Chapitre 17 : Je vous dis de la déposer
Yves ne crut pas un instant au malaise de sa femme. Il pensa qu’elle avait fait semblant d’être malade, afin de susciter sa pitié.
— Tu veux me faire avoir pitié de toi ? ricana-t-il. Tu ne pourras pas me tromper.
La petite femme tombée par terre, ne bougea pas. Yves haussa alors les sourcils.
— Ne fais plus semblant ; ça suffit ! l’exhorta-t-il.
Mais elle ne bougea toujours pas. Yves plissa alors légèrement les yeux, puis l’approcha en faisant avancer son fauteuil roulant. Au moment où il remarqua que le visage de Lisa était pâle, et que ses lèvres avaient perdu leur couleur, il se sentit soucieux tout à coup.
***
Vingt minutes plus tard dans le couloir de l’hôpital, Yves assit dans son fauteuil roulant d’un air sombre, regarda Bastien s’occuper de toutes les formalités, et qui ensuite se dirigea vers lui, après les avoir finies.
— Qu’est-ce qui ne va pas avec elle ? demanda Yves froidement.
Bastien fit une moue.
— Le médecin a dit qu’à cause de son insuffisance d’énergie, de la maladie et de la fatigue, l’état de son enfant n’est pas stable. Lui fit-il savoir. C’est tout !
À l’entendre, Yves haussa les sourcils. Il n’était pas convaincu de la véracité des faits, et se mit à ricaner.
— Elle veut exciter ma pitié ; parce que c’est si facile de blesser l’enfant ?
— Mais monsieur Chevotet, son teint est vraiment malsain, et c’est le diagnostic de l’hôpital. Intervint Bastien.
Yves le regarda direct avec des yeux perçants, et Bastien toussota aussitôt.
— C’est peut-être un diagnostic erroné, monsieur Chevotet. Se reprit-il. Que ferons-nous alors dans ce cas ?
Yves se souvint que son objectif n’avait pas été atteint, vu que Lisa avait vomi toutes les pilules qu’il lui avait fournies. Ses yeux devinrent plus froids.
— Contacte le médecin, et qu’il la fasse avorter ! ordonna-t-il.
À l’entendre, Bastien ne put s’empêcher d’écarquiller les yeux.
— Mais, monsieur Chevotet ?
— Pense-t-elle qu’elle peut garder son bâtard, en faisant semblant d’être malade ? marmonna Yves.
— Euh... pourquoi ne s’est-elle pas fait avorter ? s’étonna Bastien d’un air interrogateur. Alors, c’est vraiment inacceptable ! Elle est maintenant votre femme, et si cet enfant naît, ne seriez-vous pas une risée pour les autres ?
— Tais-toi ! lui ordonna Yves.
Bastien fut surpris par la voix froide d’Yves, et il hocha instantanément la tête.
— Alors, je vais contacter le médecin ! annonça-t-il, avant de se retourner.
Bastien partit aussitôt. Yves fit rouler en silence son fauteuil roulant vers la salle. La pièce était remplie d’une odeur de désinfectant, et la petite et mince femme, était allongée sur ce lit d’hôpital, avec les mains bien placées sur sa poitrine. Son beau visage était calme, à part la pâleur de son visage et de ses lèvres, elle ne ressemblait pas à une malade, mais plutôt à une personne en train de dormir. Elle était visiblement une femme intrigante, mais ressemblait à un ange, lorsqu’elle est dans le coma. Le fauteuil roulant s’approcha lentement du lit, et les yeux d’Yves se fixèrent sur elle.
— Est-ce qu’elle fait semblant ? soliloqua-t-il. Sinon, comment pouvait-elle s’évanouir à une telle coïncidence ? Pense-t-elle vraiment que cela lui permettra de donner naissance à son bâtard ?
Yves la regarda en se plongeant dans ses pensées, quand les cils de Lisa frémirent légèrement, et qu’elle ouvrit lentement les yeux. Elle se réveilla avec les yeux embués, qui devinrent lentement de plus en plus brillants. Ses yeux étaient froids et propres, aussi beaux et calmes que l’eau de source dessinée en couleur par un dessinateur.
« Si profonds et fascinants ! » s’extasia secrètement Yves.
Yves était stupéfait de sa beauté. L’instant suivant, il semblait qu’une pierre soit jetée à la surface de la source, et que son calme soit interrompu. En voyant Yves, les yeux de Lisa se remplirent d’horreur. Elle s’assit avec peur, et se retrancha dans un coin. Yves plissa direct les yeux face à l’attitude de la jeune femme, et serra les dents.
— Suis-je le diable ? grogna-t-il.
« T’es plus terrible que le diable ! » rétorqua silencieusement Lisa dans son cœur, sans toutefois broncher un mot.
Elle baissa les yeux, et n’osa pas le regarder en face. Et au bout d’un moment ;
— Je t’en supplie ; laisse-moi garder le bébé ! finit-elle par délier ses lèvres d’une voix basse, en une supplication.
