Chapitre 6
En ce premier jour, Abèni, la nouvelle domestique, a noué une amitié sincère avec tout ce qui lui était important dans la maison.
Exactement quelques minutes qu’elle est revenue de la douche. Assise dans sa chambre, elle avait le regard calé vers le plafond. Dans sa tête, elle fouillait par où commencer ses œuvres.
– Je ne peux pas laisser cette famille, il faut que j’y instaure du malheur.
Ceci dit, elle se leva et commença à se promener dans la chambre. Elle allait et revenait quand soudain, elle entendit quelques pas s’approcher de sa chambre. Elle s’arrêta et toute confiante, elle se dirigea vers la sortie et là, elle aperçut une jeune fille.
– Bonsoir, maman m’envoie de t’appeler, dit la nouvelle venue.
– Oui, bonsoir, d’accord ! s’exclama Abèni en suivant immédiatement la jeune fille.
Elles marchèrent jusqu’à arriver dans le salon. Abèni, s’approchant de plus près de sa patronne, s’inclina et lui souhaita bon retour.
– Merci, Abèni ! J’ai vu que tu n’as pas servi la table.
– Oh, au temps pour moi ! C’est parce que je sais que vous n’êtes pas encore rentrés.
– Je te comprends, parfaitement ! Pour les fois à venir, lorsque tu verras que midi s’approche, il faut toujours servir le repas dans les glacières et comme ça, lorsque chacun sera à table, il pourra se servir.
– D’accord, maman, c’est entendu.
Sur ces paroles, Abèni se précipita vers les escaliers et commença à les gravir.
– Maman, cette nouvelle domestique est trop gentille et très respectueuse, remarqua l’une parmi les filles de Victoria.
– Tu n’as pas tort ! Espérons qu’elle soit ainsi pour toujours.
Mère et fille parlaient tout bas quand Abèni refit surface.
– Maman, le repas est prêt !
– Merci ! Et dis, as-tu déjà mangé ?
– Pas encore, maman ; mais je le ferai très bientôt !
– D’accord ! Va te ser…
Victoria n’eut pas encore achevé sa parole lorsqu’un sieur poussa la porte du salon et s’afficha avec son gros ventre. Ce dernier tenait un gros sac à main. Abèni, réalisant que c’était le maître de la maison, se précipita à son adresse pour aller lui saisir le sac et en plus lui souhaiter le bon retour.
– Merci, ma chérie, j’espère que tu vas bien ! répondit le nouveau venu, sourire aux lèvres.
– Oui, ça va bien, merci papa !
Abèni alla déposer le sac sur l’une des tables du salon avant de s’effacer. Pendant ce temps, mère et les trois enfants, réunis autour de la table, mangeaient.
***
Il sonnait vingt-deux heures quand la porte de la chambre d’Abèni claqua et laissa entrer une jeune fille. Du seuil de la porte, celle-ci envoya une salutation à laquelle Abèni répondit : « Oui, bonsoir ma chère ».
Refermant calmement la porte, la nouvelle venue pénétra dans la chambre et marcha jusqu’à s’approcher de plus près de l’ouvrière.
– Puis-je savoir pourquoi tu es enfermée ici ? demanda la nouvelle venue, tout sourire.
Abèni, souriant à son tour, répondit : « Après tout, je suis une domestique et je n’ai pas le droit de m’afficher là où vous êtes ».
– Oh, non ! Arrête de te ridiculiser ! Ici, tu peux faire comme chez toi. Sinon, que te dirait-il de faire une connaissance approfondie !
– Euh…rien ! Je pense qu’il serait très bien de se connaître profondément !
– Wouah ! Dans ce cas, je me présente ! On m’appelle Chancelle, j’ai vingt-deux ans. J’ai obtenu mon baccalauréat depuis deux ans et je suis une formation professionnelle. Je terminerai ma formation dès l’année prochaine et j’effectuerai un voyage sur l’Australie.
– Wouah ! Un voyage sur l’Australie en dit long ! Toutes mes félicitations !
– Merci !
– Sinon, moi, je n’ai pas beaucoup fréquenté. J’aime trop l’argent, voilà pourquoi je me suis vite lancée dans les aventures.
– Wouah, toutes mes félicitations !
– Merci ! Dis-moi, vas-tu à l’église ?
– Bien sûr ! Et toi ?
– Non.
– Et pourquoi ?
– Parce que ça ne me plaît pas.
– Je vois ! Mais ici, tu n’auras pas le choix ! Que tu veuilles ou non, tu dois y aller.
– Hum ? C’est donc obligatoire ?
– Tout à fait ! Tu verras toi-même !
