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Marquée par là Lune-AE

[1/10] – Le repas

Il ne parut pas surpris par le bruit.

Ni par son recul.

Comme si rien ne pouvait le déstabiliser.

Ses yeux dorés restèrent sur elle un instant, l’enveloppant d’une chaleur qu’elle ne voulait pas nommer.

Puis il baissa la main, ramassa le couvercle, le replaça avec calme.

Ses gestes étaient lents, méthodiques, étrangement domestiques.

Comme s’il avait toujours appartenu à cette cuisine.

Aelya resta immobile près du chambranle, incapable de dire un mot.

Elle savait qu’elle aurait dû protester, lui demander de partir, exiger des explications.

Mais aucun son ne franchissait ses lèvres.

Il prit deux assiettes, les posa sur la table nappée.

Il disposa les couverts, alluma une bougie supplémentaire, vérifia la cuisson du ragoût.

Chaque geste semblait calculé, presque cérémoniel.

Puis il se retourna vers elle.

Elle sentit son ventre se contracter sous la tension.

Il inclina la tête d’un air calme et grave.

— Approche. Tu n’as rien mangé depuis hier.

Sa voix, basse et profonde, vibra en elle comme une invitation qu’elle n’avait pas la force de refuser.

Elle fit un pas.

Puis un autre.

Son regard ne quittait pas la silhouette large et nue de cet homme qu’elle avait d’abord craint et qu’elle ne comprenait plus.

Elle s’assit lentement, sans savoir pourquoi elle obéissait.

Peut-être parce qu’au fond, une part d’elle en avait envie.

Peut-être parce qu’il y avait quelque chose de terriblement intime dans ce repas préparé pour elle.

Il servit le ragoût fumant dans les assiettes.

Son parfum emplissait la pièce, chaud, presque réconfortant.

Puis il se plaça en face d’elle.

Toujours torse nu, sans honte, comme si ce corps sculpté n’était qu’un autre langage qu’il assumait entièrement.

Il posa les deux mains sur la table, la regarda droit dans les yeux.

Et attendit.

[2/10] – Le nom

Aelya baissa les yeux vers l’assiette fumante.

Ses mains étaient crispées sur le rebord de la table.

Elle sentait la chaleur du plat, la douceur des chandelles, et ce regard posé sur elle comme un poids délicat, impossible à repousser.

Elle inspira, osa relever la tête.

— Qui… qui êtes-vous ? murmura-t-elle. Sa voix tremblait plus qu’elle ne l’aurait voulu.

Il ne répondit pas tout de suite.

Un silence s’installa, lourd et intime, comme si le simple fait de lui dire son nom avait un sens plus profond qu’elle ne pouvait le deviner.

Puis il inclina légèrement la tête.

— Vael.

Il prononça ce seul mot avec un calme si tranquille qu’elle en eut le vertige.

Comme si ce nom contenait déjà toutes les réponses qu’elle n’avait pas encore osé poser.

Vael.

Elle répéta mentalement ce son, le goûtant, incapable de l’oublier.

Il poursuivit, sa voix toujours basse et posée :

— Et toi… tu ne devrais pas avoir peur.

Ses yeux dorés accrochèrent les siens.

Elle sentit un frisson étrange lui parcourir la colonne, un mélange de confusion et d’un désir qu’elle refusait de s’avouer.

— Pourquoi… pourquoi êtes-vous ici ? demanda-t-elle dans un souffle.

Un sourire presque imperceptible se dessina sur ses lèvres.

— Pour te rappeler qui tu es.

Il se redressa légèrement, son torse toujours nu, et ajouta d’une voix plus douce encore :

— Et pour que tu saches que tu n’es plus seule.

[3/10] – La douceur ferme

Aelya avait l’impression que son cœur battait à l’endroit où son regard croisait celui de Vael.

Elle ne savait plus si elle devait avoir peur, fuir ou rester.

