Chapitre 07
Jacques, jusqu’ici arrogant, se retrouve sans voix. Andréa ne lui laisse pas le temps de répliquer.
— Donc en fait, c’était pour ça que tu m’as appelée tout à l’heure, pour me menacer en voulant me soutirer encore de l’argent ? Pour financer ton petit nid d’amour ?
Elle secoue la tête, un rire amer lui échappant.
— Tu sais quoi, grand frère, il va falloir que tu trouves un autre endroit où rester. Mais bon, je ne me fais pas de souci, tu es doué pour ça. Tu as toujours su profiter des femmes, alors celle-ci pourra sûrement t’aider, non ?
Elle se tourne vers la jeune femme, qui semble de plus en plus perdue.
— Mais sois prudente, ma belle. Ce mec est un parasite. Il vit aux crochets des femmes et les jette quand il a trouvé mieux. Un vrai Don Juan de bas étage. Moi, j’en ai assez. C’est terminé.
Puis, reprenant son souffle, elle lâche d’un ton ferme :
— Jacques, tu as jusqu’à demain pour dégager de cette chambre. Je vais envoyer mes frères récupérer mes affaires et appeler le propriétaire pour récupérer mes avances.
Un silence pesant s’installe. Jacques reste immobile, le regard baissé. Sans un mot de plus, Andréa attrape son sac et quitte la chambre d’un pas décidé.
La jeune femme encore recouverte du drap se tourne vers Jacques, les sourcils froncés.
— Chéri… c’était quoi ça ? Elle n’est pas ta sœur ?
Jacques soupire, visiblement excédé.
— Ferme-la et habille-toi.
— Attends… Tu veux dire qu’elle était ta petite amie ?!
— Tais-toi et dégage d’ici.
La fille, choquée, secoue la tête avant de commencer à ramasser ses vêtements.
Jacques, lui, enfile rapidement un pantalon et sort en trombe. Il se précipite jusqu’au portail, cherchant Andréa du regard. Mais elle n’est déjà plus là.
Assise à l’arrière d’un taxi-moto, Andréa laisse libre cours à sa douleur. Les larmes coulent sans retenue alors qu’elle serre son sac contre elle.
— Pourquoi ? Pourquoi encore ?
Elle a tout fait pour Jacques. Elle l’a soutenu, nourri, logé, aidé à se relever. Et voilà comment il la remercie ? Le cœur en miettes, elle fixe l’horizon défilant sous ses yeux embués.
Résidence de Florent…
Florent, épuisé par sa journée et perturbé par les événements récents, a préféré se coucher après avoir pris son dîner.
Lucie rentre enfin à la maison. Le gardien lui ouvre le portail, et elle fait son entrée au volant de sa voiture. Une fois garée, elle coupe le moteur et reste quelques secondes immobile, une boule d’angoisse au creux de l’estomac. Elle appréhende la réaction de Florent. Prenant une profonde inspiration, elle descend de la voiture et se dirige vers l’intérieur.
Le salon est vide.
Elle jette un regard autour d’elle, puis se dirige vers la salle à manger. Elle constate que Florent a déjà dîné, ce qui lui laisse entendre qu’il ne l’a pas attendue. Une vague de culpabilité l’envahit.
Elle retire ses chaussures, les tenant à la main pour ne pas faire de bruit, et se dirige vers la chambre à coucher. Arrivée dans leur chambre, elle aperçoit Florent profondément endormi. Son visage est paisible, presque innocent sous la lueur tamisée de la lampe de chevet.
Elle pousse un léger soupir de soulagement avant de poser son sac et ses chaussures sur le sofa. Se dirigeant vers la salle de bain, elle se déshabille et prend une douche rapide, laissant l’eau chaude détendre ses muscles tendus.
Quelques minutes plus tard, elle revient dans la chambre et s’allonge délicatement aux côtés de son mari. Florent dort comme un bébé, respirant calmement.
