Chapitre 5

~~~Quelques jours plus tard~~~

Sofia tira sa valise sur le gravier du manoir, le souffle un peu court après le trajet. La lumière du matin illuminait la façade immense, et elle dut s’arrêter un instant pour contempler l’ampleur de l’endroit. Chaque fenêtre reflétait le soleil, chaque colonne semblait défier le temps, chaque détail respirait la richesse et le contrôle.

Isla, impatiente, courait devant elle, tirant sa petite main avec énergie.

- Sofia ! Sofia ! Tu as vu ma chambre ? Je vais te montrer !

Maximilian, derrière, suivait d’un pas lent et mesuré. Son costume noir était impeccable, ses lunettes de soleil légèrement baissées. Ses yeux brillaient d’un éclat froid, observant Sofia avec un mélange d’intérêt calculé et d’autorité silencieuse.

- Vous avez prévenu vos supérieurs que vous seriez absente, j’espère ? demanda-t-il, sa voix glaciale, sans même un mot d’accueil.

Sofia acquiesça, serrant sa valise d’une main.

- Oui, j’ai envoyé une demande de congé pour quelques semaines. Je… je suis prête.

Maximilian arqua un sourcil.

- Prête, hum ? Sa voix laissait entendre qu’il doutait de sa compréhension du monde dans lequel elle entrait. Vous verrez qu’ici, les choses ne fonctionnent pas comme dans un bureau ordinaire. Tout est sous contrôle.

Sofia hocha la tête, essayant de masquer l’impression de vertige qu’elle ressentait. Elle ne connaissait pas la vie de luxe, ni les règles implicites de cette maison où tout semblait parfait et ordonné. Mais elle avait accepté pour Isla. Pour la petite fille qui lui souriait à moitié euphorique, à moitié anxieuse, comme si sa présence apportait enfin la sécurité qu’elle réclamait depuis des jours.

Dès qu’elles franchirent la porte, l’ampleur du hall la fit hésiter. Le sol en marbre blanc étincelait sous la lumière des immenses lustres, et les escaliers en colimaçon semblaient presque trop grands pour la maison.

Isla lâcha la main de Sofia pour courir droit vers les escaliers.

- Ma chambre est là-haut !

Sofia la suivit, mais Maximilian posa une main sur son bras pour l’arrêter.

- Attendez.

Elle leva les yeux vers lui, surprise.

- Excusez-moi ?

Il la fixa froidement, les yeux perçants.

- Ici, vous devez suivre certaines règles. Les pièces ont leur usage. Vous n’êtes pas libre d’aller où vous voulez comme dans un hôtel.

Sofia inspira, consciente du ton autoritaire. Elle avait vu ce côté de lui dans le café, mais là, face à cette immensité et cette froideur, elle comprenait que son argent n’était pas seulement un outil, c’était une extension de son contrôle sur le monde.

- Je comprends, dit-elle calmement, bien que son cœur battait un peu plus vite. Je suivrai vos instructions.

Maximilian hocha la tête, un coin de ses lèvres se relevant légèrement, mais sans chaleur.

- Bien. Alors, suivez-moi.

Isla débordait d’énergie et ne cessait de courir d’une pièce à l’autre, montrant à Sofia chaque détail : son lit, ses peluches, les étagères de jouets parfaitement alignées.

- Et regarde ! Ici, c’est ma bibliothèque ! Et là, c’est ma boîte à secrets !

Sofia souriait doucement, amusée par l’enthousiasme de la petite. Mais elle sentait la tension sous-jacente. Maximilian les suivait, silencieux, croisant parfois les bras et jetant un regard scrutateur à Sofia. Il n’y avait aucun sourire pour l’accueillir, aucune chaleur dans sa posture. Tout était maîtrise et calcul.

- Alors… dit-il enfin, la voix basse et précise, vous restez ici pour Isla. Vous assurez qu’elle mange, qu’elle joue correctement, qu’elle suit son rythme… et surtout, que vous lui parlez quand il le faut.

Sofia acquiesça.

- Compris.

Maximilian hocha la tête, les yeux glissant vers Isla.

- Vous êtes consciente que certaines choses ne sont pas négociables.

Sofia comprit qu’il faisait allusion aux règles de la maison, au rythme strict et aux normes qu’il avait établies. Mais elle n’était pas venue pour les discuter. Elle était venue pour Isla.

- Je comprends. Je ferai de mon mieux pour elle.

Isla éclata de rire, impatiente.

