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Partie 6

Tasha

Avoir Aliyah avec moi a quelque peu changé mes habitudes. J’ai envie qu’elle redevienne une petite fille de dix ans, ce qui n’était pas le cas chez maman. J’ai longtemps fermé les yeux, sur ce qui se passait, sur le danger que cela représente, mais aujourd’hui j’ai décidé de prendre mes responsabilités.

Chaque soir quand je rentre je m’occupe de la maison, je fais le linge, je nous prépare à dîner, nous dînons ensemble et je contrôle ses devoirs, et pendant qu’elle se détend devant la télévision, je m’occupe de moi, de mes révisions. Mme Valley m’aidait beaucoup pour les fois où nos emplois du temps ne coïncidaient pas, souvent les midis, et les jours où je finis tard. Elle me dit qu’elle peut rester toute seule, mais tout le monde me l’a déconseillé. Alors je la fais toujours garder.

Je finis de plier son linge et le mien quand la petite sonnette retentit à l’entrée. Je vérifie que je suis décente, et je vais ouvrir la porte :

- Il faut toujours demander qui est là avant d’ouvrir, Tasha.

- Bonjour inspecteur (humm)

- Bonjour Tasha, est ce qu’Aliyah est là? (bref je compte pour du beurre)

Je me tourne et je vois la tête d’Aliyah apparaître dans le salon. Elle me rejoint et je me mets sur le côté. Il se met à son niveau et lui parle :

- Bonjour Aliyah, chose promise, chose due. Voilà ta pizza : suprême cheese! J’en ai pris une extra large pour que tu puisses en donner un bout à ta grande sœur

Je la vois sourire et acquiescer de la tête.

- J’espère que tout va bien à l’école

- (oui de la tête)

- tu t’es fait de nouveaux amis?

- (non de la tête)

- OK, Tasha m’a dit que tu as des devoirs à finir, je ne vais pas te déranger plus longtemps. Je te souhaite un bon appétit.

Elle lui prend la main et le tire vers l’intérieur de l’appartement.

- Tu veux que je reste?

- (Oui de la tête)

- Mais je ne veux pas vous déranger, je suis sûr que Tasha...

Elle tourne la tête pour me fixer et me chuchote du bout des lèvre “s’il te plait” avec un air de petit chien battu. Je lui demande :

- Tu veux dîner avec l’inspecteur Hunt

- (oui de la tête)

- Tu as fini tes devoirs?

- (oui de la tête)

- OK, Vous pouvez rester

Il entre en s’excusant de s’imposer de la sorte. Je continue mon rangement en demandant à Aliyah de tout installer pour le dîner. Je vais dans la chambre et je range tout. J’apprécie le fait qu’elle soit entouré de personnes “normales” qui lui prête attention même si je suis toujours sur mes gardes, c’est un flic!

Je les rejoins pour dîner. Je ne dis rien, Aliyah non plus. Il fait le pitre, ce qui a le don de la faire rire aux éclats, c’est juste parfait. A la fin du repas, elle se lève pour débarrasser la table avant de s’installer devant la télévision tous les soirs. Je suis tellement loin dans mes pensées que je sursaute presque lorsque j’entends :

- Vous aussi vous ne parlez plus?

- Euh...non, pourquoi?

- Bah vous ne me répondez pas?

- Excusez-moi j’étais un peu loin dans mes pensées.

- Il n’y a pas de mal

- Vous disiez?

- Que j’admire beaucoup Aliyah, et que j’espère qu’avec le temps et l’aide de Dieu ça ira mieux rapidement.

- Amen

- A quoi pensez-vous ?

- Oh, pas grand-chose j’ai deux partiels demain et je dois m’organiser pour faire garder Aliyah.

- Comment faites-vous d’habitude ?

- C’est Mme Valley, l’épouse du pasteur Valley, qui s’en occupe quand j’ai des contraintes à la fac ou au boulot mais là…

- Mais là ?

- Elle a fait un malaise et est hospitalisée pour quelques jours…

- Rien de grave j’espère. Et vous avez une solution ?

- Pas pour le moment, mais je sais que ça va aller…

- Je pense aussi.

Il me regarde comme s’il allait me dire quelque chose et finalement il se tait. Il va s’asseoir avec Aliyah pendant quelques minutes pendant que je lave rapidement les assiettes. Quand je reviens au salon, il est debout dans l’entrée, vêtu de son manteau.