Tout en elle semblait se contracter et se relâcher à la fois, comme si sa simple présence déréglait quelque chose de fondamental.

Elle baissa encore une fois les yeux vers l’assiette.

La vapeur qui s’en échappait venait effleurer son visage, chaude, presque apaisante.

Mais elle n’arrivait pas à lever la main pour y goûter.

Vael rompit le silence.

Sa voix avait cette chaleur inattendue qui la troublait encore plus que son corps parfait.

— Cela fait deux jours que tu n’as rien avalé.

Elle tressaillit.

Elle ne se souvenait pas l’avoir dit à quiconque.

Il poursuivit, le ton plus grave :

— C’est inquiétant, Aelya. Tu t’épuises. Et je crains pour ta santé.

Elle releva lentement les yeux.

Il avait un air tellement sérieux, presque sévère, que son cœur se serra.

— Tu ne peux pas continuer à te priver ainsi, murmura-t-il.

Il désigna l’assiette d’un geste tranquille.

Ses doigts, larges et veineux, effleurèrent la table comme pour apaiser la tension.

— Tu vas manger, ajouta-t-il d’un ton plus doux, mais ferme.

Le silence qui suivit n’était pas une question.

C’était un ordre.

Mais un ordre donné avec une tendresse qu’elle n’aurait jamais soupçonnée.

— Prends soin de toi, Aelya, insista-t-il en la regardant droit dans les yeux.

Elle sentit ses défenses céder un peu plus.

Personne ne lui avait parlé ainsi depuis des années.

Personne ne l’avait regardée comme quelque chose de précieux qu’on devait protéger.

Sa gorge se serra, et elle inspira profondément pour chasser l’émotion qui menaçait de la submerger.

D’un geste hésitant, elle attrapa la cuillère.

Elle se sentait ridicule, vulnérable, mais aussi terriblement soulagée qu’il soit là.

Et quand elle porta la première bouchée à ses lèvres, Vael ne détourna pas le regard.

Il la regardait comme si c’était le geste le plus important au monde.

[4/10] – Les questions et les frissons

La première cuillerée fut comme un choc.

La chaleur du ragoût se répandit dans sa poitrine, réveillant un vide qu’elle n’avait pas eu la force de ressentir jusque-là.

Elle reposa la cuillère, les doigts tremblants.

Vael ne disait rien.

Il se contentait de l’observer, toujours aussi calme, toujours aussi immobile.

Elle inspira, sans trouver comment soutenir ce regard.

Son esprit cherchait désespérément une logique, une explication.

Comment savait-il ?

Comment pouvait-il affirmer qu’elle n’avait rien mangé depuis deux jours ?

Elle osa lever les yeux, la voix à peine plus qu’un souffle :

— Comment… comment savez-vous tout ça ?

Il n’eut pas besoin de répondre.

Son silence était plus dense que mille phrases.

Un silence qui disait : Parce que je suis là depuis bien plus longtemps que tu ne le crois.

Elle sentit un frisson courir sur sa nuque, descendre le long de son dos.

Une chaleur étrange lui noua le ventre, mélange d’inquiétude et de quelque chose qu’elle refusait de nommer.

Ses paroles… ses gestes… tout en lui réveillait une flamme qu’elle avait cru éteinte.

Elle baissa les yeux sur la table, incapable de supporter plus longtemps la brûlure de son regard.

Mais cela ne servit à rien.

Elle sentait encore son attention posée sur elle, comme une caresse invisible.

Ses lèvres la picotaient d’un frisson qu’elle n’arrivait pas à réprimer.

Ses yeux s’embuèrent sans qu’elle comprenne pourquoi.

Et au fond d’elle, une voix qu’elle ne reconnaissait pas murmurait que si cet homme la touchait encore, elle oublierait tout ce qui l’avait tenue debout jusqu’ici.

Elle referma les doigts sur la cuillère pour se donner une contenance.

Mais l’excitation qui battait sous sa peau, elle, ne se laissait pas apprivoiser.

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