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Chapitre 4

Mais elle n’osait pas poser la question.

Au lieu de cela, elle fit ce qu’elle savait faire de mieux : elle s’inclina légèrement et recula, prenant soin de ne faire aucun bruit en quittant la pièce.

Elle n’avait rien à faire ici. Rien à dire.

Et Nigel venait de le lui rappeler avec une brutalité implacable.

Le silence qui suivit les paroles de Nigel était pesant, presque étouffant.

Personne ne bougeait, pas même Ryse, qui se tenait toujours droite, les mains crispées autour du plateau. Mais l’instant suivant, Nigel repoussa bruyamment sa chaise et se leva d’un geste sec.

Sans un regard pour personne, il quitta la pièce à grands pas, la tension vibrante encore visible dans la raideur de ses épaules.

« Nigel, attends ! » s’exclama Éloïse, se levant précipitamment pour le suivre.

Elle lança un regard désolé à Madame Harris avant de disparaître à son tour, laissant derrière elle l’odeur subtile de son parfum floral.

Ryse, quant à elle, sentit une étrange chaleur monter dans sa poitrine. Une colère sourde ? Une douleur qu’elle ne voulait pas nommer ? Elle ne savait pas. Tout ce qu’elle savait, c’était qu’elle voulait partir, quitter cette pièce où elle n’était qu’une oméga méprisée.

Elle allait tourner les talons lorsqu’une voix l’arrêta.

« Ryse, viens t’asseoir. »

C’était Madame Harris.

Il y avait dans son ton une autorité douce, mais indiscutable.

Ryse hésita, ses doigts se resserrant involontairement autour du plateau. Mais elle n’avait jamais su désobéir à cette femme qui, malgré son statut, l’avait toujours traitée avec une certaine bienveillance.

Elle reposa le plateau sur une desserte et s’approcha lentement.

Le fauteuil qu’elle occupait était grand, imposant, et contrastait avec la silhouette délicate de la vieille femme qui lui faisait signe de s’asseoir juste à côté d’elle.

Ryse s’exécuta, gardant les yeux baissés, le cœur battant fort dans sa poitrine.

Léonie Harris prit une profonde inspiration avant de poser sa main sur la sienne.

« Il est temps de parler sérieusement, Ryse. »

L’oméga se raidit légèrement.

Elle ne savait pas pourquoi, mais une angoisse sourde se répandait en elle.

Madame Harris attendit quelques secondes avant d’annoncer d’une voix calme mais ferme :

« Tu vas épouser Nigel. »

Le monde de Ryse bascula en une fraction de seconde.

Elle releva brusquement les yeux vers la matriarche, les lèvres entrouvertes sous l’effet du choc.

« Quoi… ? » souffla-t-elle, incapable de comprendre ce qu’elle venait d’entendre.

Madame Harris ne répéta pas. Elle la fixa simplement, son regard plein de détermination.

« Vous êtes liés, que vous le vouliez ou non. Tu es une oméga, Ryse, et Nigel est un alpha. Sa fiancée est une bêta, et tu sais ce que cela signifie. »

Ryse sentit son estomac se nouer.

Oui, elle le savait.

Les bêtas pouvaient parfaitement s’unir aux alphas, mais ils n’avaient pas la compatibilité biologique que les omégas partageaient avec eux. Pour assurer une descendance forte, il était attendu qu’un alpha ait une compagne oméga.

Mais cela… Cela ne la concernait pas.

« Je ne veux pas, » murmura-t-elle enfin, la voix tremblante.

Madame Harris ne sembla pas surprise.

« Je sais que c’est brutal, et je ne te demande pas d’accepter immédiatement. Mais crois-moi, Ryse, il n’y a pas d’autre choix. »

Ryse se leva brusquement.

« Il y a toujours un choix, Madame, » répliqua-t-elle, la gorge serrée.

Son regard croisa celui de Madame Harris une dernière fois avant qu’elle ne recule d’un pas.

« Je suis désolée… mais je ne peux pas. »

Et sans attendre de réponse, elle tourna les talons et quitta la salle à manger, sentant les larmes lui brûler les yeux alors qu’elle montait précipitamment les escaliers pour rejoindre sa chambre.