Le cœur d’Abèni, soudain, commença à battre.
– Bien, il faut que je te laisse parce que demain, j’ai cours à sept heures.
– D’accord, passe une excellente nuit.
– Merci !
Chancelle se leva et se dirigea vers la sortie.
« Avec ma gentillesse, pensa Abèni, je ferai de vous, mes amies ».
Elle s’allongea sur son lit et fermant les yeux, elle se mit à se faire des imaginations. Imaginations après imaginations, elle se leva et alla prendre son miroir magique. Le fixant, elle murmura quelques incantations. Soudain, à l’écran, l’image d’un gros oiseau s’afficha. Elle sourit et secoua la tête. Elle déposa le miroir et attrapa son téléphone portable. Elle composa très rapidement un numéro. Au bout de quelques secondes, la communication s’établit.
– Allô maman ? Comment vas-tu ?
– Je vais très bien, et toi ?
– Ça va !
– Je le sens ! Je t’avais rendu visite aujourd’hui mais tu ne m’as pas vue !
– Vraiment ?
– Oui, en ce moment, tu étais en train de préparer la pâte.
– Oh, je vois ! Mais il fallait me faire part de ta présence !
– Non, c’est parce que j’allais à une mission et j’étais très pressée.
– J’espère que tu l’as réussie !
– Bien sûr ! Depuis quand je vais à une mission sans la réussir !
– Super ! Bonne mission alors !
– Merci ! C’est la mère de Francine…
– Oh, la bavarde ! C’est aujourd’hui le jour de son accouchement ?
– Bien sûr ! Sa famille est en larmes actuellement, ha ha ha ha.
– Ha ha ha ha ! Cette femme, elle bavarde trop !
– Je te jure ! Chaque fois, c’est elle ! Comment une femme peut avoir la bouche comme ça ? Maintenant qu’elle est morte, elle n’a qu’à aller continuer sa bouche dans l’au-delà.
Mère et fille, au bout du fil, éclatèrent de rire.
– Elle est a eu sa dose ! Maman, comment est-ce que je peux avoir mon oiseau ?
– Ton oiseau est là ! C’est tout à l’heure que je lui ai servi du mil.
– Merci, maman ! Sinon, je ne sais comment venir le chercher. Ils sont encore au salon en train de suivre la télévision, ma patronne et ses enfants.
– Je vois ! Je vais te l’apporter moi-même.
– Merci, maman !
Abèni raccrocha l’appel et se dirigea vers la porte. Elle la verrouilla et sur le point de revenir à sa place, elle aperçut une vieille femme assise sur le lit.
– Ah, tu es déjà là ! Bonne arrivée !
– Merci !
L’étrangère, dardant tous les murs de la pièce, appréciait l’architecture.
– Qu’elle est belle, la maison ! s’exclama-t-elle.
– Vraiment ! Je voulais même te parler ! J’ai eu à parler longuement aujourd’hui avec Immaculée. Tu sais de qui je veux parler n’est-ce pas ?
– Oui, oui, n’est-ce pas leur prétendue mère de Jésus !
– Absolument ! Eux qui se trompent. Ils ne savent pas que c’est notre outil de travail.
Mère et fille, enthousiastes, éclatèrent de rire.
– Je ne vais pas attendre longtemps parce que j’ai des choses à faire à la maison avant notre heure de rassemblement. Allez, tiens ton oiseau ! Mais dis, où vas-tu le mettre ?
– Sous mon lit bien sûr !
– Ah, d’accord ! Je vais partir ! À tout à l’heure.
Abèni attrapa l’oiseau des mains de sa mère et celle-ci, dans les moindres secondes, disparut. Abèni, caressant l’oiseau, lui souriait.
***
La nuit était profonde. Sur les horloges murales, il tanguait être deux heures du matin. Tout le monde dormait en cette heure profonde de la nuit.
Le monde des ténèbres, en ce moment, était en plein éveil. Formant un cercle, il y avait des âmes enchaînées au milieu d’eux. La reine de la bande, une vieille femme imposante à caractère dur, donnait des ordres auxquels ses serviteurs se pliaient.
– Où se trouve l’âme de la fille du pasteur ? demanda la reine à l’adresse des serviteurs.
– Elle est seule là-bas, répondit l’un des siens.
– D’accord ! N’est-ce pas demain nous avons prévu pour finir avec elle ?
– Oui, c’est demain, la reine ! Mais attention ! Les prières de son père sont en train de la parvenir ! C’est tout à l’heure que nous avons changé la chaîne. Le père et quelques-uns de ses fidèles sont en jeûne et prière. C’est demain leur dernier jour de jeûne et de prière. Je suis sûr que si nous allons attendre jusqu’à demain, l’âme pourrait nous échapper.
