandre. Elle était là, près de lui, silencieuse, presque invisible dans son mouvement. Elle tenait un verre d’eau. Ses yeux, ces yeux glacés qui le défiaient toujours, étaient posés sur lui. Un éclat d’hésitation, un léger tremblement dans la prise de son verre. Il n’avait pas vu cette inquiétude avant, pas cette douceur cachée sous la façade de mépris.

« Tu devrais boire. » Sa voix était plus douce qu’il ne l’aurait cru, mais il ne répondit pas tout de suite. Il n’avait pas la force d’être sarcastique, pas cette fois. Il attrapa le verre, se redressant légèrement. L’eau passa difficilement dans sa gorge, mais il n’arrivait pas à la repousser, comme une vérité qu’il n’avait pas envie d’accepter.

« Tu veux que je t’aide ? » Elle n’attendait pas vraiment de réponse, et c’était ça qui lui plaisait. Elle savait exactement comment il fonctionnait. Pas besoin de mots inutiles. Il lui lança un regard, mais ne répondit rien. Il n’avait pas envie de la repousser. Pas cette fois.

Elle se leva sans bruit, se dirigeant vers la cuisine. Il la suivit du regard, ses pensées confuses. Le pire, c’était qu’il se sentait étrangement vulnérable, une sensation qui n’était pas de son goût. Cassandre, elle, semblait parfaitement à l’aise dans cette situation. C’était comme si elle savait exactement ce qu’il fallait faire. C’était perturbant. Elle revint avec une couverture, la posa sur ses épaules, et s’installa près de lui, sans un mot. Il se dit qu’il pourrait la repousser, se lever, partir, mais quelque chose dans son esprit le retenait.

Le silence entre eux se tendait, mais il n’était plus lourd. Il sentit sa respiration, cette chaleur douce qui semblait envahir la pièce. Il n’aimait pas ça, ne pas être le maître de la situation. Pourtant, il ne disait rien. Peut-être qu’il avait besoin de cette pause. Peut-être qu’il se sentait… humain, tout simplement.

« Tu vas guérir. » Elle dit ça sans enthousiasme, comme si c’était une simple constatation. Mais il savait que cette phrase n’était pas juste pour lui. Elle était pour elle aussi. Pour lui rappeler qu’elle n’avait rien à voir dans son état, qu’elle n’était pas là par choix.

« Tu penses que je suis incapable de prendre soin de moi ? » Il cherchait la provocation, un moyen de reprendre le contrôle, mais même ses mots semblaient futiles, comme des coquilles vides.

Elle le regarda, une lueur dans les yeux qui le fit se décaler légèrement. « Non. Je pense que tu n’as jamais eu besoin de personne. Et que ça te fait chier d’avoir à l’admettre. » Elle se leva à nouveau, mais ne s’éloigna pas. « Je vais chercher un peu de fièvre, tu dois te reposer. »

Il la regarda s’éloigner, se demander pourquoi il ressentait ce vide, pourquoi cette présence lui pesait soudainement. Cassandre. Elle le perturbait plus qu’il n’avait voulu l’admettre. À chaque regard qu’il lui lançait, à chaque mot qu’il lui jetait, quelque chose d’autre naissait. Une irritation, une attirance, une frustration. Il n’arrivait pas à décrire ce qu’il ressentait. Mais il savait une chose. Ce qu’il ressentait pour elle n’avait rien à voir avec ce qu’il pensait.

Elle était là. C’était étrange de le constater, mais il commençait à réaliser qu’il l’appréciait à sa manière. Pas pour sa douceur. Pas pour sa manière de le soigner. Mais pour cette façon de tenir tête, pour cette guerre silencieuse qu’elle menait chaque jour. Cassandre n’était pas simplement une partenaire de plus dans ce jeu de pouvoir qu’il entretenait. Non, elle était différente. Elle le déséquilibrait d’une manière qu’il ne comprenait pas.

Elle revint, sans bruit, avec un médicament. Son regard croisa le sien, et cette fois, il ne détourna pas les yeux. Pas tout de suite. Elle lui tendit les pilules sans dire un mot, attendant qu’il les prenne. Et il les prit. Pas par obligation, mais parce que, d’une manière inexplicable, il en avait besoin.

« Tu crois qu’on peut vraiment continuer comme ça ? » Sa voix brisa le silence. Il n’avait pas anticipé cette question, mais il savait que ce n’était pas une tentative de manipulation. Elle attendait une réponse honnête. Il la lui donna, comme une confession.

« Je ne sais pas. Je ne sais pas si ça nous mène quelque part. » Il baissa les yeux un instant, puis les releva. « Mais ça m’étonne que tu me demandes ça. » Un sourire discret, presque imperceptible, se dessina sur ses lèvres. « Tu fais semblant de ne pas comprendre. Mais tu l’as toujours su, toi, Cassandre. Tu savais depuis le début. »

Elle ne répondit rien, mais il vit son regard se durcir légèrement, une ombre de défi dans ses yeux. Et pour la première fois depuis longtemps, il se sentit perdu. Elle ne se contentait pas de jouer ce rôle qu’il lui avait attribué. Non, elle s’en moquait. Elle était là, avec lui, mais elle était autre. Elle était plus.

Il ferma les yeux, le corps lourd, son esprit flottant dans cette brume fébrile. La chaleur de sa main sur son front, la sensation de sa proximité, tout cela le troublait d’une manière qu’il n’avait pas prévue. C’était une connexion involontaire. Une tendresse qu’il n’avait pas demandée, mais qu’il commençait à ressentir. Parce qu’il la sentait là, non comme une épouse imposée, mais comme une femme. Une femme qui, d’une manière ou d’une autre, avait réussi à percer sa carapace.

Le souffle de Cassandre effleura son oreille, et il frissonna. Il ne savait pas si c’était la fièvre ou quelque chose d’autre qui lui montait à la tête. Mais il n’osa pas bouger, ni même lui demander de s’éloigner. Non. Cette fois, il était prêt à attendre. À voir où cette étincelle allait les mener.

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