L’air lui semblait étouffant. Son monde s’effondrait sous ses pieds, et elle ne savait plus comment respirer.

Chapitre 4

Léonie Harris referma la porte de la salle à manger d’un geste mesuré, mais son regard était dur, déterminé.

Elle n’avait pas l’intention de laisser les choses traîner plus longtemps. Nigel pouvait bien s’emporter, taper du poing sur la table et prétendre qu’il était maître de son destin, mais certaines décisions ne lui appartenaient pas entièrement.

Et ce mariage en faisait partie.

Les mains jointes devant elle, la matriarche traversa le hall du manoir à pas lents, mais chaque mouvement était empli de cette autorité silencieuse qui lui était propre.

Elle savait déjà où elle trouverait son fils.

La grande double-porte vitrée menant au jardin était entrouverte, laissant entrer une légère brise printanière.

Nigel était là, assis sur un banc de pierre, le dos légèrement courbé, les coudes appuyés sur ses genoux. À côté de lui, Éloïse lui parlait d’une voix douce, posant délicatement une main sur son bras dans une tentative évidente de l’apaiser.

Léonie ne ralentit pas.

Dès qu’elle arriva à leur hauteur, elle s’adressa directement à Éloïse, son ton calme mais ferme.

« Éloïse, je vais devoir parler à mon fils en privé. »

La jeune femme sursauta légèrement et se redressa, comme prise au dépourvu.

« Oh… bien sûr, Madame. »

Elle jeta un regard incertain à Nigel, mais celui-ci ne dit rien. Il gardait les yeux baissés, la mâchoire crispée.

Éloïse se mordit la lèvre, puis se leva à contrecœur.

« Je vais… nous chercher du thé, » murmura-t-elle avant de s’éloigner, laissant derrière elle une légère fragrance florale.

Lorsque le silence retomba, Léonie prit place sur le banc à côté de son fils, sans le regarder immédiatement.

Nigel poussa un soupir agacé.

« Mère, si c’est pour me faire la morale, je— »

« Tu vas épouser Ryse. »

Sa voix claqua comme un fouet.

Nigel releva brusquement la tête, les yeux écarquillés.

« Quoi ?! »

Léonie inspira profondément, gardant son calme face à l’éruption prévisible de son fils.

« Tu as très bien entendu. »

Nigel serra les poings.

« Il en est hors de question. »

« Il n’y a rien à discuter, Nigel. Tu es un alpha, et elle est une oméga. C’est ainsi que les choses doivent être. »

Son fils éclata d’un rire amer.

« C’est ainsi que les choses doivent être ? Tu te rends compte de ce que tu dis ? On est en train de parler de mon mariage, de ma vie, et tu me dis que je n’ai pas le choix ? »

Léonie tourna enfin la tête vers lui, son regard perçant.

« Et que comptes-tu faire, Nigel ? Épouser Éloïse et espérer que tout ira bien ? Espérer que la nature acceptera votre union sans poser de problème ? Tu sais aussi bien que moi que ce n’est pas ainsi que fonctionne notre monde. »

Nigel serra la mâchoire si fort que les muscles de son cou se contractèrent douloureusement.

« Je refuse de me plier à ces traditions archaïques ! »

Léonie haussa légèrement un sourcil.

« Des traditions archaïques qui ont pourtant maintenu l’équilibre entre les alphas et les omégas depuis des générations. »

Nigel se leva brusquement, incapable de rester assis plus longtemps.

Il marcha quelques pas dans l’herbe fraîche, les mains sur les hanches, le regard perdu au loin.

« Ryse ne veut pas de ce mariage non plus, » finit-il par dire d’une voix rauque.

Léonie ne bougea pas.

« Cela ne change rien. »

Nigel se retourna lentement vers elle, un éclat d’incrédulité dans les yeux.

« Comment peux-tu dire ça ?! Tu l’apprécies pourtant, non ? Elle a grandi sous ton toit, tu la considères presque comme une fille. Alors pourquoi veux-tu la condamner à ça ? »

Léonie le fixa un instant avant de répondre, sa voix plus douce cette fois.

« Parce que c’est sa place. »

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