À tour de rôle, la troupe se regarda.
– Dans ce cas, commença la reine, il faut que nous finissions avec elle cette nuit.
Ceci dit, un des leurs à taille courte se dirigea vers un arbre au pied duquel était enchaînée une jeune âme. Allant prestement vers l’âme, celui-ci s’arrêta brusquement et recula des pas. Il se retourna voir la bande.
– Cette âme est intouchable, dit-il.
Surpris, tout le monde le fixa intensément et s’apprêtait à lui poser une question quand il reprit : « Regardez là-bas, regardez l’ange qui est debout derrière elle avec du javelot ».
Tous tournèrent leurs regards, fixant la même direction.
L’ange, les fixant méchamment, pointa le bout de son javelot par terre et furieux, leva un premier pas, le deuxième, le troisième et, continua ainsi de suite dans leur direction. Évaluant le danger en cours, la cheffe d’équipe des sorcières, demandant très rapidement la communion, récita hâtivement quelques paroles incantatoires. L’ange, réalisant aussitôt qu’ils voulaient disparaître, sauta en l’air comme un papillon. Certes, c’en fut trop tard : la bande des sorciers disparut, se sauvant.
***
Le monde des humains.
Le soleil, ce matin, était vite sorti de son lit. Victoria et tous ses enfants, comme d’habitude, étaient tous partis de la maison. Dans la maison, ne restait qu’Abèni. Elle essuyait les carreaux de la cuisine quand une ombre apparut. Continuant son travail, elle avait su la présence de l’ombre et savait aussi qui était-ce. Sans tourner la tête, elle dit doucement : « Bonne arrivée, maman ».
– Oui, merci ! Es-tu en train ?
– Oui, maman ! Je suis en train de repenser à ce que nous avons vécu hier !
– De même que moi. J’y repense encore. Si la reine m’avait écoutée, on n’allait pas vivre ça. Je lui avais déjà dit de permettre qu’on tue en même temps l’animal mais elle a dit que c’est une viande que nous allons manger spécialement à part. Maintenant, l’ange n’est-il pas venu la chercher ? Elle-même, elle sait très bien que les enfants des pasteurs ne sont pas des viandes simples comme les autres. Au lieu de laisser nous allons la manger depuis des jours ; voilà elle nous a échappé.
Maman Abèni disait ces phrases avec un cœur rempli de colère.
– On n’y peut rien, ce qui va venir est déjà venu, le mieux, c’est de se calmer. Maman, je savais que si je finissais, j’allais venir à la maison…
– As-tu une inquiétude ?
– Pas en tant que tel ! Au fait, je suis en train de chercher par quel péché profiter pour commencer mes œuvres dans cette maison. Toi-même, comme tu le sais, il faut nécessairement que celui à qui nous voulons porter le malheur nous offense d’abord ! Sinon, sans cela, tout ce que nous prétendons lui admettre ne passe pas. Voilà que depuis que je suis venue dans cette maison, cette femme de Victoria n’a jamais cessé de me montrer sa gentillesse. Je ne sais quoi faire pour qu’elle me cache sa gentillesse afin que je profite pour commencer la mission pour laquelle je suis venue me siéger.
À ces paroles, la mère fixa sa fille et lui sourit amicalement.
– Donc, tu ne sais comment l’avoir ?
– Pas du tout, maman !
– D’accord ! As-tu déjà fait le repas de midi ?
– Non, c’est à onze heures que je compte activer le feu pour le repas de midi.
– C’est bien ! En cuisinant le repas, il faut éviter de mettre du sel. Ce simple geste va l’emmener à te jeter des mots malsains et débordés.
– D’accord, maman ; c’est une très bonne idée ! C’est ce que je vais faire. Hier, je voulais demander les toiles d’araignées pour miner toute la maison mais malheureusement, cet ange est venu nous déguerpir.
– Vraiment ! Il te faut effectivement les toiles d’araignées pour miner la maison. Moi-même, je n’en ai plus à la maison. Mais dès qu’on sera à la réunion, n’oublie pas d’en demander.
– D’accord, maman !
– Bien, je vais partir ! J’ai une mission à accomplir sous la mer avant la tombée de la nuit.
– D’accord ! Mais maman, jusqu’à quand je dois attendre pour que tu m’augmentes la puissance de la sirène ? Je veux aussi commencer par devenir serpent !
– D’accord, dans ce cas, la prochaine fois que je viendrai, je t’initierai cela.
– Merci, maman !
Et sans bouger, maman Abèni disparut de la cuisine. Abèni, quant à elle, continua son devoir.
