Chapitre 6 : Les Murmures de l'Étage
La tension dans le salon était palpable. Les visages figés, les respirations retenues, tout semblait suspendu dans un silence oppressant, jusqu’à ce que le grincement retentisse de nouveau. Cette fois, il semblait plus proche, presque au-dessus d’eux. Mélanie recula instinctivement vers le mur, ses mains tremblant tandis qu’elle serrait la lampe torche que Hugo venait de lui tendre.
– Ce… ce n’est pas le vent, murmura-t-elle, ses mots brisés par la peur.
Lucas fit un pas en avant, son regard rivé au plafond. Pour la première fois, il ne tenta pas de sourire, de faire une remarque légère pour calmer les esprits. Ses épaules étaient tendues, et ses mains, qu’il essayait de garder détendues, trahissaient son anxiété.
– Très bien, déclara-t-il finalement, son ton moins assuré qu’il aurait voulu. On monte. On doit voir ce qu’il se passe.
Alice secoua la tête avec force. – Non, Lucas. On ne monte pas. Et sûrement pas tous ensemble. Si quelque chose nous attend là-haut…
– Quoi ? interrompit Lucas. Tu veux qu’on reste ici à attendre ? Attendre quoi, Alice ? Que la maison tombe en ruine autour de nous ?
Hugo, bien qu’habituellement insouciant, leva une main pour interrompre leur dispute. – Calmez-vous, tous les deux. Si on monte… on le fait avec prudence. Mais on ne peut pas simplement ignorer ça. Pas après ce qu’on a vu dans le sous-sol.
Mathias posa un regard nerveux sur Mélanie, qui semblait sur le point de pleurer. Il hocha légèrement la tête, en signe d’accord. – Je crois qu’Hugo a raison. On ne peut pas rester là. Si cette… chose est réelle, il vaut mieux savoir.
Alice déglutit avec difficulté. Elle voulait protester, elle voulait refuser, mais au fond d’elle, elle savait qu’ils avaient raison. Ignorer le problème ne le ferait pas disparaître. Pourtant, la peur s’accrochait à elle comme une ombre froide.
– Très bien, lâcha-t-elle finalement. Mais ne faisons rien d’insensé.
Lucas se retourna vers les escaliers, l’air déterminé, mais ce fut Hugo qui prit les devants, une lampe à huile dans une main, et un tisonnier qu’il avait trouvé près de la cheminée dans l’autre.
– Si quelque chose se cache là-haut, je préfère ne pas être à mains nues, dit-il en essayant de plaisanter, mais personne ne rit.
Les marches de l’escalier craquèrent sous leurs pieds, chaque pas semblant amplifier le malaise qui les envahissait. Mélanie jetait sans cesse des regards derrière elle, comme si elle craignait que le sous-sol ne se manifeste à nouveau. Mathias, malgré ses mains tremblantes, tenait fermement sa lampe torche et essayait de ne pas faire de bruit.
Arrivés à l’étage, ils s’arrêtèrent dans le couloir sombre. Les portes des chambres s’alignaient comme des gardiennes silencieuses, mais l’obscurité qui régnait derrière elles était suffocante.
– Alors ? demanda Lucas à voix basse. Où on cherche en premier ?
Hugo fit un geste vers la chambre d’Alice, la plus proche. – C’est là qu’on a entendu les bruits. Ça commence par là.
Alice sentit son cœur s’accélérer. Elle hocha la tête, bien qu’elle n’ait pas réellement envie d’entrer. Hugo poussa doucement la porte, et le grincement résonna comme un cri dans le silence.
La pièce était plongée dans une pénombre immobile. Rien ne semblait déplacé à première vue, mais l’air était lourd, presque irrespirable. Mélanie resta en retrait, se mordant nerveusement les lèvres.
– Rien… murmura Hugo en balayant la pièce avec la lampe. Absolument rien.
Mais alors qu’ils s’apprêtaient à sortir, un bruit faible mais distinct se fit entendre. Une sorte de souffle… venant du placard. Hugo échangea un regard avec Lucas avant de s’approcher lentement.
– Non, ne fais pas ça… supplia Mélanie, sa voix brisée par la peur.
Hugo ignora ses protestations et ouvrit la porte d’un coup. Le placard était vide. Absolument vide. Mais le souffle, lui, n’avait pas disparu. Il semblait maintenant flotter dans l’air autour d’eux.
Alice recula brusquement, la main sur sa poitrine. – On doit sortir d’ici. Tout de suite.
Mais Lucas, toujours cherchant à comprendre, refusa de bouger. – Non. Quelque chose nous joue des tours. Mais ce n’est pas réel. Ce n’est pas…
Avant qu’il ne puisse terminer sa phrase, la lampe torche de Mathias s’éteignit brusquement, les plongeant dans une obscurité totale. Un cri déchirant éclata dans le couloir, et une ombre passa devant eux, rapide, indéfinissable.
Mélanie hurla, et Hugo, dans un élan de panique, tira Lucas hors de la pièce. – Descendez ! Maintenant ! cria-t-il.