Lucie l’observe un instant, son cœur serré par une tempête de pensées contradictoires. Puis, dans un geste saturé de tendresse et de culpabilité, elle dépose un léger baiser sur son front avant de s’abandonner à ses propres tourments.
De l’autre côté de la ville, Michael rentre enfin chez lui, mais une chose l’irrite aussitôt. Émilie n’est pas là.
— Sofia ! » appelle-t-il d’un ton sec.
La femme de ménage, qui s’apprêtait à finir sa vaisselle, accourt aussitôt.
— Oui, Monsieur ?
— Où est Madame ?
— Elle est sortie, Monsieur.
— Sortie pour aller où ?
— Je l’ignore, elle ne m’a rien dit.
Michael serre la mâchoire, sort son téléphone et tente immédiatement de la joindre. Une tonalité. Puis deux. Puis trois. Mais aucune réponse.
Son agacement monte d’un cran jusqu’à ce qu’il entende enfin le bruit d’un moteur dans l’allée. Il se précipite vers la fenêtre et aperçoit Émilie qui entre dans la cour. Le gardien referme le portail derrière elle. Ce qui le met hors de lui, ce n’est pas seulement son retour tardif, mais le sourire éclatant qui illumine son visage. Un sourire qu’il n’a pas vu depuis bien longtemps.
Elle descend de la voiture avec une insouciance presque provocante et entre à l’intérieur. Michael l’attend de pied ferme.
— D’où viens-tu ? » demande-t-il d’une voix froide.
Émilie arque un sourcil, amusée par son ton autoritaire.
— C’est quoi cette question ? M’as-tu envoyé quelque part?
— Ne me fais pas perdre patience, Émilie ! D’où viens-tu, et pourquoi tu ne répondais pas à mes appels ?
— Parce que j’étais au volant, Monsieur mon mari. Je suis sortie pour me distraire. D’ailleurs, rappelle-moi, c'était quand la dernière fois que tu as pris la peine de m’emmener quelque part ?
— Quoi ?!
— Tu as très bien compris. Et sache que je n’ai ni le temps ni l’énergie pour une dispute ce soir. Je suis fatiguée, et j’ai besoin de sommeil pour faire passer l’effet de l’alcool qui résonne encore en moi.
Michael écarquille les yeux.
— Donc, tu es sortie en pleine nuit, laissant nos enfants à la maison, pour aller te saouler ? Félicitations, vraiment !
Émilie croise les bras, visiblement peu impressionnée.
— Tu as vu quelqu’un me ramener ici ? Si j’étais ivre, crois-tu que j’aurais pu conduire ? Je ne veux pas de problème, Michael.
— Tu fais quelque chose d’inacceptable, je te confronte et tu me dis que tu ne veux pas de problème ?! Explique-moi ce qui t’arrive, Émilie !
— Oh, tu veux parler de ce qui est à l’origine de tout ça ? » dit-elle en haussant un sourcil moqueur. « Très bien, parlons-en ! Comme je dois encaisser ton mépris quotidien ? Comme je dois fermer les yeux sur le fait que tu passes plus de temps avec ta directrice adjointe qu’avec ta propre femme ?
Michael ouvre la bouche pour répliquer, mais elle ne lui en laisse pas le temps.
— Tu veux savoir ce qui est en train de changer, Michael ? C’est moi. Moi, qui ne suis plus prête à être ton petit chien fidèle qui attend patiemment un mari absent, un homme qui ne se soucie plus de sa femme. J’ai été patiente, j’ai été compréhensive, j’ai donné tout le respect nécessaire à ce mariage, mais j’ai fini par comprendre une chose essentielle : tu ne le mérites pas.
Elle s’approche de lui, le regard perçant.
— Tu es juste un homme qui voulait une épouse pour se donner un titre. Rien de plus.
Sur ces mots, elle tourne les talons et quitte le salon sans un regard en arrière. Michael reste figé, stupéfait. Pour la première fois, il a l’impression de perdre le contrôle sur sa femme.