- OK, je vais vous laisser travailler, merci de m’avoir permis de passer du temps avec votre sœur.

- Elle vous apprécie, et c’est une bonne chose qu’elle fréquente des gens normaux

- Normaux ?

- Pas de drogue, de prostitution ou d’alcool. Des gens simples avec des valeurs saines…

- Ah ok. Bien je vais vous laisser.

J’ouvre la porte pendant qu’il fait un câlin à Aliyah, il me dit au revoir et s’en va. Je referme la porte et vais m’installer à la table pour réviser.

Quinze minutes plus tard je peux enfin me concentrer sur la préparation de mon examen. Je me concentre car je ne peux pas me permettre d’échouer à un examen. Je ne vois pas le temps passer, mais quand je regarde ma montre il est près de minuit. Il faut que j’arrête. Je range mes affaires et vais rejoindre Aliyah dans la chambre. Je branche mon téléphone, et constate que j’ai reçu des messages :

SMS1 : Bsr Tasha, à quelle heure avez-vous besoin de faire garder Aliyah ?

SMS2 : Je suppose que vous êtes en train de réviser, Si vous n’avez pas de solution je suis dispo entre 16H et 19H, faites-moi signe.

Raissa

4 jours que je suis rentrée à la maison, avec une obligation de repos total. Mon col à commencé à s’ouvrir et même pour aller boire un verre d’eau, je n’ai pas le droit de marcher. On a dû mettre en place une organisation autour de moi avec Roland, Tasha et Aliyah. Tous les matins mon époux m’aide à m’apprêter et à descendre de la chambre, il m’installe au salon avec tout ce dont je peux avoir besoin. Aliyah est à la maison en ce moment, pour permettre à Tasha de préparer son examen sereinement. Elle va à l’école et rentre à midi partager le déjeuner avec moi avant de repartir l’après-midi. Roland, se débrouille aussi pour passer dans la journée. Tasha, quant à elle, passe les soirs après les cours, elle dîne avec nous et m’aide pour l’entretien de la maison.

Cet après-midi, elle a son dernier partiel et doit venir me retrouver car du coup, je ne peux plus faire grand-chose pour préparer la venue des bébés. De plus il faut qu’elle et moi trouvions le temps de parler car depuis mon malaise nous n’en avons pas eu le temps. Auparavant nous échangions sur sa foi, le dossier de sa mère et même sur ses amours, je sens qu’il y a des mises à jour.

Déjà 13H10, je m’apprête à crier le nom de Aliyah pour ne pas qu’elle soit retard à l’école, quand j’entends ses pas dans les escaliers. Elle vient nous faire un câlin à tous les trois et vérifier que je n’ai besoin de rien et se met en route, nous voilà de nouveau seuls. Je finis par m’endormir devant la télévision.

Je sens une petite caresse sur ma joue et j’ouvre les yeux tout doucement, pour plonger mon regard dans celui de Tasha :

- Hello ma grande,

- Coucou vous ?

- Alors ça y est ? les partiels sont finis ?

- Oui et j’espère que je n’aurais pas de matière à reprendre.

- Dieu t’en fera la grâce.

- J’espère.

- On dit Amen Jeune Fille !

- Amen

Nous éclatons de rire. Elle m’aide à installer mes coussins pour que je sois plus à l’aise et sort son ordinateur, nous devons choisir le mobilier de la chambre des enfants sur internet, il sera livré et installé à la maison dans la semaine qui suit. Nous papotons joyeusement.

- Vous saviez que Miss Marble avait une fille ?

- Non pas du tout !

- Elle m’a informée que sa fille viendrait s’installer à New Haven, le mois prochain

- Une fille adoptive peut-être ?

- Non je n’en ai pas eu l’impression.

- Il parait qu’elle vivait avec son père, à Los Angeles.

- On aura le temps de la connaître

- J’espère qu’elle est aussi gentille que sa mère. Ça serait trop bien.

- J’espère aussi

La conversation dévie sur la dernière réunion de la jeunesse à laquelle je n’ai pu assister. Tasha a encore du mal à s’intégrer, car si les jeunes garçons sont sympas, les filles la snobent pas mal : soit elles sont fiancées et du coup, elles la voient comme un danger pour leur couple, soit elles sont célibataires et la voient comme une potentielle rivale, soit encore, elles la méprisent parce qu’elles ne la connaissent pas bien. Bref, ça m’intéresse car de la qualité des relations qu’elle va nouer dans sa nouvelle vie va dépendre, son ancrage dans la foi.

