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Chapitre 2

2: La chambre du futur patron

Point de vue de Livia

Lorsque je pousse la porte de la chambre, une odeur de renfermé me frappe immédiatement. Rien d’étonnant : cette pièce n’a pas été utilisée depuis des années.

La lumière du jour filtre à travers les rideaux épais, projetant une lueur tamisée sur les meubles. Une chambre immense, à l’image du reste de la maison. Un grand lit en bois massif, une armoire imposante, un bureau en acajou près de la fenêtre, et des étagères remplies de vieux livres.

C’est ici qu’il dormira. Alessandro.

Mon futur patron. L’idée me trouble plus que je ne veux l’admettre. Son père est décédé, sa mère est trop souffrante pour gérer la maison. Dès qu’il passera cette porte, il deviendra l’homme de cette demeure.

Je prends une profonde inspiration et me mets au travail.

Je commence par ouvrir grand les fenêtres, laissant entrer l’air frais du matin. Un vent léger s’infiltre dans la pièce, soulevant légèrement ma jupe, caressant ma peau. Je chasse cette sensation et attrape un chiffon. D’abord, les étagères. La poussière s’est incrustée partout, formant une fine couche grise sur les reliures des livres.

Mes doigts effleurent les titres. Des ouvrages sur l’économie, la philosophie, quelques romans classiques. Un homme cultivé, visiblement.

Je passe le chiffon sur les surfaces, chaque mouvement faisant voler des particules dans la lumière.

A-t-il changé depuis le temps où il vivait ici ?

Je repense à la photo. Son regard captivant, ce sourire qui semble cacher mille secrets. Et si c’était un homme froid et arrogant ? Ou pire encore… un homme dangereux ? Je secoue la tête et continue mon travail.

Je me dirige vers le lit et retire les draps anciens, sentant aussitôt une odeur légèrement âcre. Je les enroule rapidement et les mets de côté. Puis, je tends les bras pour étaler un drap blanc immaculé sur le matelas. Le tissu glisse entre mes doigts, doux et frais. J’ajoute des oreillers moelleux, tapotant légèrement pour leur donner plus de volume.

Dormira-t-il ici ce soir ? L’idée de savoir qu’il s’allongera là, sur ces draps que je viens d’arranger, m’envoie une étrange chaleur dans le ventre.

Reprends-toi, Livia. Je me détourne et continue. Le sol ensuite. J’attrape une serpillière, imbibée d’un parfum de lavande. Le manche glisse entre mes mains alors que je frotte, mes mouvements amples et précis. Une goutte de sueur roule le long de ma nuque, s’infiltrant sous mon col. Le silence de la pièce est presque oppressant.

J’imagine Alessandro entrant ici, observant chaque détail, jugeant mon travail. Serait-il exigeant ? Indifférent ? Ou le genre d’homme à remarquer la moindre imperfection ? L’idée me donne envie de redoubler d’efforts.

Je termine en disposant une serviette propre sur la chaise près du bureau et en plaçant une bouteille d’eau sur la table de chevet. Tout est parfait. J’essuie mon front du revers de la main et recule d’un pas pour observer l’ensemble. La chambre est prête. Et moi… je ne suis pas certaine de l’être. Ce soir, Alessandro arrivera.

J’ai perdu la notion du temps.

Je frotte, nettoie, ajuste chaque détail avec minutie, mais la fatigue commence à peser sur mes épaules. Mon corps proteste, mes muscles endoloris me supplient d’arrêter, mais je refuse. Pas encore. Je veux que cette chambre soit impeccable, parfaite pour son retour.

Je m’active, les joues chauffées par l’effort. Le parfum du détergent et de la lavande emplit mes narines, mêlé à l’odeur du bois ciré et des draps frais. J’ai chaud, trop chaud. Ma nuque est moite, quelques mèches de cheveux collent à ma peau. Je recule d’un pas pour admirer mon travail. Tout est propre. Tout est en ordre.

Mais moi…

Un vertige me prend, mes paupières deviennent lourdes. Mes jambes vacillent légèrement, mais je refuse de céder. Je fais quelques pas, à la recherche d’un appui, mais mes genoux ploient sous la fatigue accumulée. Mon corps bascule en avant, et avant même de comprendre ce qui m’arrive, je me retrouve à genoux sur le tapis moelleux du sol.

Un soupir m’échappe. La douceur du tissu sous mes doigts me surprend. Je laisse ma main glisser sur la surface épaisse, appréciant malgré moi cette sensation apaisante.

Juste une seconde. Je me laisse tomber en avant, ma joue effleurant la chaleur du tapis. Mon souffle est lent, profond. Mon corps s’abandonne sans mon consentement, mes muscles enfin soulagés de cet épuisement sourd.

J’aurais dû me relever. J’aurais dû retourner dans ma chambre. Mais mes paupières se ferment d’elles-mêmes, et tout devient flou. La dernière chose que je perçois, c’est le murmure du vent s’engouffrant par la fenêtre restée entrouverte. Puis, plus rien. Le sommeil m’engloutit.

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