- Oh, Sofia ! Tu vas rester avec moi ! C’est génial ! Elle courut se cacher derrière un rideau, jouant à la fois pour tester Sofia et pour se réjouir de sa présence.

Sofia la suivit doucement, la prenant dans ses bras un instant.

- Oui, Isla, je reste.

Maximilian se détourna pour examiner le mobilier, ses mains croisées derrière le dos. Il ne disait rien, mais le regard qu’il lançait à Sofia était presque… analytique. Comme s’il évaluait chaque mouvement, chaque mot, pour déterminer si elle pouvait vraiment tenir ce rôle.

Le dîner fut silencieux. Sofia s’assit à la grande table, Isla à côté d’elle, sautillant presque sur sa chaise. Maximilian, lui, semblait plus distant que jamais, observant chaque geste de Sofia, notant tout : la façon dont elle servait l’eau, comment elle s’adressait à Isla, comment elle tenait ses couverts.

- Vous ne mangez pas beaucoup, dit-il finalement, sa voix glaciale mais posée. Ici, nous suivons un rythme précis. Les repas sont importants.

Sofia hocha la tête.

- Je m’assurerai qu’Isla mange correctement.

Il l’observa quelques instants, ses yeux d’un bleu perçant presque intimidant.

- Et vous ? Vous mangez suffisamment ? Vous devez être en forme pour elle.

Sofia répondit avec calme :

- Je peux gérer.

Il inclina légèrement la tête, comme pour marquer qu’il avait pris note. Aucun sourire, aucune chaleur. Simple constatation.

Après le dîner, Maximilian se leva, glissa un regard vers Sofia et dit :

- Vous dormirez dans la chambre d’amis. Pas dans la chambre de ma fille.

Sofia acquiesça, serrant légèrement les poings. Elle sentait la froideur dans sa voix, mais ne répondit rien. Elle n’était pas venue pour lui plaire, elle était venue pour Isla.

Isla, quant à elle, insista pour accompagner Sofia jusqu’à sa chambre.

- Tu vas dormir ici ? Oh, c’est trop bien ! Elle sautillait d’excitation, ignorant la rigidité du père.

Sofia sourit, posant une main sur la tête de la fillette.

- Oui, Isla, mais tu dois aller te coucher après ta douche.

La petite protesta brièvement, puis accepta finalement, trop heureuse d’avoir sa Sofia à ses côtés.

Une fois Isla endormie, Sofia s’assit sur le bord du lit de la chambre d’amis. Le silence de la maison était presque écrasant. Chaque pièce respirait l’ordre, la perfection, l’opulence. Le luxe n’était pas seulement visible, il imposait sa discipline.

Elle entendit les pas de Maximilian derrière la porte. Il s’arrêta un instant, comme pour s’assurer qu’elle avait bien compris les règles implicites.

- Vous savez… dit-il calmement, sa voix comme un courant froid, La gouvernante vous apprendra quelques petites règles, les routines pour Isla doivent être suivis à la lettre certaines choses ne peuvent être négociées. Le respect des règles fait partie de ce monde.

Sofia hocha la tête, fixant un point invisible.

- Je comprends.

Il observa sa réaction quelques secondes, puis se détourna sans un mot de plus. Le claquement de sa porte résonna dans la chambre vide.

Sofia respira profondément. Elle savait que ce serait difficile, que Maximilian était un mur froid et rigide, mais elle n’était pas venue pour lui, elle était venue pour Isla.

Et dans un coin de son esprit, elle se surprit à penser que ce mur, aussi imposant soit-il, pourrait un jour se fissurer. Mais pas aujourd’hui. Aujourd’hui, il fallait survivre aux premiers jours…

Le lendemain matin, Isla entra dans la chambre en courant, sautillant sur ses pieds.

- Sofia ! Sofia !

Sofia sourit, laissant l’enfant grimper sur le lit.

- Bonjour, Isla. As-tu bien dormi ?

- Mieux que jamais ! » répondit-elle, rayonnante. Tu restes avec moi aujourd’hui ?

Sofia hocha la tête.

- Oui, je reste.

Maximilian entra ensuite, glacé, parfait dans son costume du matin. Il tendit un papier à Sofia qui se hâta d'y jeter un œil.

- Aujourd’hui, vous suivrez mon planning. Je veux que tout soit ordonné.

Sofia soupira intérieurement, consciente que ces premiers jours allaient être un vrai défi. Mais Isla, elle, était déjà conquise. Et c’était tout ce qui comptait.