- Je ne comprends vraiment pas comment vous faites Mme Valley pour supporter ces deux filles là !

- Qui ? Rebecca et Debrah ?

- Mais qui d’autre ???

Nous éclatons de rire, car manifestement Debrah trouve mon mari à son goût et ne se gêne pas pour le reluquer et baver devant lui, au vu et su de tout le monde. La première fois que Tasha a été témoin de cette scène il a fallu que je la bloque pour éviter qu’elle fasse un scandale, tant elle était outrée !

- Qu’ont encore fait nos deux amies !

- Parlez pour vous, moi je ne suis pas amie à ces deux-là ! A la dernière réunion, vu que vous n’étiez pas là, Debrah s’est assise pile en face du Pasteur Valley, et n’a pas cessé de lui faire des yeux doux… C’était indécent…

- Si si, il m’en a parlée.

- Mais vous ne faites rien ?

- Si si si, j’ai mon arme secrète, mais en fait il va falloir que je m’habitue à certaines choses pour ne pas interférer dans son ministère !

- Hum, moi je préférerais mille fois avoir la réputation d’une femme jalouse que ça quoi ! Vous ne connaissez pas ce genre de filles là ! Elles s’en foutent royalement de briser un couple. Vous avez l’impression que c’est du jeu, mais à la moindre erreur elles frapperont là où ça fait mal !

- Dieu ne permettra pas !

- J’espère !

- Jeune fille on dit…

- AMEN ! Oui oui je sais !

Nous éclatons de rire ! Nous avons enfin fini de commander berceau, commode, matériel de bain et de lange. Elle ferme son ordinateur et apprête le goûter. Aliyah rentre de l’école et nous nous retrouvons tranquillement à papoter toutes les trois, comme des sœurs. Mine de rien, elles sont d’un grand soutien pour moi dans ces moments là !

Brrrrrr brrrrrrr (un téléphone qui vibre)

Tasha vérifie son téléphone et fait un drôle d’air. Je souris car je me doute bien qu’il s’agit de…

- Allô

- Oui Allô, Inspecteur Hunt à l’appareil

- Bonjour inspecteur

- Comment vas-tu Tasha ?

- Ça va.

- Excuse-moi de te déranger, je voulais prendre des nouvelles d’Aliyah.

- Elle va bien, voulez-vous que je vous la passe ?

- Oui, si elle n’est pas occupée…

- Ne quittez pas.

Se tournant vers sa sœur :

- Aliyah, l’inspecteur Hunt au téléphone

Elle se saisit du téléphone et monte se réfugier dans la chambre qu’elle occupe à l’étage. Personne ne l’a jamais entendue parler avec lui mais apparemment, c’est le cas puisqu’ils ont de longues conversations tous les deux ou trois jours durant lesquelles personne ne sait ce qu’ils se disent. Mais en tout cas c’est positif. Je me tourne vers Tasha :

- Encore lui (avec un demi-sourire)

- Encore lui ! J’ai du mal à comprendre ce qu’il nous veut !

- Mais si tu arrêtais un peu d’être sur la défensive avec lui ? Tu sais sa présence fait du bien à Aliyah, donc pour elle tu pourrais… je ne sais pas baisser un peu ta garde. T’a-t-il déjà manqué de respect ?

- Non, mais j’ai peur qu’il ait des intentions.

- Mais pourquoi ?

- J’ai vu le danger que les hommes peuvent représenter avec l’exemple de ma mère, et je ne veux pas prendre de risque de ce genre là…

- Mais tu comptes bien te marier et avoir des enfants un jour ?

- Je ne sais pas, je crois que oui…

- Tu sais où tu crois ?

- Je crois. Vous savez, de là ou je viens, pour réussir et arriver à la faculté et faire des études supérieures ça demande pas mal de sacrifices, ne pas être une fille in, ni la star du lycée, la miss bal de promo. Ça signifie être insignifiante aux yeux des garçons. J’ai évité les garçons de la zone comme la peste. Et arrivée à la fac, je n’étais pas assez bien pour les enfants de bonne famille. J’ai tout naturellement rejoint les filles qui venaient du même milieu que moi. Mais s’il y a bien une chose que je me suis abstenue de faire, c’est bien celle-là…

Elle finit sa phrase en baissant les yeux…

- Tu veux dire que ?

