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Problème de famille

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Résumé

Les relations humaines sont souvent très complexes.

amour après mariageréincarnationvrai amourfantasiaVengeanceMariage arrangé

Chapitre 1

Chapitre 1.

***Kaba MPIGA épouse CHAMOUN***

Après une belle soirée bien arrosée, me voilà assise sur les marches d’escaliers à chasser les moustiques. Tout le vin ingurgité depuis 18h s’est évaporé de mon corps avec tous ses effets dès que j’ai mis les pieds dans cette concession. Imalet ne dort pas, je le sais car la lumière du salon est allumée en plein 4h du matin.

Moi dans ma langue vernaculaire : eh MPIGA on t’a maudit ? C’est maintenant la malédiction ? C’est comment avec le vin et la fête ? Tu es déjà mariée, tu ne peux pas un peu rester tranquille ? Les autres arrivent à se calmer après le mariage, toi rien. On doit t’imposer les mains ?

La porte centrale s’ouvre brusquement et me fait sursauter. D’un bon je fuis vers le portail. Imalet me fixe sans rien dire avant de retourner dans la maison. Je rentre ou pas ? Il a l’air furieux. Eh Seigneur Kaba ! Kaba oh !

Imalet depuis le salon : ce n’est pas toi qui paies le courant ici, viens me fermer la porte !

Moi entre mes dents : c’est moi qui ai ouvert la porte d’abord ?

Je m’avance lentement vers la terrasse ou je ramasse mon sac et mes chaussures puis j’entre dans la maison en rasant les murs.

Moi hésitante : bonsoir chéri.

Je vois dans son regard, dans ses yeux qu’il essaie de se contenir.

Imalet en apparence calme : il est quelle heure ?

Moi bête que je suis : mon téléphone est éteint, je ne peux pas lire l’heure.

A ce moment, je sais qu’il a seulement envie de cogner ma tête contre le mur. L’une de ses plus grandes qualités c’est vraiment sa grande maitrise de soi. Ce chien d’OBIANG (mon ex) m’aurait déjà bien tabassée.

Imalet : c’est bien.

Il se lève et quitte la pièce. Ça fait plus mal que la bastille. Je reste honteuse, debout dans le salon un moment à me parler à moi-même comme si ma grosse tête la pouvait comprendre quelque chose.

Je rassemble finalement mon courage à deux mains et le suit dans la chambre. Il est assis sur le lit, les pieds au sol la tête entre ses mains. Je viens me placer à genoux devant lui en silence.

Imalet sans lever la tête : Kaba pourquoi tu fais ça ? Je t’ai fait quoi ? J’ai eu tort de croire en toi ? Tort de ne pas écouter les miens, les préjugés sur les gabonaises ? Tort de t’avoir aimée et respectée ? Tu veux quoi Kaba ? Tu cherches quoi ?

Sa voix tremble et comme à chaque fois je culpabilise, me sens mal, mais le week-end prochain je sais que j’irai encore. Demander pardon ? Même moi je n’y crois plus.

Imalet est un libanais dont la famille s’est installée au Gabon à l’époque de mes grands-parents. Il a fait tout son parcours scolaire au Gabon jusqu’à l’obtention du bac avant de s’envoler vers les Etats-Unis puis rentrer après ses études. Vous-mêmes vous savez qu’après les européens, les propriétaires de l’Afrique sont les chinois et les libanais. A son retour, direct grand poste, belle carrière.

On s’est connu lors de ses vacances au Gabon trois ans avant son retour définitif. Il m’a connue dans le groove, on a sympathisé mais c’est quinze moi après qu’on s’est mis en couple. Lui là-bas, moi ici. Déjà à cette époque mon amour pour la fête était un problème. Pourtant je ne fais rien de mal hein. Je sors avec mes frères, mes sœurs, on s’amuse et chacun rentre chez lui. Mais la jalousie des hommes, le cœur n’est pas tranquille quand Madame n’est pas enfermée dans sa prison dorée.

Lorsqu’il est rentré, la relation était toujours bancale donc j’ai décidé de gagner en temps. OBIANG était toujours là à me tourner autour donc je suis retournée vers mon diable. Un jour le gars m’a bien bastonnée en route parce que j’ai fait le mur pour aller en boite. Ce sont les frères d’Imalet qui m’avaient sauvée, car ce sauvage m’avait déshabillée en route. La honte, la honte je vous dis. Imalet est venue me chercher, et de là est repartie la relation. Et OBIANG ? Mes frères ont fait une descente chez lui, lui passer l’envie de lever encore la main sur une femme.

