Chapitre 14 : Qui cherche-t-il ?
— Ne t’inquiète pas ; j’ai juste un rhume. Plus tard, j’irai à la pharmacie moi-même, et je m’achèterai des médicaments. L’arrêta-t-elle à temps.
Le vieil homme la sonda avec des yeux perspicaces, et Lisa en fut nerveuse, jusqu’à se mordre sa lèvre inférieure inconsciemment.
— Le timbre nasillard de ta voix est si lourd ; comment peut-il être soigné seulement par des médicaments ? s’inquiéta Olivier.
Le vieil homme soupira légèrement, puis lui fit signe de se rapprocher. Lisa avança prudemment de quelques pas, puis s’arrêta.
— N’oublie pas d’acheter les médicaments. Lui recommanda-t-il. Et quand tu te sentiras mieux après les avoir pris, n’oublie pas d’aller à l’entreprise pour voir Yves.
Elle hocha la tête, puis dit :
— D’accord, beau grand-père !
— Bon ; Vas-y ! la libéra le vieil homme de satisfaction.
Après avoir quitté la maison des Chevotet, Lisa téléphona à Julenne, qui vint la chercher dans les vingt minutes suivantes. Après que Lisa fut montée dans sa voiture, Julenne lui demanda :
— Tu as bien décidée de payer l’avortement ?
Lisa ne répondit pas, et attacha silencieusement sa ceinture de sécurité.
— Pourquoi tu ne parles pas ? insista son amie.
Julenne tourna la tête et jeta un coup d’œil à Lisa. La voyant rester là sans expression, elle fronça les sourcils.
— Qu’est-ce que tu as ? N’y as-tu pas bien réfléchi hier soir ? Tu veux garder cet enfant ; c’est ça ?
En entendant cela, Lisa se frotta le bas-ventre.
— C’est quand même une vie ! se lamenta-t-elle. N’est-ce pas trop cruel de l’avorter ?
— Eh, Lisa ; tu plaisantes avec moi ? s’exclama son amie. Tes parents n’étaient-ils pas cruels quand ils t’ont demandé d’épouser un handicapé en remplaçant ta sœur ? N’était-il pas cruel ton ex-mari, quand il t’a viré de la maison tout en ayant une maîtresse dans ton dos ? Si tu gardes ce bébé, les Chevotet ne pourront jamais te tolérer. Quand tu retourneras dans ta famille d’origine, tes parents te nourriront-ils encore ?
Il semblait que les paroles de Julenne la dégrisèrent. Lisa releva rapidement la tête, puis regarda devant elle. Son avenir lui sembla soudain épineux.
— Écoute-moi, et fais-toi avorter de l’enfant ! insista son amie. Maintenant, les Chevotet sont ton seul appui. D’ailleurs, cet enfant est d’origine inconnue. Qui sait quel problème mental, pourrait-il avoir ?
Cela dit, on dirait que Julenne à directement prit la décision pour Lisa.
— En tant que ton amie intime ; je m’arrête ici. Tu peux continuer ta réflexion sur le reste.
Puis Lisa se souvint de ce qu’Yves lui avait dit la veille. Il lui a dit qu’il lui donnerait trois jours pour prendre la décision, mais ce fut une façon de parler.
« Alors, doit-elle se faire avorter de l’enfant, si elle voulait rester chez les Chevotet ? » s’interrogea-t-elle in petto.
Si elle quittait la famille des Chevotet, elle ne pourrait pas non plus retourner dans sa famille d’origine, les Maret. Réfléchissant à cela, ses yeux s’assombrirent.
— Allons-y ! décida-t-elle.
— Es-tu sûre de ta décision ? chercha à s’assurer son amie. Alors, je t’accompagnerai à l’hôpital. (Elle se retourna puis ajouta :) Si cet enfant était de ton amant, je ne te ferai certainement pas d’objection si tu veux l’élever. Mais il est juste d’un inconnu, et on ne sait pas s’il sera une bénédiction ou une malédiction dans ta vie. Le meilleur moyen, est de le faire avorter.
Sur ces dires, les deux amies restèrent silencieuses jusqu’à l’hôpital. L’humeur de Lisa était très déprimante après s’être faite enregistrée et fait la queue. Julenne l’accompagnait et lui murmurait des mots de réconfort. Quand ce fut enfin son tour, le médecin fronça les sourcils après l’avoir examinée.
— Madame Maret, selon le résultat de l’examen, votre paroi utérine est extrêmement fine. Une interruption de grossesse, entraînera une perforation et une hémorragie. Nous ne vous recommandons pas de faire un avortement.
En entendant cela, Lisa fronça les sourcils, et Julenne fut également surprise.
— Vous déconseillez l’avortement ? répéta Julenne.
— Exactement ! Cela ne lui est pas recommandé. Soupira le médecin. Pensez-y sérieusement ! L’hémorragie n’est pas bénigne. Revenez après pour bien en discuter.
Quand elles sortirent de l’hôpital, Julenne fronça aussitôt ses sourcils.
— Tu ne peux pas subir un avortement ; comment faire alors ? s’inquiéta-t-elle. Oh mon Dieu, comment peux-tu avoir toutes ces choses aussi ennuyeuses ?
— Je ne sais pas non plus ! murmura Lisa.
