Chapitre 7
CHAPITRE 7
LE POINT DE VUE DE SAMUEL
Le matin se leva, et je me réveillai dans un demi-sommeil, encore désorienté par ce qui s'était passé la veille. Mon corps était encore marqué par la proximité d'Elodie, mais je n’arrivais pas à remettre les événements en place, comme si quelque chose m'échappait. Je la regardai, silencieuse, en train de s'habiller. Son air détaché, presque indifférent, n’aidait en rien à dissiper le flou qui entourait cette nuit.
"Qu’est-ce qui s’est passé hier soir ?” lui demandai-je, cherchant une réponse qui n'arrivait pas. Mais elle se contenta de me répondre, d’un ton calme, presque amusé : "Rien, Samuel. Oublie, comme si de rien n'était."
Ses mots me laissèrent perplexe, mais je n'insistai pas. Elle avait ce don de me rendre confus, de me laisser avec des questions sans réponse. Je me levai, cherchant mes vêtements, encore sous l’effet de son regard. Elle était déjà prête et se dirigeait vers la porte.
"Je vais te raccompagner," dis-je, sans vraiment réfléchir.
Elle m’accompagna jusqu'à ma voiture, ses pas légers sur le sol encore frais de la matinée. Le soleil à peine levé, je la regardai une dernière fois avant d’ouvrir la portière de la voiture. Elle sourit, un sourire presque imperceptible, puis dit simplement : “Bonne journée, Samuel.”
Je m’installai au volant, lançant le moteur, quand je la vis faire un pas en arrière, son regard s’élevant pour croiser celui d’Isa. Je reconnus la jeune femme qui revenait déjà tôt, comme si le temps se bousculait dans ce quartier étrange. Elle s’arrêta un instant, me salua d’un geste de la main et me regarda intensément, une lueur dans les yeux qui ne me laissa pas indifférent.
LE POINT DE VUE D'ELODIE
Je rentrai chez moi, encore un peu secouée par la scène du matin. Isa n’était pas encore arrivée, ce qui me laissait quelques instants de tranquillité. J’espérais pouvoir m’échapper dans un peu de calme, mais à peine avais-je posé mon sac que j’entendis la porte d’entrée s’ouvrir, et la voix d'Isa résonna dans le hall.
"Elodie, c’était lui, l’homme de l’autre jour, non ? Celui qui venait de démarrer sa voiture tout à l’heure ?" Son ton était curieux, insistant, comme si elle avait trouvé un détail qui l’avait interpellée. Je me figeai un instant, mon cœur battant un peu plus fort. Elle l’avait vu… je n'avais pas vu ça venir.
Je lui répondis d’un ton détaché, tentant de camoufler l'angoisse qui montait en moi. "Non, c'était pas lui," dis-je en espérant que ma voix ne trahisse rien. Je savais qu’Isa pouvait être têtue, mais je n'avais pas envie qu'elle s'aventure trop loin dans ce sujet.
Mais elle insista. "Je l'ai bien reconnu, Elodie. Ne me mens pas."
Je soupirai, me tournant lentement vers elle. Il fallait que je me montre calme et sûre de moi. "Tu te trompes, Isa," répondis-je, essayant de la convaincre d’un regard. "C'était juste un type, rien à voir avec l'autre."
Isa resta un moment silencieuse, ses yeux cherchant une vérité que je n'étais pas prête à lui donner. Elle haussait les épaules, mais je sentais qu'elle n'était pas dupe. Elle n’avait pas l’air convaincue, mais elle se résigna à changer de sujet.
"Bon… et pourquoi t’étais pas à la maison ce soir ?" demandai-je soudainement. "Tu sais, je suis ta grande sœur, je n’ai pas à répondre à toutes tes questions, hein ?" Je tentai de détourner la conversation avec un sourire en coin, mais je sentais déjà la tension monter. Elle ne manquait jamais une occasion de chercher à tout savoir, surtout quand il s’agissait de ma vie. "De toute façon, tu sais bien que je sors souvent," ajouta-telle espérant que je la laisserait tranquille.
Isa ne répondit pas tout de suite, mais je pouvais voir dans ses yeux qu’elle ne lâcherait pas l’affaire. Elle me connaissait trop bien. Et moi, je savais que cette conversation n’était pas terminée. Mais aujourd’hui, je n'avais pas envie de rentrer dans ces détails. Pas encore.
Le doux parfum du café noir emplit mes narines alors que je porte la tasse fumante à mes lèvres. Je ferme brièvement les yeux pour savourer cette première gorgée, laissant la chaleur se répandre dans mon corps encore engourdi par le sommeil. Assise à mon bureau à la maison , je croise mes jambes sous la table et ajuste ma posture. Mon ordinateur portable est allumé devant moi, la lueur bleutée de l’écran illuminant mon visage.
D’un geste automatique, je fais glisser mes doigts sur le pavé tactile, ouvrant mes fichiers de travail. Mon esprit se plonge instantanément dans les chiffres et les rapports qui défilent sous mes yeux. Mon index tapote doucement contre la tasse en céramique posée à côté du clavier, un tic nerveux que j’ai adopté lorsque je suis concentrée.
De temps à autre, je fronce légèrement les sourcils en analysant des données, mon stylo venant machinalement se coincer entre mes lèvres avant que je ne griffonne quelques notes dans mon carnet. Je repousse une mèche de cheveux derrière mon oreille, puis étire mon cou en soupirant discrètement.
Je suis totalement absorbée, mon monde réduit à l’écran et aux lignes de texte qui s’alignent sous mes corrections. Mon café refroidit lentement, mais je ne m’en rends même pas compte. Il n’y a que le silence de la pièce, le cliquetis rapide de mes doigts sur le clavier et le bourdonnement lointain de la ville qui s’éveille à travers la fenêtre entrouverte.
Le cliquetis rapide de mes doigts sur le clavier s’interrompt lorsque l’écran de mon ordinateur vibre légèrement. Instinctivement, mon regard glisse vers le coin de l’écran où une notification s’affiche. Un message.
Samuel.
Je sens un petit frisson parcourir ma colonne vertébrale en voyant son nom apparaître. Je me redresse légèrement sur ma chaise, mon cœur battant d’un rythme imperceptiblement plus rapide. Curieuse, je clique sur la notification pour afficher le message.
Samuel : Je suis bien rentré à la maison.
Un sourire naît sur mes lèvres, doux et incontrôlable. Il a pris la peine de m’envoyer un message. C’est peut-être anodin, mais l’attention me touche. Je prends une seconde pour savourer cette minuscule sensation de plaisir avant de poser mes doigts sur le clavier et de taper une réponse.
Moi : OK, passe une bonne journée Samuel.
J’hésite un instant avant d’appuyer sur "Envoyer", mon pouce survolant légèrement la touche. Puis, sans réfléchir davantage, j’envoie le message et repose mon téléphone sur la table.
Mais ma concentration est déjà brisée. Mon regard fixe l’écran de mon ordinateur sans réellement lire ce qui s’y affiche. Mon esprit est ailleurs, encore suspendu entre les souvenirs de la veille et l’étrange sensation que Samuel me laisse à chaque fois que je pense à lui.