C’était il y a quatre ans. La famille d’Imalet comme on pouvait l’imaginer, n’a pas sauté au plafond en voyant que notre relation prenait une tournure sérieuse. Les frères qui m’appelaient « belle-sœur » m’ont montré leurs vrais visages. Quand leur frère me sautait ça ne dérangeait pas, dès que ça a commencé à devenir sérieux qu’est-ce que je n’ai pas entendu ?

« Les gabonaises sont des bordelles » c’est ce qu’ils répétaient sans cesse. Comment leur en vouloir quand nos propres frères gabonais passent leur temps à entretenir ce préjugé sur nous ?

Une famille installée au Gabon depuis les années kala-kalas (depuis longtemps), aucun métis lors des réunions de famille. Et ne tournons pas autour du pot, je suis noire et non musulmane. Si encore je venais d’une grande famille, mais je suis une téké inutile, même pas du village présidentiel. Imalet pouvait me coucher, jouer avec moi, mais jamais au grand jamais songer à m’épouser.

Il s’est battu contre sa famille, contre les préjugés pour qu’on puisse se marier – ce qui est le cas depuis deux ans. Aujourd’hui je ne vais pas dire qu’ils m’aiment, on se tolère.

Imalet sait que je ne suis pas une fille facile, que je ne fais rien de mal dehors. Mais ses frères me croisent et vont raconter ce qu’ils veulent dans la famille. Une femme mariée n’a pas droit de s’amuser, de sortir. Elle doit rester cloitrer dans la maison h24, attendre le retour de son mari pour lui masser les pieds.

Moi : je te demande pardon.

Imalet explosant enfin : tu le fais tout le temps ! A chaque fois c’est pareil Kaba, à chaque fois ! J’en ai marre de toi ! Tu veux rester dehors ? Tu aimes le dehors ? Sors de ma maison, demain tu fais tes affaires je vais te déposer chez tes parents. Tu pourras dormir dans les boites de nuit, personne ne viendra te chercher.

Moi en pleurs : chéri pardon !

Imalet fou de rage : dégage !

Moi : chéri je vais changer.

Imalet : Kaba je te dis de dégager.

Moi les mains sur la tête : oyioooooh ! Les sorciers de d’Oskama (mon village paternel) m’ont eue ! Qui va me sauver oh ? Tuez-moi oh ! L’amour de ma vie me répudie oh ! Venez oh ! Venez !

Je me mets à pleurer dans ma langue vernaculaire ce qui agace Imalet qui se lève et quitte encore une fois la pièce. Je le suis à genou les mains au ciel en pleurant.

Moi : qui peut me supporter si ce n’est pas toi ? Qui peut m’aimer si ce n’est pas toi ? Je vais aller où ? Je vais devenir quoi ? Tu sais que je t’aime, ne laisse pas les sorciers nous séparer. Est-ce que je ne remplis pas mes obligations d’épouses ? Parce que je vais m’épanouir dehors tu veux me punir ?

Imalet le regard injecté de sang : Kaba ferme-moi ta bouche très vite ! Ferme ça ! (phrase en arabe) ferme-moi ta bouche.

Moi ? les deux mains sur la bouche : hum hum !

Imalet : tous les week-ends c’est le même scénario mais si tu veux te comporter comme une demoiselle retourne chez tes parents !

Je lève une main pour demander la permission de parler. Son regard me fait baisser ma main.

Imalet : nul n’aurait été le respect pour tes parents, je serai allé te déposer chez eux ce soir même. Même si tu veux sortir, jusqu’à 4h ? 4h du matin ? Je suis ton watch ?

Je remue la tête de gauche à droite les mains toujours sur la bouche. J’ai mal aux genoux mais je sais que là il est vraiment fâché. Il s’assoit sur l’accoudoir d’un fauteuil me laissant à genoux longtemps. Il prend le temps de se calmer.

Imalet calme : pourquoi tu fais ça ?

Moi : je ne suis pas prête. Avant on sortait, on faisait la fête. Aujourd’hui on ressemble à un vieux couple. On a trente et vingt-six ans Imalet. Avant les enfants, profitons.

Imalet remonté : sauf que je travaille du lundi au vendredi de 7h à 20h parfois. Quelque fois le samedi aussi. Alors mon temps libre, je veux l’utiliser poser à la maison avec ma femme. Je suis fatigué tu comprends ça ? Je n’ai pas l’énergie de sortir danser. Surtout qu’avec toi on ne peut pas se contenter d’un verre. Quand tu sors, si le DJ ne te chasse pas, tu ne peux pas rentrer chez toi. Kaba c’est quel vin que tu bois que tu n’as jamais bu ? Quelle musique ? Tu penses à mon image ?