Ils se précipitèrent dans l’escalier, les sons effrayants les suivant comme une traque invisible. Une fois en bas, Lucas referma la porte d’un coup, tremblant de tout son corps. Tous se regroupèrent dans le salon, les respirations saccadées, les cœurs battant à tout rompre.
La maison était maintenant plongée dans un silence encore plus lourd, mais aucun d’eux n’osait parler. Ils savaient qu’ils n’étaient pas seuls.
Le salon était plongé dans un silence pesant. Les cinq amis se tenaient serrés les uns contre les autres, les yeux rivés sur l'escalier comme s'il pouvait révéler à tout moment l'origine des bruits qui les hantaient. Même Hugo, pourtant le plus sceptique, semblait incapable de cacher son anxiété. Lucas brisa finalement le silence, sa voix basse et hésitante.
– D'accord... Je crois qu'on doit admettre qu'il se passe quelque chose ici. Cette maison... elle n'est pas normale.
Mathias, toujours accroupi près de son appareil photo, releva la tête. – Ce n'est pas juste la maison. Le lac... les bois... tout ici semble connecté. On est au mauvais endroit, au mauvais moment.
Mélanie, qui avait pris place sur le canapé, fixa Lucas avec un regard accusateur. – Tu nous as dit que ce week-end serait parfait. Que c'était l'endroit idéal pour se détendre. Tu as vu les photos avant de réserver, Lucas. Tu ne t'es pas demandé pourquoi une maison aussi isolée était encore sur le marché ?
Lucas se passa une main sur le visage, visiblement agacé. – Mélanie, ce n'est pas le moment de me blâmer. Comment pouvais-je savoir ? Ce n'était qu'une annonce, comme toutes les autres.
– Et si tu avais creusé un peu ? rétorqua Mélanie, sa voix montant d'un cran. Si tu avais pris le temps de vérifier l'histoire de cet endroit, peut-être qu'on ne serait pas dans cette situation.
Alice, sentant l'intensité de l'échange, s'interposa. – Mélanie, ça ne sert à rien de jouer au jeu des reproches maintenant. Lucas ne pouvait pas prévoir ça. Mais ce que Mathias dit est vrai. Tout ici semble connecté. Le lac, la maison, le sous-sol... il y a quelque chose qui veut qu'on reste. Ou peut-être qu'on ne reparte pas.
Hugo éclata soudain de rire, mais c'était un rire amer, presque nerveux. – Et maintenant quoi ? On abandonne ? On se met tous dans un coin en espérant que ça passe ? Vous savez quoi, je vais chercher une explication rationnelle. Parce que franchement, ces histoires de "connexion" ou d’"ombres" commencent à me taper sur les nerfs.
Mathias lui lança un regard perplexe, avant de répondre d'un ton posé. – Et quelle serait ton "explication rationnelle", Hugo ? Parce que tout ce qu'on a vu aujourd'hui défie la logique.
Hugo haussa les épaules. – Peut-être des courants d'air ? Des illusions d'optique ? Qui sait. Mais moi, je refuse de croire qu'on est "poursuivis" par quoi que ce soit.
Mélanie, incapable de retenir son irritation, répondit sèchement. – Les courants d'air ne font pas bouger des ombres, Hugo. Et ils ne gravent pas des symboles dans le sol.
Alice prit une profonde inspiration, décidant de calmer la discussion. – Peu importe ce que c'est. Le fait est qu'on est ici, et qu'on doit décider quoi faire. Parce qu'attendre que ça empire n'est pas une option.
Lucas, qui semblait perdu dans ses pensées, prit finalement la parole. – Peut-être qu'on devrait descendre dans le sous-sol encore une fois.
Les autres le regardèrent avec incrédulité. Mélanie se leva brusquement, secouant la tête. – Non. Absolument pas. On ne retourne pas là-bas. Pas après ce qui s'est passé.
– Mélanie, écoute-moi, tenta Lucas. Si on trouve quelque chose... si on comprend ce qui se passe, on pourra peut-être trouver un moyen de mettre fin à tout ça.
Alice fronça les sourcils. – Lucas, tu as vu ce qu'il y avait là-bas. Ces symboles, ces murmures... Ce sous-sol n'est pas juste un "endroit". C'est... un passage vers quelque chose. Et je ne crois pas qu'on puisse "mettre fin" à quoi que ce soit en descendant encore.
Mathias hocha la tête en signe d'approbation. – Elle a raison. Descendre là-bas, c'est jouer avec le feu. Et si on réveille quelque chose de pire ?
Lucas, pourtant connu pour son obstination, sembla hésiter. Il regarda les visages tendus de ses amis, réalisant enfin que sa détermination ne suffisait pas.
Hugo brisa le silence, sa voix remplie de sarcasme. – Alors quoi ? On reste ici comme des lapins terrifiés ? Parce que franchement, c'est pas mon style.
Mélanie répondit, son ton froid et direct. – Si tu veux être "brave", Hugo, fais-le. Mais ne nous entraîne pas dans ta stupidité.
Hugo voulut répliquer, mais Alice l'interrompit. – Assez ! On doit rester unis. C'est notre seule chance. Si on commence à se disputer, cette maison nous détruira avant que quoi que ce soit d'autre ne le fasse.
