L'enfer
Chapitre 6 : L’Enfer aux Portes
Point de vue d’Alina Morozov
Lorsque Nikolaï quitta ma chambre, je restai figée, le cœur battant à un rythme effréné.
Il venait de déclarer la guerre à Viktor Sokolov.
Pour moi.
Je n’arrivais pas à y croire.
Je connaissais les hommes comme eux. Des prédateurs nés, des maîtres du pouvoir et du contrôle. Nikolaï ne faisait pas exception. Pourtant, quelque chose en lui était différent.
Il n’avait pas dit « Tu es à moi. »
Il avait dit « Tu es sous ma protection. »
Et ça changeait tout.
Mais pouvais-je lui faire confiance ?
Je me laissai retomber sur mon oreiller, fixant le plafond. Mes pensées tournaient en boucle, cherchant une issue, une solution.
Fuir à nouveau ? Impossible.
Sokolov me retrouverait, peu importe où j’irais.
Rester ici ?
C’était risqué… et pourtant, je n’avais pas d’autre choix.
Un bruit dans le couloir me fit sursauter. Mon instinct me cria de rester immobile, d’attendre.
Les minutes s’écoulèrent, lentes, oppressantes.
Puis, sans prévenir, la porte s’ouvrit à la volée.
Je me redressai d’un bond, mon souffle se coupant.
Ce n’était pas Nikolaï.
Un homme imposant, brun, aux yeux perçants, se tenait dans l’encadrement.
Il me scruta longuement avant de faire un pas à l’intérieur.
— Alors c’est toi, la fille pour qui le Boss veut déclencher une guerre, lança-t-il d’une voix grave.
Je serrai les draps entre mes doigts.
— Qui êtes-vous ?
Il esquissa un sourire en coin.
— Mikhaïl. Son bras droit.
Il s’approcha lentement, me jaugeant comme si j’étais un mystère à résoudre.
— Tu ne paies pas de mine, mais il ne t’a pas ramenée ici par hasard.
Je me crispai.
— Je ne lui ai rien demandé.
— C’est bien ça, le problème.
Il s’accouda au mur, me regardant avec un sérieux troublant.
— Nikolaï ne se bat pas pour les autres. S’il a décidé de te protéger, c’est qu’il te veut.
Je sentis un frisson parcourir ma colonne vertébrale.
— Vous vous trompez.
Mikhaïl rit doucement, un rire sans joie.
— C’est ce que tu crois.
Il se redressa et se dirigea vers la porte.
— Un conseil, Alina. Ne joue pas avec lui. Ce genre d’homme… une fois qu’il te veut, il ne lâche jamais prise.
Il sortit, me laissant seule avec un vertige étrange.
Nikolaï ne me voyait-il vraiment que comme un fardeau ?
Ou bien… étais-je déjà bien plus que ça ?
Et si c’était le cas…
J’étais foutue.
Le silence de la pièce me paraissait étouffant après le départ de Mikhaïl. Ses mots résonnaient encore dans ma tête.
"Ce genre d’homme… une fois qu’il te veut, il ne lâche jamais prise."
Je secouai la tête. Non. Je ne pouvais pas être un pion dans une guerre entre Nikolaï et Viktor Sokolov. Je refusais d’être un trophée pour qui que ce soit. Mais alors… pourquoi avais-je l’impression que mon destin venait de se sceller ?
J’avais à peine trouvé le sommeil quand un bruit dans le couloir me réveilla en sursaut. Mon cœur battait fort. Cette fois, la porte s’ouvrit plus doucement.
Nikolaï.
Il entra sans un mot et referma derrière lui.
Son visage était fermé, impénétrable, mais je pouvais voir l’orage qui grondait dans ses yeux.
— Lève-toi.
Sa voix était basse, tranchante. Un ordre, pas une demande.
Je fronçai les sourcils.
— Pourquoi ?
— Parce que je te le dis.
Sa patience était mince. Je le sentais à la tension de ses épaules, à la façon dont il serrait la mâchoire.
Je me redressai lentement et posai mes pieds nus sur le sol froid.
Il s’approcha, me dominant de toute sa hauteur.
— J’ai des questions. Et cette fois, tu vas me répondre.
Son regard s’accrocha au mien, brûlant d’une intensité troublante.
— Depuis combien de temps Sokolov te cherche ?
Je déglutis, sentant mon estomac se nouer.
— Des mois.