Sa voix était très faible, comme le gémissement d’un animal avant sa mort. Mais Yves l’entendit clairement.
— Tu veux me persuader de garder un bâtard ? rétorqua Yves.
Lisa ne parla pas, et se mordit juste la lèvre inférieure.
— Entre rester chez les Chevotet et le garder, tu ne peux faire qu’un choix ! lui posa-t-il un ultimatum.
Lisa releva la tête et le regarda avec panique. Évidemment, elle n’avait pas une contre-mesure. Elle était très anxieuse et impuissante. Les deux se regardèrent ainsi pendant un moment. Le bruit des pas dans le couloir se fit entendre, et Bastien se présenta dans la salle avec le médecin.
— Monsieur Chevotet, monsieur Mallette est là ! annonça ce dernier.
Lisa regarda les deux nouveaux venus, et soudainement des doutes se firent voir dans ses yeux.
— Que font-ils ici ? chercha-t-elle à savoir directement.
Voyant les yeux froids d’Yves, Lisa comprit.
— Madame Maret ; êtes-vous prête pour l’avortement ? demanda Bastien.
— Pas question ! refusa Lisa bruyamment.
Elle se recula plus dans son coin. Étant très triste, elle refusa d’être approchée.
— Madame Maret, il n’y aura pas de douleur si vous obéissez, sinon...
Bastien venait à peine de finir de parler, que déjà deux ou trois hommes en costume et lunettes de soleil, entrèrent à leur tour dans la salle. Évidemment, ils étaient déjà disposés à l’amener. Si elle n’obéissait pas, ils l’attraperaient de force.
« Mais alors quoi ? Elle ne serait jamais d’accord ! » se fustigea-t-elle mentalement.
— N’y pensez pas ! se mordit Lisa la lèvre inférieure, regardant fixement les hommes d’un air féroce. Restez en arrière !
Bastien la regarda, et secoua la tête, impuissant.
— Attrapez-la ! ordonna-t-il de nouveau.
— Oui ! acquiescèrent les hommes.
Ils s’avancèrent vers Lisa, et cette dernière était déjà prête à leur donner des coups de poing et de pieds, quand ils la toucheraient. Lisa était comme une folle, et oublia qu’elle venait de s’évanouir une fois. Elle était tellement énervée en ce moment, qu’on aurait dit une possédée. Soudainement ses yeux se troublèrent, et elle perdit de nouveau rapidement connaissance, puis tomba faiblement sur le lit.
— Monsieur Chevotet, elle... semble s’être évanouie à nouveau ! déclara Bastien.
Yves regarda cette farce depuis un moment, et il se moqua en voyant cela.
— Le même scénario ; c’est stupide de l’utiliser une deuxième fois. Déclara-t-il. Emmenez-la !
Bastien accepta de la tête, et ordonna aux hommes d’emmener Lisa. Elle fut soulevée par eux, sans aucune résistance. Elle avait l’air si faible et délicat. Ses longs cheveux doux devinrent épars, et le col incliné, révéla sa petite épaule blanche. Yves se sentit blesser en la voyant ainsi, et il dit immédiatement ;
— Déposez-la !
Ces hommes étaient choqués. « Était-ce Monsieur Chevotet qui vient de donner l’ordre ? »
— Vous n’avez pas entendu ? gronda-t-il.
Alors, les hommes posèrent rapidement Lisa sur le lit. Bastien était perplexe, alors il demanda :
— Monsieur, quel est le problème ?
Yves fit rouler son fauteuil roulant vers elle, puis lui boutonna bien sa veste qui était ouverts à cause de sa lutte. Aussitôt, il se rendit compte de ce qu’il faisait. Tout le monde le regarda curieusement, comme s’il faisait une chose étrange. Yves retira alors ses mains, et il sourit cruellement.
— De toutes les façons, c’est ma femme. Si je constate que vous la voyez ou la touchez effrontément, je vous tuerai ! les prévint-il.
Ils comprirent tout de suite la menace, et hochèrent la tête.
— Compris, monsieur Chevotet !
Soudain, Yves sentit qu’on tira sur son col. Et quand il se retourna, il vit Lisa allongée sur le lit avec une paire d’yeux brillants ouverts, et lui faisant un air très pitoyable, comme un petit animal abandonné.
— Yves, laisse-moi garder le bébé, s’il te plaît ! le supplia-t-elle d’une voix faible.
Après avoir parlé, elle s’évanouit de nouveau, et sa main qui tenait le coin du vêtement d’Yves, tomba également. La salle était très calme, et Yves était assis immobile, regardant le joli visage blanc avec des yeux profonds. Pendant un long moment, Bastien regarda Lisa avec incertitude, et lécha sa lèvre inférieure.
— Monsieur Chevotet, sinon ... on renonce à la faire avorter ? demanda-t-il.
