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chapitre 2

Chapitre 2

Victor se tenait là, devant une salle de journalistes, d’associés, de partenaires commerciaux, son visage aussi figé qu’une statue. Son ton était calme, presque sans émotion. « Nous avons décidé de formaliser notre engagement. » Il avait prononcé ces mots avec une autorité qui forçait à l’acceptation. D’un geste, il avait balancé l’annonce sur la table, comme on jette une grenade, mais il savait très bien qu’il n’y avait aucune explosion à craindre. Il n’y en aurait pas. Pas dans ce cercle-là. Ce mariage n’était qu’une formalité dans un jeu plus vaste, une pièce sur l’échiquier des affaires.

Il avait à peine jeté un regard la jeune femme qui se tenait à côté de lui. Elle était belle, d’une beauté glaciale, mais il n’en avait que faire. Ce n’était qu’un symbole. Un symbole d’une guerre qu’il devait gagner. Pourtant, il sentait ce vide qui se creusait en lui, un vide qu’il n’avait jamais ressenti. Mais cela n’avait pas d’importance. Tout ce qui comptait, c’était de s’assurer qu’il ne perdrait pas cette bataille-là. Tout le reste était secondaire.

Les journalistes s’étaient précipités pour poser leurs questions. Les flashs des appareils photo crépitaient, comme une pluie de météores frappant une surface dure. Victor répondait avec aisance, une maîtrise parfaite de l’art de la communication. Mais dans les coulisses, l’atmosphère était bien différente. Là où les caméras ne pouvaient pas capter l’intensité de la situation, la famille de la jeune femme était toute aussi silencieuse que l’avait été leur fille jusque-là.

La mère, une femme plus âgée, observait la scène avec des yeux emplis de soulagement. C’était une victoire pour eux, un point d’ancrage dans une guerre économique qu’ils avaient toujours voulu mener contre leurs rivaux. Mais même si elle souriait, ses mains tremblaient légèrement. Derrière le sourire poli, il y avait une grande inquiétude, une peur que ce mariage ne soit qu’un autre piège dans un réseau déjà trop complexe. Elle savait qu’il n’y avait pas de véritable engagement dans cette histoire, que tout était une façade, une question de pouvoir, de survie. Mais au moins, ils ne seraient plus dans la position des perdants.

Le père, en revanche, ne semblait pas avoir digéré la situation. Bien qu’il ne protestât pas, on pouvait lire la déception sur son visage. Il savait que sa fille n’avait pas choisi ce mariage. Il savait qu’il l’avait poussée dans ce coin. Il s’était toujours imaginé qu’il aurait été le maître de son destin, qu’elle aurait épousé quelqu’un qu’il aurait jugé digne d’elle. Mais il avait échoué. La réalité était que la famille avait été réduite à une simple pièce sur le tableau de jeu, et tout cela, il ne pouvait l’accepter.

La jeune femme elle-même se tenait là, le regard figé sur l’assemblée. Son sourire, tout comme celui de sa mère, était une pure façade. Elle avait appris à maîtriser ses émotions, à camoufler ses pensées. Pourtant, au fond, une boule d’amertume grandissait en elle. Elle savait que cette situation, aussi inévitable soit-elle, marquerait un tournant dans sa vie. Elle n’était plus maîtresse de son destin. Elle était désormais une partie d’un plan plus vaste, un pion dans un jeu cruel.

Le mariage, en soi, n’était pas un problème pour elle. Elle en avait vu d’autres, des femmes se sacrifiant pour la famille, pour l’entreprise. Mais ce qui la dérangeait le plus, ce qui l’empoisonnait peu à peu, c’était l’acceptation passive de ce rôle imposé. Elle avait toujours été une femme de tête, capable de prendre des décisions. Mais là, elle était prise au piège. Elle devait faire face à un homme qu’elle n’avait jamais choisi, qu’elle n’avait jamais voulu. Ce n’était pas l’absence d’amour qui la gênait. Non, c’était l’idée de se soumettre, de se voir reléguée à un rôle d’ombre dans cette gigantesque machination.

Lorsqu’elle tourna les yeux vers Victor, elle se surprit à ressentir un étrange mélange de colère et de résignation. Il était là, calme et imposant, entouré de ses associés, un homme de pouvoir qui semblait tout contrôler. Elle savait, bien sûr, qu’il ne s’engageait pas dans cette union pour l’amour. Ce mariage n’était rien d’autre qu’un contrat, une formalité. Elle en était consciente. Mais ce qu’elle ne pouvait accepter, c’était l’arrogance avec laquelle il s’était emparé de sa vie. Il ne la voyait pas comme une personne, il la voyait comme un obstacle à surmonter, une formalité à traverser.

Elle serra les poings sous la table. Peu importe qu’il se sente investi de sa mission. Peu importe qu’il croie que tout était déjà écrit. Elle avait sa propre volonté, et si elle devait être entraînée dans cette spirale, elle n’allait pas le faire sans y laisser sa marque.

La presse s’était tue un instant, attendant la réaction de la jeune femme. Victor se tourna vers elle, l’invitant tacitement à répondre. Elle savait que ce moment était crucial. C’était à elle de prendre la parole, de montrer qu’elle était une actrice dans cette histoire, et pas une simple spectatrice. Elle prit une grande inspiration et se redressa.

« Je l’accepte », dit-elle, d’une voix claire, mais sans chaleur. « Mais je veux que tout soit clair : ce mariage n’est pas un lien de cœur. C’est un compromis. Un compromis pour le bien de ma famille, pour l’avenir de notre entreprise. » Elle marqua une pause, cherchant à peser ses mots, à enfoncer l’idée dans les esprits. « Je n’attends rien de lui. Et il ne doit rien attendre de moi. »

La tension dans la pièce monta d’un cran. La déclaration était nette, tranchante. Elle n’avait pas besoin de dire davantage. Elle savait que cette posture ne ferait qu’accroître la distance entre elle et Victor. Mais elle n’en avait rien à faire. Au fond d’elle, un léger tremblement d’anxiété se faisait sentir. Mais ce n’était pas de la peur. C’était l’anticipation d’une rébellion intérieure, d’un changement qu’elle n’avait pas encore mesuré. Elle ne voulait pas se laisser écraser. Elle n’accepterait pas de se fondre dans l’ombre d’un homme qu’elle ne connaissait pas, qu’elle n’avait jamais désiré.

Victor, pourtant, ne répondit pas immédiatement. Il se contenta de la regarder avec cette même expression froide, presque distante. Il savait que cette déclaration n’avait pas été une victoire pour lui, mais il n’y avait pas de retour en arrière. Il avait fait son choix. La guerre était déclarée, et il ne restait plus qu’à voir qui en sortirait vainqueur. Il savait que cette lutte allait se mener bien au-delà des salles de réunion et des papiers signés.

Mais au fond, dans ce regard, dans cette froideur qu’elle lui renvoyait, quelque chose d’inattendu bouillonnait en lui. Ce n’était pas de la passion. Pas encore. Mais une étincelle d’intérêt, un désir de comprendre. Il n’aurait jamais imaginé que la situation se jouerait sur ce terrain-là. Et pourtant, il se retrouvait face à une inconnue, une inconnue qui, d’une simple phrase, venait de redéfinir la dynamique de ce mariage.

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