— Pourquoi n’as-tu pas demandé de l’aide ?
Un rire amer m’échappa.
— De l’aide ? Et à qui ? La police ? Ils sont à sa solde. Des amis ? Je n’en ai pas.
Son regard se durcit.
— Et maintenant, tu comptes sur moi ?
Sa voix était un mélange de provocation et de défi.
Je le fusillai du regard.
— Je n’ai rien demandé !
Il fit un pas en avant, réduisant l’espace entre nous à presque rien.
— C’est bien ça, le problème, Alina. Tu crois pouvoir survivre seule.
Son souffle chaud effleura ma peau. Je frissonnai malgré moi.
— Mais tu es à bout, murmura-t-il. Ça se voit dans tes yeux.
Je sentis ma respiration s’accélérer.
Il avait raison.
J’étais fatiguée de fuir.
Fatiguée d’avoir peur.
Je levai le menton, refusant de lui montrer la moindre faiblesse.
— Et qu’est-ce que vous attendez de moi, Nikolaï ?
Un éclat de danger traversa ses prunelles sombres.
— Rien. Pour l’instant.
Il effleura mon menton du bout des doigts, une caresse à peine perceptible, mais qui enflamma chaque nerf de mon corps.
— Mais souviens-toi d’une chose…
Il se pencha à mon oreille, sa voix un murmure menaçant.
— Tant que tu es sous mon toit, tu es à moi.
Je retins mon souffle.
Il se redressa, me laissant déboussolée, et se dirigea vers la porte.
— Dors maintenant. Demain, on commence à traquer Sokolov.
Puis il disparut, me laissant seule avec un cœur qui battait bien trop fort et une certitude terrifiante :
J’étais entrée dans un jeu où je n’avais plus le contrôle.
LE Point de vue de Nikolaï Volkov
Quand je quittai la chambre d’Alina, je sentis mon sang bouillir dans mes veines.
Sa manière de me défier, de me tenir tête malgré la peur qui vibrait dans ses prunelles sombres… Ça réveillait en moi une envie viscérale, incontrôlable.
Elle ne comprenait pas encore. Elle croyait pouvoir se débrouiller seule.Mais dans mon monde, la solitude était une condamnation à mort.
Je marchai jusqu’à mon bureau, refermant la porte derrière moi d’un geste sec.
Mikhaïl était déjà là, appuyé contre le bureau, les bras croisés. Son regard perçant se posa sur moi, et un sourire moqueur étira ses lèvres.
— Alors, comment va ta protégée ?
Je l’ignorai et allumai un cigare.
— Des nouvelles de Sokolov ?
Il haussa les épaules.
— Il est en ville. Il s’est montré discret, mais nos informateurs confirment qu’il est là depuis au moins deux jours.
Je serrai les dents.
— Il a bougé vite…
Mikhaïl hocha la tête.
— Il veut récupérer Alina.
Un silence pesant s’installa.
Je tirai sur mon cigare et laissai la fumée s’échapper lentement.
— Il ne l’aura pas.
Mikhaïl éclata d’un rire grave.
— Je me doutais que tu dirais ça. Mais la vraie question, c’est : pourquoi tu t’impliques autant ?
Je le fusillai du regard.
— Ce n’est pas son problème.
— Ah ouais ? Alors pourquoi tu la regardes comme si elle était déjà tienne ?
Je ne répondis pas.
Parce que la vérité était dérangeante.
Alina n’était pas qu’un problème à gérer.
Elle était une tentation.
Une obsession.
Mikhaïl secoua la tête, amusé.
— Tu joues avec le feu, Nikolaï. Cette fille pourrait être ta perte.
Je soufflai une dernière bouffée avant d’écraser mon cigare dans le cendrier.
— Ou peut-être que c’est moi qui vais être la sienne.
Je me levai, attrapai mon arme sur le bureau et enfilai mon manteau en cuir.
— Rassemble les hommes. On va faire savoir à Sokolov qu’il n’a jamais eu une seule chance.
Mikhaïl sourit, une lueur de plaisir mauvais dans les yeux.
— Ça, c’est le Nikolaï que je connais.
Je sortis sans un mot, mais une pensée persistait dans mon esprit. Sokolov ne savait pas encore qu’il venait de signer sa propre condamnation. Et moi, je devais me préparer à la guerre. Mais ce qui me troublait le plus… Ce n’était pas Sokolov. C’était Alina.
