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chapitre 2

Chapitre 2

L’air dans la maison était lourd, comme toujours. Chaque meuble, chaque rideau semblait avoir été placé pour afficher la réussite, mais rien n’y était plus. Sophie le savait maintenant. C’était une illusion. Un décor soigneusement monté, une façade qu’elle avait crue vraie pendant des années. Mais aujourd’hui, la vérité frappait à sa porte avec une brutalité sans nom. Et elle n’allait pas l’ignorer.

Elle le trouva dans le salon, comme d’habitude, son téléphone entre les mains. Il ne semblait même pas avoir remarqué qu’elle était rentrée. Gabriel, son mari, cet homme qu’elle avait aimé, qu’elle avait cru connaître, semblait être un étranger. Elle n’avait plus l’envie de le regarder comme avant, de s’émerveiller de ses manières, de son regard froid qui s’était si souvent fait tendre. Non. Aujourd’hui, il ne lui inspirait qu’une profonde lassitude.

— Gabriel.

Il ne bougea même pas. La voix de Sophie résonna dans l’espace vide, bien plus forte qu’elle ne l’avait voulu. Mais elle n’avait pas l’intention de mâcher ses mots.

— Gabriel, regarde-moi.

Il leva finalement les yeux, mais pas assez vite pour cacher le mensonge qu’il portait dans son regard. Il s’attendait à quoi ? À ce qu’elle ne sache pas ? À ce qu’elle ferme les yeux comme elle l’avait fait pendant toutes ces années ? À ce qu’elle se laisse bercer par le mirage d’un mariage qu’il n’avait jamais voulu ?

— Qu’est-ce que tu veux ? dit-il d’une voix lasse, une nuance de mépris sous les mots.

Sophie s’avança, son corps tendu, son poing serré. Elle n’avait pas besoin de réfléchir pour savoir ce qu’elle allait dire.

— Je sais ce que tu fais, Gabriel. Je sais avec qui tu passes ton temps. Camille.

Il blêmit à peine, un froncement de sourcils marquant son visage d’une expression d’agacement, comme si elle venait de l’interrompre en pleine partie de golf.

— Tu sais de quoi tu parles ?

Sophie ne répondit pas tout de suite. Elle n’avait pas à le faire. La photo, le message anonyme, tout était clair. Elle attendait. Elle le forçait à la regarder en face.

Gabriel soupira, et cette fois, il ne put dissimuler l’agacement qui le traversa. Il posa le téléphone sur la table basse, se redressa légèrement, comme si tout cela ne valait même pas qu’il s’y attarde.

— Tu ne comprends pas, Sophie. Ce n’est pas ce que tu crois.

Elle eut un rire amer. Ce n’était pas ce qu’elle croyait ? Elle, qui avait été là, patiente, fidèle, toujours prête à pardonner. Mais lui, il n’avait même pas l’intention de s’excuser. Elle n’était rien pour lui, et il le savait.

— Vraiment ? C’est quoi, alors ? Parce que ça ressemble sacrément à une tromperie, ça.

Il la regarda un instant, son visage se durcissant. Puis, avec une froideur qu’elle n’avait pas anticipée, il lâcha :

— Oui, d’accord, c’est ce que tu veux entendre, Sophie. Oui, je la vois. Oui, je suis avec elle.

Le souffle de Sophie se coucha dans sa gorge. Il venait de l’avouer. Si simplement, si froidement. Comme s’il parlait du temps, ou d’un problème de plomberie. Pas de regret, pas d’empathie. Rien. Elle sentit un vide se creuser à l’intérieur d’elle-même. Ce vide qu’elle n’avait jamais voulu voir se former, mais qui, aujourd’hui, était béant, évident.

— Je… je ne t’ai jamais aimé, Sophie, dit-il d’un ton qui la fit sursauter. J’ai… je n’ai jamais eu de choix. Ce mariage, c’était juste une obligation sociale.

Elle cligna des yeux, comme si le monde autour d’elle venait de basculer. Obligée ? Elle ? Cela n’avait même pas de sens.

— Tu m’as utilisée.

Il haussait les épaules, comme si de toute façon, tout ça n’avait aucune importance. Il la regarda de haut, son regard plein de dédain.

— Oui, et alors ? Tu es une femme respectable. Tu n’as rien à te reprocher. Mais tu n’as jamais été ce que je voulais.

Sophie sentit ses jambes faiblir sous le poids de ses mots. Ce n’était pas un mariage. C’était une mascarade. Tout ce temps, toute cette énergie qu’elle avait consacrée à ce qu’elle croyait être une vie commune. Un projet de couple. Il n’avait jamais eu l’intention de faire partie de sa vie. Pas vraiment. C’était un arrangement.

Elle eut un instant de vertige. Puis, d’une voix plus calme mais aussi plus coupante que jamais, elle lui répondit :

— Je vois. Et tu ne m’as jamais respectée, n’est-ce pas ?

Il la fixa sans un mot, comme si cela allait de soi. La vérité la frappa avec la violence d’un coup de poing.

Elle se leva, marchant d’un pas décidé vers l’entrée, mais il la rattrapa. Ses doigts se refermèrent sur son bras, et il tenta de l’attirer à lui. Elle le repoussa violemment.

— Ne me touche pas.

Elle le fixa, son regard devenu tranchant. Une dernière fois, elle le scruta, cherchant une trace d’humanité, une lueur de culpabilité. Mais il n’y avait rien. Rien.

— Je suis partie, Gabriel. Et je ne reviendrai pas.

Il la suivit du regard, mais elle savait que rien ne pourrait changer son indifférence. Il ne comprenait pas. Il ne la voyait plus. Ils étaient déjà étrangers l’un à l’autre.

Le sac qu’elle avait posé près de la porte se fit sentir dans sa main, le poids des décisions à venir pesant lourdement sur ses épaules. Elle sortit. La porte claqua dans un bruit sec, et Sophie n’eut pas besoin de se retourner. La maison n’avait plus de sens pour elle. Il ne lui restait plus qu’une seule chose : partir, définitivement.

Ses pas résonnèrent dans la rue déserte, loin de cette vie qu’elle avait laissée derrière elle. Pas de regrets. Pas de retour en arrière. Elle savait ce qu’elle devait faire maintenant.

Il n’était plus rien.

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