Moi : …

Personne ne parle. Je pose mes fesses sur mes talons pour lui signifier que je veux me lever. Il soupire avant de reprendre la parole.

Imalet : je fais de mon mieux pour t’offrir une belle vie, désolé de ne pas arriver à te satisfaire. Avant qu’on en arrive à se détester, ou que je ne perde mes moyens, je préfère qu’on arrête là.

Peu importe la gravité de la dispute, jamais Imalet n’a parlé de rupture. Mais depuis que je suis rentrée il ne fait que parler de ça. Je commence à avoir peur. Je prends mon téléphone et envoie un message à ma grande sœur totalement en panique. J’aime mon mari, je ne veux pas qu’on se sépare. Oui je suis souvent tête en l’air, mais je l’aime. C’est un homme tellement gentil, honnête, doux, attentionné, patient. Mon cœur bat anormalement vite, j’ai peur.

Moi apeurée : Imalet je te demande pardon. Je vais changer. Au tombeau de tous mes parents paternels.

Il tourne la tête et je l’entends renifler. L’affaire est sérieuse. Mon mariage est fini comme ça ? Je me mets à pleurer mais cette fois silencieusement, pas la comédie que je fais depuis que je suis rentrée. Chacun pleure en silence dans son coin. Il s’assoit convenablement dans le fauteuil.

Imalet en larmes : je t’ai tout donné, tout Kaba. Je travaille comme un fou pour t’offrir une vie de Princesse. Il te suffit de demander que je donne. J’ai remué ciel et terre pour toi. Pour quelle récompense ? Le manque de respect. Tu me parles d’obligations d’épouse, mais veiller à ma dignité n’est pas un de tes devoirs ? A chaque fois qu’on parle de quelqu’un en mal dans le groupe de famille c’est de toi. Chaque week-end c’est toi, c’est ton nom. Après c’est pour dire que mes parents sont racistes, mais regarde ton comportement. On ne parle jamais des femmes des autres, des enfants des autres, c’est toujours toi. Je suis fatigué Kaba. Je suis fatigué. Je te libère, rentre chez toi. Va vivre ta vie, ta jeunesse.

Ma gorge est si sèche qu’il m’est impossible de parler. Je ne savais pas qu’on parlait de moi dans leur groupe de famille. Entre frères oui, mais devant les parents aussi ? Que disent-ils ? Et pourtant je ne fais rien de mal dehors. Avant, je buvais à me rendre ivre, à me ridiculiser. Avant je dansais sur les tables. Aujourd’hui je fais même attention aux endroits où je vais. Je vois que ça lui fait du mal, qu’il en souffre mais cela n’a jamais été mon intention. Que dire maintenant ? Après avoir demandé pardon sans vraiment le penser tant de fois ?

Moi la voix cassée : je ne veux pas que tu me libères. Je ne veux pas vivre sans toi.

Sans un mot, il va dans la chambre d’amis et s’y enferme. Je reste à réfléchir à ma vie au salon. A 7h00 j’appelle ma sœur.

Ya Leslie la voix endormie : c’est comment le matin comme ça ?

Moi en larmes : ya Leslie viens, Imalet veut me mettre à la porte. Viens pardon.

Ya Leslie : tu as encore fait quoi ?

Moi d’une petite voix : je suis allée à l’anniversaire d’Erica.

Elle me raccroche au nez et je rappelle aussitôt. J’insiste jusqu’à ce qu’elle décroche en m’insultant.

Moi : c’est sérieux pardon. Insulte-moi, gronde-moi, tape-moi même, mais pardon aide-moi. Ya Leslie je suis ta petite sœur. Pardon aide-moi. Viens !

Elle rappe d’abord dans mes oreilles, m’insulte dans les habits avant de conclure qu’elle arrive avec maman. Je sais déjà qu’on va me tirer les oreilles, je suis prête, mais je ne veux pas perdre mon mari. Vous-même vous voyez ma qualité non ? Combien d’hommes peuvent me supporter ?

En attendant les parents, je prépare le petit-déjeuner de mon mari et dresse la table. En passant devant un miroir j’aperçois ma tête et me fais peur. Je vais rapidement me doucher avant d’aller réveiller Imalet qui ignore mes appels. La colère de mon mari disparait avec son sommeil, savoir qu’il s’est réveillé toujours en colère me fait peur.

Imalet : quand tu es prête tu me fais signe.

Moi les yeux ronds : on va où ?

Imalet s’énervant : tu veux m’énerver ce matin ? Je t’ai dit quoi tout à l’heure ?

Moi avec une petite voix : je ne sais plus.

Il me fixe, je baisse la tête.

Imalet : va faire tes bagages je vais te déposer chez tes parents. Ou tu pensais que je blaguais ?