- Oui…

- Non ? Tu n’as jamais eu de petit ami ? ni été amoureuse ?

- Y’avait bien ce garçon en première année, qui me plaisait bien, mais un jour je l’ai entendu dire qu’il préférait devenir gay que d’être avec moi. Ça m’a fait tellement mal, que j’ai décidé de me venger. J’ai changé de style, je suis devenue incroyablement sexy, et quand il a voulu faire marche arrière, je l’ai largué !

Nous éclatons de rire ! Qui l’eut cru ! A la voir, on la prendrait pour la fille la plus expérimentée de la terre, alors que…Décidément cette petite est pleine de surprises !

Roland

Je viens de finir mes entretiens de la journée, j’ai hâte de rentrer chez moi retrouver ma femme. En plus j’ai du travail, je dois finir de poser le papier peint dans la nurserie. Ma belle-mère va un peu mieux, et son mari a accepté qu’elle vienne passer quelques jours chez nous à la naissance des jumeaux. Ça ne sera vraiment pas du luxe, ma pauvre Raïssa a tellement souffert…

Je manque de heurter violemment Miss Marble en sortant des bureaux :

- Toutes mes excuses Miss Marble

- C’est moi Pasteur, je courais pour essayer de vous rattraper avant que vous ne partiez ?

- Ah bon ? je partais effectivement !

- Toutes mes excuses, je n’ai pas regardé l’heure, j’étais tellement contente que… Si ce n’est pas trop vous demander m’accorderez-vous 5 minutes ?

Je regarde ma montre et je finis par accepter. Nous nous installons dans la salle de culte pour parler. Après avoir brièvement prié, nous commençons à parler :

« Pasteur aujourd’hui est le plus beau jour de ma vie. Vous savez, je n’ai pas toujours été une chrétienne bien sous tous les plans. Je viens d’un quartier pauvre de Boston. Très jeune j’avais commencé à dévier, lorsque j’ai rencontré un jeune homme de bonne famille. Il avait tout pour lui mais il m’aimait moi. Moi je ne l’aimais pas vraiment, mais je profitais de tout ce que je pouvais avoir. J’étais incroyablement belle à l’époque et j’en jouais. Le père de ce jeune m’a vue, et j’ai su dans son regard qu’il détenait mon passeport vers l’avenir. Je n’avais que 16 ans à l’époque, lui en avait déjà 38, mais je l’ai séduit et nous avons noué une relation… »

Sa voix se brise, mais elle continue

« Nous avons continué discrètement, mais à un moment tout le monde commençait à avoir des doutes. Pour lui éviter des ennuis, j’ai quitté Boston pour New-York. Il était mon sponsor et passait me voir quand son emploi de temps lui permettait. A 18 ans je suis tombée enceinte. Je croyais le tenir à ma portée et j’ai tout fait foirer. Sa famille a découvert notre histoire alors que notre fille avait 3ans, je pensais que cette découverte le mènerait au divorce, mais non. Je ne saurais pas dire ce qui s’est passé, mais il a coupé les ponts. Simplement, j’ai été contactée par un notaire, pour signer les papiers qui me rendaient propriétaire de la maison que j’habite. Tous les mois une pension alimentaire convenable était versée sur mon compte. Quand j’ai voulu jouer sur les sentiments, j’ai compris que les gens riches n’avaient pas les mêmes valeurs que les autres. Ma fille était âgée de 7 ans, quand à l’issue d’une longue bataille juridique, j’ai perdu sa garde. C’est dans cette tristesse que j’ai rencontré le Seigneur.

Les services sociaux l’ont emmenée chez son père à Los Angeles, et depuis je recevais une photo à Noel, à Thanksgiving et à son anniversaire…

Elle essuie une larme…

“ Ma fille m’a recontactée la semaine dernière, elle m’a dit que le Seigneur lui avait donné la force de me pardonner et de passer à autre chose. Elle a décidé de venir s’installer ici avec moi ! Pasteur, ma fille arrachée à 7 ans qui revient vers moi 13 ans plus tard ! Qui plus est chrétienne, et très affermie dans le Seigneur !!!! Quelle grande joie ! Je voulais vraiment libérer mon cœur, surtout que tu m’aides à rendre grâce à Dieu !”

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