— Je te raccompagne chez toi. déclara Julenne après quelques secondes de silence.
Lisa hocha d’abord la tête en signe d’approbation, avant de la secouer aussitôt, en se rappelant un truc.
— Non, je dois aller à l’entreprise ! expliqua-t-elle. Dépose-moi au Groupe Chevotet.
Julenne ne dit rien, et la conduit à la porte de l’entreprise. Quand elle vit le bâtiment du Groupe Chevotet, elle ne put se retenir de soupirer.
— Ma famille est assez riche, mais la richesse du Groupe Chevotet est hors de mon imagination. Déclara-t-elle.
— Julenne, je te remercie pour aujourd’hui. La gratifia Lisa. Salut !
— Salut ! répondit Julenne. Je vais consulter d’autres médecins, et puis je te contacterai.
***
Vu que la dernière fois, Lisa avait été accompagnée par le vice-président du groupe, plusieurs réceptionnistes se souvinrent très bien d’elle. Donc cette fois, elles l’accueillirent avec chaleur. Lisa prit alors sans difficulté l’ascenseur, et arriva sans encombre au bureau du président, qui se trouvait au plus haut niveau du bâtiment. Elle s’avança doucement, et découvrit que la porte du bureau n’était pas fermée. Et bien avant qu’elle n’y fasse un pas, elle entendit Yves dire :
— La dernière fois que je t’ai demandé de la retrouver, tu m’as ramené cette femme-là. Cette fois encore, c’est une femme qui est déjà mère, que tu m’as ramené, et non cette personne qui m’intéresse. Bastien ; je peux savoir quel est le problème ? J’ai été trop tolérant envers toi, ou tu travailles sans idée ?
Assis devant le bureau, Yves tapota légèrement le bureau de ses doigts fins. Une lueur apparut dans ses yeux, et une atmosphère sévère envahit tout son corps. Bastien se tenait debout devant son bureau, et était en train de subir des reproches, la tête basse et penchée sur le côté, comme un chiot triste. Voyant cette scène, Lisa s’empressa de se cacher derrière la porte.
Yves était tellement en colère, qu’elle ne voulait pas être impliquée, quand elle entrera. Alors, elle devait à tout prix l’éviter.
— Monsieur Yves, je ne le fais pas exprès. Se justifia Bastien. C’est parce que vous m’avez donné trop peu d’informations la concernant. Alors je préfère faire des fautes, que de laisser rien ne bouger.
Bastien se trouvait innocent. Il assistait Yves depuis longtemps, et s’occupait généralement de questions de travail. Même quand il y avait des problèmes, il les réglait rapidement. Mais cette tâche concernant les trouvailles de cette femme, et qui plus est, une femme dont il n’avait aucune information, ne serait-ce que le nom, était très difficile.
« Où n’est-ce pas difficile de trouver une femme enceinte dans l’hôpital ? »
— Je t’ai donné peu d’informations ? ironisa Yves. Tu ne sais pas comment collecter des informations, toi ?
Yves ricana, et ses yeux perçants s’assombrirent. Il arrêta de tapoter le bureau et demanda :
— Ou est-ce que tu me blâmes de ton inefficacité ?
Son ton faible et froid fit relever soudain, la silhouette de Bastien, et ce dernier secoua immédiatement la tête.
— Je n’oserai pas, monsieur Yves. Le détrompa-t-il. Je vais organiser plus d’inspections la prochaine fois, et je l’interrogerai en personne, avant de vous l’emmener.
« Interroger ? » S’étonna Lisa.
— Ne vous inquiétez pas ! Si c’est elle, cette personne, je ne lui ferai certainement pas de mal. Rassura-t-il son maître.
Ayant une réponse satisfaisante, Yves tira sa cravate sur son torse avec impatience, puis laissa Bastien sortir.
— Va-t’en ! le congédia-t-il aussitôt
L’atmosphère dans le bureau était si froide, que Bastien n’y pouvait plus rester, et même brûlait d’y être chassé par Yves.
— D’accord ! s’empressa-t-il alors d’obtempérer, quand l’ordre fut émis.
Bastien sortit aussitôt et fermera la porte du bureau derrière lui. Quand il se retourna, il vit Lisa qui se tenait debout près du mur.
Ils se regardaient un moment, et quand Lisa voulut prononcer quelques mots, Bastien la traînait direct dans un coin proche.
— Quelle audace ! la gronda-t-il. Vous étiez en train d’écouter en cachette mes conversations avec monsieur Yves ?
Suite à cette accusation, Lisa secoua violemment la tête.
— J’ai entendu votre entretien juste par hasard. Se défendit-elle, avant de demander subitement ; mais qui recherche-t-il ?
« L’homme est un animal curieux, et elle était curieuse. »
De plus, elle était sa femme, et elle voulait instinctivement connaître son ennui. En entendant la question, Bastien plissa les yeux.
— Madame Clélie, cela ne vous regarde pas ! la sermonna-t-il. Ne me poser pas des questions sur des choses que vous ne devriez pas savoir. Vous avez remplacé votre sœur pour épouser monsieur Yves, donc vous ne pouvez pas être considérée comme sa véritable épouse. Si vous vous mêlez de ses affaires qui ne vous concerne pas, vous risquez ne plus continuer à être sa femme.
